Lynce avait commencé à jouer de tous ses charmes pour s’attirer la sympathie de plusieurs prêtres (1), dès qu’elle avait saisi l’importance de la situation et surtout la manière dont elle pouvait potentiellement l’amener à ce qu’elle pensait être son destin. Aussi fut elle rapidement mise au courant de l’arrivée d’un prêtre rouge venu de la lointaine Asshaï Lès Ombres et envoyé par le Grand Prêtre du temple rouge de la ville qui avait vu naitre le seul vrai Dieu.

Lorsqu’elle arriva, l’entretien avait déjà commencé, la porte était fermée, elle y colla son oreille curieuse et écouta. Elle constata que, malgré tous les augures, le paladin doutait. Elle fronça les sourcils. Nul ne pouvait douter d’Aemon, elle n’aimait pas cela. Mais en même temps, elle était certaine que, dès qu’il l’aurait vu, ses doutes s’envoleraient, cela ne l’inquiétait pas vraiment. Peut-être était-ce là une forme de foi. Elle sourit même à l’idée que cet enfant qui possédait le pouvoir de sauver le monde était né un peu grâce à elle. Pour sûr, elle avait été guidée par R’hllor lorsqu’elle était venue jusqu’à Baeron avec sa chère et tendre Kashina et décidé de faire en sorte que, le plus vite possible, elle porte l’enfant du Dragon Noir. Il avait beau rester muet dans les flammes et avoir pour elle, un chemin plus que tortueux, il était là à chaque pas qu’elle faisait, à chaque décision qu’elle prenait. Elle ne pouvait le nier, même lorsque, pensant à sa situation actuelle qu’elle trouvait abominable, elle perdait la foi et se mettait à pleurer, seule dans son lit à la faveur de la nuit, sur sa vie passée, son Dragon Noir, son Tregar, son Jorah, sa Gran Tour.

Abominable était un bien grand mot pour une femme qui n’avait presque jamais eut faim, presque jamais froid, n’avait été presque jamais battue, presque jamais forcée à faire quelque chose qu’elle ne voulait pas faire. Mais pour elle, se contenter de vivre dans l’ombre de son amie et maitresse était très difficile, elle était jalouse de toute l’attention que le monde entier semblait porter à Kashina, terriblement jalouse et, si elle ne l’avait aimé de tout son cœur, si elle n’avait eu trop de tendresse pour elle, elle l’aurait probablement tuée. Mais elle ne pouvait pas, pas plus qu’elle ne pouvait la quitter et laisser grandir Aemon loin de ses yeux et de son cœur ; il était aussi, un peu, son fils, celui qu’elle n’aurait jamais, l’enfant qu’elle ne pourrait jamais porter.

La Hightower aurait pu devenir prêtresse Rouge, oui, cela lui aurait plu, mais elle s’était révélée totalement dénuée de talent pour cela et avait été bien obligée de se rendre à l’évidence, la formation de Prostituée Sacrée lui convenait mieux. Mais cela la gênait, sans compter qu’elle ne comprenait toujours pas très bien la fonction de ces dernières. Pour Kashina, c’était facile, elle avait donné naissance à Celui qui fut Promis. Mais elle, elle ne donnerait naissance à personne, jamais, même pas à un bâtard bon pour l’esclavage. A quoi pouvait-elle servir ? A qui ? A R’hllor ? Comment ? Elle ne trouvait de réponse ni dans les flammes ni dans ses longues insomnies tourbillonnantes. Elle ne trouvait que des cauchemars dans lesquels elle était piétinée par la foule venue acclamer Aemon et sa divine mère, si parfaite, si humble, si douce, si dévote. Lynce avait bien essayé de devenir comme elle, mais elle en était bien incapable, elle faisait des efforts, mais elle n’était pas, et ne serait jamais comme Kashina, c’était pour cela qu’elle l’aimait, parce qu’elle était ce qu’elle ne serait jamais. C’était pour cela qu’elle la haïssait, parce qu’elle était devenue ce qu’elle aurait tant voulut être…

