298, treizième lune, semaine 4, jour 3

On avait convoqué Edmund Gargalen. A peine était-il entré dans cette salle du palais qu’on lui indiqua la table avant de le laisser. On y avait placé deux couverts. On y avait déjà disposé de la nourriture. Le seul serviteur présent dans la pièce l’invita à s’assoir. Les portes s’ouvrirent brusquement. Le prince Oberyn Martell entra dans la salle sur un pas vif, il semblait agité. Le serviteur effrayé se mit presque au garde à vous. Le prince lui fit signe de décamper. Il interpella Gargalen de l’autre bout de la salle :

« Edmund ! Désolé de t’avoir fait venir en urgence ! »

Oberyn prit place en invitant son convive à faire de même et lança aussitôt en s’esclaffant:

« Mange et ne fait pas comme si tu ne pouvais pas lire dans mes pensées, tu es l’un des rares qui est capable de le faire. »

Martell attrapa un plat de crudités.

« J’ai entendu une révélation bien brûlantes comparé à tout ce que j’ai entendu ces derniers temps. »

Oberyn l’agité éperonna un anchois, son couteau glissa, un jet d’huile d’olive atterrit sur ta tunique. Quand il était dans un tel état, c’était toujours à cause d’une femme (ou d’un Lannister).

« Je ne sais pas si tu sais (en tout cas toute la ville semble le savoir), mais Lana la danseuse de la Casbah d’Attilos a refusé mes avances. Stompa, l’un des champions de notre armée, a sauté à pied joint dans la vie de Lana, il la bouscule et la bichonne pour qu’elle lui accorde de longues séances de danse du ventre très privées si tu vois ce que je veux dire. A présent quand on lui parle de moi, Lana minaude : Oberyn comment ? »

Martell s’esclaffa et frappa du plat de la main sur la table. Son verre de vin se renversa, des morceaux de poivrons s’envolèrent, de l’huile d’olive gicla.

« Je ne vais quand même pas laisser Lana se faire farcir par un freluquet somptueusement séduisant ? Cette lascive lancine déjà ma libido. Ne va pas croire que je suis en manque d’amour lubrique, mais cette Lana elle est… »

Un serviteur entra, il apportait une serviette, il tenta de nettoyer les dégâts d’Oberyn sur la table. Celui-ci lui arracha la serviette des mains en lui faisant signe de partir et essuya ses propres dégâts tout seul.

« Je ne supporte pas l’idée qu’elle m’ait éconduit et que Stompa puisse limer Lana. »

Oberyn goba une olive, il attrapa un morceau d’ananas et le projeta en l’air avant de le rattraper avec sa bouche, direct dans le gosier.

« Et Lana lui écrit des lettres d’amour. Sa servante a accepté de me révéler les détails en échange d’un baiser romantique de ma part. Je me suis plié à la corvée mais ça valait le coup. Ecoute un peu Edmund : Lana trempe ses parchemins dans du parfum, puis elle les cachette avec quelque uns de ses cheveux divins. Quelle provocatrice perverse ! Elle sait consumer les hommes ! »

Oberyn se leva en vidant son verre de vin et commença à faire les 100 pas, il semblait enfin s’être apaisé.

« Edmund mon ami, j’ai besoin de quelqu’un pour dérober les lettres de Lana la sulfureuse. Un dur, un félin, un robuste, un beau, un vrai. »

Et Martell pointa du doigt Gargalen avec son sourire malicieux.

« Avec le contenu de ces lettres je saurais comment elle pense et je pourrais la séduire. Aide-moi et tu n’auras pas affaire à un ingrat ! »

C’est avec satisfaction qu’Oberyn écouta son garde. C’est pour ça qu’il s’adressait à lui dans les affaires délicates. Gargalen avait l’imagination qu’il fallait soit pour trouver le bon outil au bon moment, soit pour trouver le stratagème idéal. Les deux propositions d’Edmund étaient séduisantes, mais Oberyn hésitait. Il n’avait pas envie de jouer les cambrioleurs pendant que l’attention de Stompa était détourné, après tout il était un prince de Dorne et n’avait pas à s’abaisser à ça (même si le frisson d’une telle situation l’amusait au plus haut point). Quand à faire irruption avec force en compagnie de soldats pour fouiller sa maison sous une fausse accusation, c’était sans doute le plus efficace, mais au fond indigne d’un prince dans le seul but d’obtenir un avantage pour séduire une femme. N’arrivant pas à se décider entre les deux méthodes proposées par Gargalen, Oberyn lâcha finalement :

