Il pleuvait encore, en ce troisième jour. Le premier, elle avait cherché, en vain, le fameux marchand traître. Elle avait néanmoins tenu à ne pas perdre sa journée et s'était achetée quelques vêtements pour montrer à Lenwyr et à Quenten Fléaufort qu'elle n'avait pas perdue son temps à Castral Roc. En partant en disant vouloir faire quelques achats, elle devait s'assurer de ne pas rentrer les mains vides. Le second jour, elle avait enfin localiser le marchand, effectivement très reconnaissable et peu prudent car il portait le très beau pendentif des Martells autours du cou. Elle avait alors simulé son départ de Castral Roc, avant de revenir dans la nuit vêtue différemment, afin qu'on ne la reconnaisse pas. Andar Vaith, homme de confiance qui avait tenu à l'accompagner alors qu'elle ne lui avait absolument rien révélé quant à la teneur de cette mission, avait fait de même. Ils dormirent dans une auberge et le lendemain, au troisième jour, ils décidèrent de passer à l'action.

Ils attendirent que la soirée ne s'annonce pour que les différents marchands de la grande place commencent à fermer boutique. Le marchand au médaillon avait l'habitude de terminer ses journées dans une taverne du coin et de jeter tous ses sous gagnés pendant la journée dans l'alcool. Les deux dorniens le suivirent donc et s'installèrent au comptoir, en gardant bien sûr un œil sur le marchand.

« - Messieurs, qu'est-ce que je vous sers ? Demanda le tavernier en s'approchant.
- Deux pintes, cracha Andar, comme le malpropre qu'il se devait d'être pour coller à son rôle. »

Le tavernier s'empressa de les servir puis partir vaquer à ses occupations. Une bonne heure passa alors, et le marchand semblait se préparer pour partir. Andar, qui s'occupait de garder un œil dessus, se pencha vers Swan.

« - Il s'en va.
- Quoi ? Fut Swan, surprise. Elle jeta un œil derrière elle et se retourna. C'est pas bon, il ne fait pas encore assez noir dehors.
- On fait quoi ?
- Provoque une bagarre. »

Après un moment d'hésitation, Andar soupira et profita qu'un grand gaillard marchait devant lui pour le faire chuter en tendant sa jambe. L'homme, déjà bien imbibé d'alcool, se releva avec la ferme intention de le faire payer au dornien, qui commença à s'esquiver vers la porte d'entrée. Les premiers coups furent donnés, et Swan profita de la confusion pour s'approcher discrètement du marchand, qui ne pouvait pas sortir vu que la bagarre avait lieu à l'entrée.

Malheureusement le plan ne se déroula pas comme l'avait prévu la dornienne ; alors qu'elle s'était approchée du marchand, des soldats entrèrent dans la taverne et mirent fin à cette stupide bagarre en l'espace d'une minute. Andar jeté dehors, il fuit très vite imité par Swan car les soldats ne la laissèrent pas rester dans cet endroit et la sortir de la violemment, l'insultant de prostituée. Elle passa sur l'affront néanmoins, trop concentrée sur sa tâche. D'ailleurs, où était passé le marchand ? « Aaah... », râla Andar alors que ses doigts allèrent frôler son nez cassé. Le pauvre était bien amoché.

Il ne restait plus grand chose à faire pour sauver le coup. Réajustant le chapeau sensé cacher sa longue chevelure, Swan alla se protéger de la pluie sur le pas d'une porte en attendant que d'autres gens présents dans la taverne ne s'en aillent. Peut-être sauraient-ils la renseigner. Après quelques minutes, deux hommes sortirent en titubant, et la dornienne se dirigea vers eux. « Hum, excusez-moi. Messieurs ! », hésita-t-elle, peu à l'aise dans son rôle de mercenaire.

« - Eh ! Le minot..., cracha l'un des hommes. Ils étaient visiblement assez saouls pour ne pas se rappeler d'elle et de la façon dont elle s'était fait jeter. Qu'est-ce que tu veux ?
- Des renseignements, souffla Swan en sortant un dragon d'or de sa bourse.
- Ah... ouais. S'tu veux. T'veux quoi ? Demanda l'ivrogne péniblement. »

Le marchand étant un habitué de cet endroit, ils purent assez la renseigner pour qu'elle sache la direction à prendre. D'après ces hommes, le marchand n'habitait pas très loin du port de Castral Roc. Andar ne pouvait cependant pas l'accompagner à cause des blessures dû à la bagarre et lui confia un poignard, histoire d'avoir de quoi se protéger. Elle le dissimula et partit seule, sous le ciel ombragé de cette pluvieuse nuit.

Arrivée au port, elle ne voyait pas le marchand qu'elle recherchait. A dire vrai, il n'y avait qu'un seul homme, gros et affublé d'une longue barbe noire. Peut-être avait-il vu son homme ? Elle s'approcha prudemment et engagea la discussion. Elle décrivit l'aspect du marchand et demanda s'il l'avait vu passer par ici.

« - Et, si vous connaissez son nom, cela m'aiderait, ajouta-t-elle, un peu désespérée et en quête de bonnes nouvelles. »