Asshaï les Ombres. Lointaine cité. Si lointaine. Devait-elle donc tant s’éloigner de sa famille ? A cette idée, la mélancolie la gagna, mais elle entendit que Benero n’était pas du tout d’accord avec ce voyage et retrouva le sourire. Elle ne pouvait qu’approuver, pour ses intérêts personnels, évidement mais aussi pour ce qu’elle avait entrevu lors de leur dernière balade en ville, l’espoir, les esclaves prêts à suivre la réincarnation d’Azor Ahaï, tout un monde de misère à exploiter pour conquérir le monde et assurer à R’hllor la suprématie absolue. Oui, bien des choses devaient se jouer grâce à Aemon et Kashina, et elles devaient avoir lieu ici, Lynce aussi en était persuadée. Restait à en convaincre Kashina, mais si tel était bien le dessein de R’hllor, elle finirait par le voir et pas comprendre que la fin valait bien le sang qui serait inévitablement versé. Et si Lynce était l’instrument de R’hllor pour aider Kashina et Aemon à suivre le bon chemin, alors elle saurait trouver les mots.

La jeune femme enfila une longue robe ajustée de dentelles rouge qui laissaient apparaitre à peu près tout de sa physionomie, les cheveux relevés en un chignon tressé qui mettait en valeur son port de tête altier et son visage. Une tenue digne de sa Maison de naissance et de mariage ainsi que de son destin, mais aussi de son dévouement sans faille à R’hllor, à Aemon et à sa mère. Kashina se mit à danser, sa manière de communiquer avec le seul vrai Dieu, comme elle était belle alors, comme elle était… lumineuse. Oui. Elle irradiait. Parfaite. Parfaite. Lynce avait omis de la prévenir qu’un représentant d’Asshaï viendrait la voir, elle la voulait dans son état naturel, sans stress, sans pression, juste elle-même. Parfaite, toujours. Si parfaite qu’elle n’avait nul besoin de se préparer, de jouer pour tenir son rôle. La Hightower se contenta de bercer l’enfant et de lui chanter une chanson que lui fredonnait souvent sa mère tout en observant sa chère et tendre, jalousant son talent autant qu’elle l’admirait.

A la fin de la danse, Lynce ferma les yeux et huma l’air du crépuscule avec un léger sourire, le représentant d’Asshai ne tarderait plus, il verrait l’enfant, il verrait sa mère, et il saurait, et alors, le destin commencerait à se jouer sous ses yeux. Elle répéta :
__ La nuit est sombre et pleine de terreurs. » Mais ça n’était pas l’obscurité qui faisait battre la chamade à son petit cœur d’artichaut, c’était ce qui allait se jouer, l’importance des instants qui allaient suivre, le rôle qu’elle pourrait y jouer, la faible marge de manœuvre. Elle jouait sa vie, son destin, son étoile, et aussi, accessoirement, le dessein de R’hllor.

La blonde hésita une seconde, presque imperceptiblement avant de lui rendre l’enfant. Oh comme elle aurait aimé le garder encore, toujours. Mais elle ne pouvait pas le nourrir, pauvre petit, et il avait besoin de sa mère, de son odeur, de sa douceur, de son amour, de ses regards. Même Lynce pouvait le constater chaque jours, il cherchait le sein, le trouvait et tétait, immédiatement calme et satisfait, impatient parfois avant, il souriait aux anges, à R’hllor, à la lumière, seuls les bras de Kashina le consolaient à tous les coups. Assise à côté de la jeune mère sur le banc, elle regardait Aemon boire avec un doux sourire sincère. Elle suivit le regard de Kashina et constata que Benero arrivait avec le Paladin, elle jeta un regard au Kelio et se leva pour saluer les deux hommes en silence.

MAIS PAR LES SEPT… oh pardon. R’hllor, Maître de la lumière… guide moi… Le nouveau venu, qu’elle avait entendu, mais pas vu, était tout à fait charmant, bien plus qu’elle ne l’aurait pensé en l’écoutant douter d’Aemon. Il avait la carrure d’un Roi… non ? Son Roi. Rêveries idiotes de pucelle qu’elle n’était plus ! Elle se mettrait des claques plus tard. Malgré le ridicule de des pensées qui encombraient son esprit, elle ne put s’empêcher de le fixer, longuement, et, bien qu’elle fasse tout pour se contrôler, elle sentait son visage s’empourprer. Une attirance physico-chimique la brûlait de l’intérieur et son souffle se faisait plus rapide, soulevant sa poitrine à un rythme soutenu. (2) Un homme, une femme, un millier de combinaisons possibles, un million de pensées indécentes à côté d’un tout petit bébé. Ivresse du désir. Le monde s’effaçait autour de lui. Etait-elle donc désespéré à ce point ?

Lynce se sentit soudain brûlante, comme si elle faisait l’amour dans les flammes, comme si elle venait de s’embraser de l’intérieur, comme le soir où Aemon avait été conçu, dans l’eau fumante du Bain avec Kashina et Baeron découvrant l’art des deux jeunes femmes. Cela partait de son bas ventre et se diffusait dans sa poitrine, ses cuisses, puis tout son corps se mit à s’enflammer, à tel point qu’elle dût prendre une grande inspiration pour ne pas tressaillir. Pourtant, la sensation n’était pas désagréable, au contraire, une fois passée la surprise, elle se laissa envahir par cette douce et chaude caresse qui la maintenait dans un état d’excitation extrême. Ainsi stimulée, souriant sereinement à l’exhalation de ses sens jusque dans les tréfonds de son corps, incitant la moindre de ses cellules à embrasser cette puissance et à ne faire qu’un avec la provocation luxurieuse qui coulait en elle comme un Dieu du sexe se serait coulé en elle. Elle ferma les yeux et une fois de plus, respira profondément.

La blonde ne prit pas conscience de ce qu’elle venait de faire, c’était venu comme ça, avec cette sensation d’embrasement, dirigé dans son désir ardent vers l’envoyé d’Asshaï, mais pas orientable, quand bien même l’aurait-elle fait de manière consciente. Elle ne remarqua pas que Gerion la regardait d’un nouvel œil. Bien trop occupée à dévisager l’inconnu, voir à le déshabiller du regard, elle ne fit pas tout de suite le lien entre son nom de famille et Westeros, même si son esprit, inconsciemment, enregistra l’information. Elle s’inclina légèrement avec un sourire lorsque Kashina la présenta et n’ajouta rien, ni Hightower, ni Feunoyr.

Sentant un moment de flottement, elle jeta un œil vers Benero qui lui-même semblait regarder Kashina, elle se retourna alors vers sa belle. Aemon tétait, il devait finir son repas. De plus, il n’était pas une bête de foire, il était un bébé, et l’envoyé de R’hllor. Elle fronça les sourcils et posa un regard sévère sur le paladin. Le désir ne l’empêchait pas de vouloir protéger cet enfant. Elle allait parler, une main s’apprêtant à retenir Kashina de se lever et de faire le moindre geste, mais celle-ci fit ce que n’importe quelle mère aurait fait, s’occuper de sa progéniture en premier. Elryk pouvait bien être envoyé par R’hllor lui-même, ce qu’il était peut-être au demeurant, il n’avait rien à exiger du bambin et de sa mère. Lynce, qui avait tourné la tête vers la jeune femme contempla Kashina pendant qu’elle contemplait son enfant et sourit avant d’être tirée de sa rêverie par les mots de la prostituée sacrée. Reposant son regard sur Elryk, et dit, d’une voix posée et grave en s’approchant de lui à pas mesurés, lents, félins :

__ Il est sceptique. » Elle se mit à tourner autour de lui, posant le bout de ses doigts sur le cuir noir, puis la soie.

Cela, elle l’avait bien entendu en écoutant aux portes, il ne voulait pas croire, simplement croire, il voulait être sûr. Le doute, elle connaissait, elle le ressentait depuis bien longtemps déjà, elle savait ce qu’il engendrait, un besoin d’assurance, un besoin de preuve, chercher la foi dans n’importe quoi, une prophétie, un coup de vent sur les flammes. Ne s’était-elle pas brûler les yeux à force de les fixer sans rien y voir, ou en y voyant parfois des choses, des choses qui s’avéraient n’être que ce qu’elle voulait voir ? Elle était bien placée pour savoir ce qu’il voulait car, au fond, elle voulait la même chose, depuis toujours, peut-être même l‘attendait-elle encore, mais par concernant Aemon, concernant son destin…

__ Il attend un signe. »

Elle passa derrière lui, laissant son regard voyager sur le corps de l’inconnu habillé, exactement comme s’il ne l’était pas, comme si elle voyait à travers l’étoffe et même à travers sa peau, comme si elle voyait son cœur, son âme. Elle respirait lentement, profondément emplissant ses poumons de tout l’air qu’ils pouvaient contenir avant d’expirer au rythme posé de ses pas. Elle aurait pu se dire les mêmes choses, elle se les était dites un millier de fois, et pourtant elle continuait à se poser ces mêmes questions encore et toujours, sans obtenir la moindre réponse, ou si peu, si ténues. Mais pas au sujet d’Aemon, parce que le concernant, elle avait toutes les preuves qui lui étaient nécessaires.

__ R’hllor doit lui montrer la voie. » Elle huma son odeur, approchant même son visage de son cou pour mieux le sentir alors qu’elle passait désormais sur son côté droit. Elle termina son tour et se remit face à lui. « R’hllor doit ? » Elle sourit et s’approcha encore de lui, glissant son visage vers son oreille.

__ R’hllor ne vous doit rien, vous lui devez tout. Vous lui devez votre cœur, votre corps, votre âme, votre foi. Vous devez croire sans qu’il lui soit besoin de vous envoyer un signe à vous seul. » Elle recula légèrement et sourit, reprenant sur un ton plein d'une compassion sincère. « Le Maître de la lumière a déjà envoyé les signes pour nous guider tous. Il serait bien arrogant de vouloir qu’il vous éclaire la voie à voie seul alors qu’il éclaire la voie de tous grâce à la comète rouge. »

Elle lui prit les mains et, plongea son regard dans celui du prêtre.

__ Peut-être vous demandez vous pourquoi vous n’avez rien vu dans les flammes à son sujet. Peut-être que vous devriez plutôt vous demander pourquoi R’hllor ne vous a rien montré. Peut-être est-ce là l’occasion qu’il vous donne de prouver la force et la pureté de votre foi. »

Et il en était de même pour elle, désormais décidée à se laisser porter par la foi, tout comme Kashina ne doutait jamais, mais à sa manière.

__ Peut-être qu’il attend d’être certain que vous soyez digne d’être celui qui protégera l’enfant et sa mère, qui l’accompagnera sur le chemin de la guerre contre la nuit, sombre et pleine de terreurs. Car même les dragons ont besoin de temps pour grandir. »

Elle prit l'étranger par la main elle le conduisit juste devant la mère d’Azor Ahai et s’agenouilla devant elle, l'invitant, d’un sourire plein de douceur et de conviction, à faire de même.

__ Mais si vous savez regarder avec la conscience de R’hllor, alors vous verrez, si vous savez toucher avec l’amour de R’hllor, alors, vous sentirez. »

Elle posa une main sur la cuisse de Kashina et mit celle d’Elryk sur le corps de l’enfant avant de poser la sienne tendrement sur sa tête et ferma les yeux en inspirant profondément.

__ Le feu salvateur brûle déjà en lui. » Souffla-t-elle avant de murmurer une prière « Ô maitre de la lumière, guide-nous vers le plaisir de ton amour, emplis nos cœurs de feu et protège nous du mal et de la peine. R'hllor, tu es le feu dans nos cœurs, l'ardeur dans nos reins et même quand les ombres m’assaillent, je ferme les yeux et je vois ton chemin de lumière. Sois remercié, ô Seigneur de la Lumière, d’avoir jette ton œil ardent sur nous et de nous avoir gardé saufs et chauds, Sois remercié d’avoir donné la vie au fils du dragon alors que l’hiver menace à nouveau le monde. Sois remercié pour ce cadeau et tous ceux que tu nous fais, le soleil du jour et les étoiles de la nuit. Car la nuit est sombre et pleine de terreurs. »

Benerro

Benerro

Lorsque Lynce eut terminé sa prière, elle avait toujours les yeux fermés, aussi ne vit-elle pas le ciel s’assombrir pour laisser apparaître les milliers d’étoiles scintillantes qui constellaient la nuit noir de milles yeux au lieu d’un, de mille feux lointains, de mille témoignages du regard de R’hllor. Elle n’entendit que le silence, les cœurs qui s’étaient arrêtés comme un seul, elle sentit qu’il se passait bel et bien quelque chose. Elle ouvrit les yeux, les leva, et vit. La lune qui éclairait cette soirée de sa lumière argenté avait disparue. Elle n’arrivait pas à y croire. R’hllor avait envoyé un signe. Elle l’avait désiré, ardemment, elle l’avait appelé de ses vœux, elle l’avait voulu de tout son corps sans vraiment y croire. Elle s’en était remise à la foi, pour la première fois de sa vie, elle s’en était remise à la foi pure, sans demander de preuve, sans rien demander d’autre, pas même de pouvoir, et cela avait fonctionné. Il lui avait envoyé un signe, le Maître de la Lumière lui avait répondu. Une larme coula sur sa joue blanche, puis deux, puis cent.

__ Merci. » Susurra-t-elle.

Elle remarqua alors que les hommes de la Main Ardente s’étaient agenouillés. Elle ne remarqua pas le regard que lui lança, triomphant, Elryk. Il avait disparu au moment où R’hllor lui était apparu dans toute sa splendeur, dans toute sa puissance. Peut-être que ce signe s’adressait à lui et non à elle, peu importait, et grand bien lui fasse si tel était le cas, en attendant, s’étaient ses paroles, sa danse, sa foi qui l’avait déclenché, de cela, elle était persuadée.

Lynce sursauta et sortit de sa torpeur en entendant Benero rappeler les templiers à l’ordre en entendant le chevalier, désormais convaincu, demander si la mère et l’enfant étaient en sécurité. Esquissant un sourire entre satisfaction et plénitude, elle se releva et fit face à l’imposant paladin, un élément venait de lui sauter aux yeux, maintenant qu’elle avait l’esprit clair. Qu’est qu’un chevalier de Westeros, des terres de l’orage faisait ici. Était-ce bien vrai qu’il était l’envoyé d’Asshaï ? Quelles preuves avaient ont de cela ? Maintenant, c’est elle qui venait de perdre la foi, pas en R’hllor, simplement en cet homme qui prétendait venir de l’est alors qu’il venait de l’ouest. Ouest où Robert Baratheon. Gerion avait raison de se méfier, raison de soulever ce point. Mais elle ne se souvenait que trop bien du regard de Davos quand il avait posé les yeux sur l’enfant, Elryk ne semblait pas lui vouloir du mal, mais désormais, ils ne pouvaient plus prendre de risque. Peut-être était-il simplement meilleur menteur que l’ancien capitaine de la Compagnie dorée.

Il venait de Westeros, un endroit où la foi de R’hllor était plus que rare mais où Feunoyr et Targaryen représentaient une menace. Rien ne garantissait que le Roi ou quelqu’un d’autre de mal intentionné n’ai eu vent de la naissance de l’héritier du Dragon Noir et ne soit venu pour étouffer tout projet de reconquête dans l’œuf. Benero avait dû vérifier son identité, mais comment être sûr, avait-il touché son cœur ? Elle posa un regard interrogateur et inquiet à la fois sur le premier servant, elle avait invité Elryk à s’approcher si près de l’enfant qu’il ne lui faudrait qu’un geste. Elle s’en voudrait tellement. Pas seulement parce qu’il était l’élu, mais peut-être avant tout parce qu’il était l’enfant de Kashina. Elle avait déjà amené Davos à l'enfant en toute innocence, heureusement que Benero avait vu clair dans son jeu !

Elle remarqua alors la petite main si adorable sortir des langes pour attraper l’énorme doigt du chevalier. Une lumière fauve commença à apparaître alors que la lune réapparaissait, aussi rousse qu’un renard. Une nouvelle fois, la tristesse l’envahissait car jamais elle ne serait mère et elle espérait trouver un sens à sa vie pour oublier qu’elle ne pouvait pas la donner.

__ Messer Staedmon. Un homme a eut de mauvaise intentions envers l'enfant. Il est mort. Mais j'aimerais savoir, à qui appartient le cœur dans lequel est fichée votre noire dague ? »

Lynce trouva la réponse du paladin tout à fait à son gout, elle eut un léger sourire. Quelques mots ne suffiraient pas à faire disparaitre toute méfiance, mais elle remarqua la façon dont il s’était relevé, son regard sur l’enfant, son attitude et ses mots montraient qu’il était à présent convaincu de l’importance d’Aemon. C’était bien le principale, car si cet homme-là voulait du mal à quelqu’un il y aurait fort à parier que ce quelqu’un ne ferait pas long feu, ce qui, dans la situation actuelle pouvait être à double tranchant. Dangereux s’il était contre eux, utile s’il était avec eux. Et donc, il était avec eux, avec Aemon, avec Kashina et avec ceux qui l’accompagnaient. La blonde était bien consciente d’être le cadet des soucis d’Elryk, mais elle n’était pas le cadet des soucis de Kashina et elle aimait le petit comme s’il était son propre fils. C’était bien ainsi, la danseuse sacrée avait porté l’enfant du Dragon, et elle, elle qui n’avait pu porter cet enfant et qui avait choisi la lysienne pour le faire, elle qui avait permis sa la naissance de l’homme qui sauverait le monde, elle lui montrerait ce que sa douce et tendre génitrice ne pourrait lui enseigner. Tel était son rôle.
Tel était son rôle ?
Interrogeant la lune rouge et le ciel, elle sut que c’était là ce que prévoyait R’hllor, mais ne put s’empêcher de se demander comment être Reine dans ses conditions. Cependant, grâce au signe incroyable que le dieu des flammes lui avait donné, elle avait retrouvé une certaine confiance en lui, et en elle par la même occasion, car ainsi il avait enfin décidé de lui parler. Aussi, elle se disait que quand le moment viendrait, elle saurait comment marier le destin qui lui avait été prédit à celui qui se profilait devant elle et cette si étrange famille.

__ Mon prisonnier ? » Lynce sourit avec un air coquin. « Ne me donnez pas des idées que vous pourriez regretter. » Elle prit la main du paladin et ajouta : « Si vous aimez Aemon autant que nous l’aimons tous ici, ce qui, je crois, est désormais le cas puisque vous avez eu le signe que vous vouliez, comme nous tous, vous êtes plus utile en liberté et armé que dans une cellule. Ce n’est pas à moi de prendre la décision d’une éventuelle incarcération, je ne suis qu’une acolyte. Mais je pense que le Premier Servant ne me contredira pas, le petit et sa mère ont besoin de la meilleure protection possible et vous ne serez pas de trop avec le Kelio et les gardes de la Main Ardente. Peut-être vous trouverez vous des points communs avec lui d’ailleurs. »

Elle sourit à Gérion dont il était question et attendit avec intérêt la réponse d’Elryk à la question de Kashina.