« Je me tâte, j’hésite. Allons à sa rencontre, je veux être sûr avant de prendre une décision aussi peu honnête. »


Le strupre-éfiant Stompa, un guerrier populaire à Dorne qui jouait les machos, un bouffon qui aimait trop les femmes. Une sorte de malfrat à la tête de sa meute de molosse qui rossaient ceux qui indisposaient le célèbre guerrier. De même que Lana la danseuse lancinait la libido d’Oberyn, elle baladait par son bout Stompa. Martell avait une certaine estime pour Stompa, non pas en tant qu’homme, car il le méprisait, mais en tant que guerrier. Il l’avait déjà vu jouter dans une arène. En revanche les sbires de Stompa le faisaient rire au plus haut point. Des nervis qui rampaient devant Stompa et lui léchaient les lattes. Des nervis énervés qui brûlaient de bastonner et de rafler les meilleures places lors du prochain combat dans l’arène de Stompa. Affronter Stompa de front, c’était se mettre dans un guêpier. Mais pour une femme, Oberyn l’éternel romantique n’avait pas peur de le défier. Surtout qu’il avait Gargalen avec lui.

Les deux hommes passèrent au ralenti devant la propriété de Stompa à Lancehélion. Oberyn repéra les parages en observant le jardin. Il vit le strupre-éfiant Stompa siroter un verre de vin. Il lézardait au milieu de ses palmiers. Deux de ses cerbères à l’air féroce étaient perchés à côté de lui. Ils se poilaient et avalaient toutes les blagues que Stompa leur balançait. Oberyn afficha un large sourire ironique en apercevant les molosses maladroits qui avait pour seul mission de molester pour leur maître.

« Les voilà ! Ils sont dans le jardin, je suis sûr qu’il n’y a personne dans la propriété à part 1 ou 2 domestiques, peu être une occasion pour fouiller ? »

Ils entendirent des rires. Les balèzes se bidonnaient aux blagues de leur chef. Stompa leur servit du ranci : l’histoire de Fouzy-dans-le-baba, le giton d’Essos. Oberyn s’accroupit sur le muret entourant le jardin afin qu’ils ne le voient pas.

« L’un des plus forts guerriers de Dorne et ses sbires qui ne sont pas en restes. Stompa me haït, il sait que je veux Lana aussi. Il rêve de m’affronter en duel. Il se fiche que je sois le frère du seigneur de la contrée. C’est parce qu’il n’a jamais eut peur de rien qu’il est devenu ce qu’il est. Qu’est-ce qu’on fait ? »

Tempête sous un crâne. Le sens exalté du style d’Oberyn finit par reprendre le dessus.

« Par toutes les femmes des harems d’Essos ! Qu’importe ! Je prends le risque ! Je vais le provoquer d’homme à homme. Reste dissimulé dans le jardin Edmund, surgit quand je te fais signe. »

Et Oberyn Martell rappliqua en se pointant promptement comme lui seul savait le faire. Il se pavana comme un paon au milieu du jardin. Stompa l’aperçut. Ses deux mastards se massèrent les métacarpes. Stompa avait enfilé ses avants-bars d’armures. Des pièces d’acier méchamment pointu idéales pour parer les coups ou en donner ! Les molosses montrèrent leurs molaires. Un serviteur qui était sortie par une des issue de la maison, portait sur un plateau d’argent un nouveau verre de cristal contenant un vin fin pour le maître des lieux. Oberyn continua d’avancer fièrement sous le regard étonné et hostile de Stompa pendant que les molosses se moquaient de lui. Le serviteur se magna vers son maitre avec son plateau d’argent. Stompa fit claquer ses doigts. Le serviteur nasilla des sons serviles et s’affaissa, soumis. Stompa s’empara du nouveau verre et posa celui qui était vide sur le plateau.

« Oberyn Martell en personne, que me vaut le déplaisir ? »

Les chiens de garde semblaient prêts à bondir sur Oberyn. Celui-ci glissa un œil vers le jardin pour s’assurer que Gargalen était en place. Puis il se propulsa avec son agilité et sa grâce habituelle vers le guerrier.

« Quoi de neuf Stompa ? Lana te fait toujours son numéro de danse du ventre ? Elle en a pas assez de ton impuissance ? »

Stompa s’échauffa et surchauffa. Il serra son gros poing. Son verre céda, il explosa en shrapnel de tessons. Les molosses morflèrent, le serviteur aussi, il décampa en catimini. Tout le monde secoua sa tunique lardé d’éclats de verre. Les sbires fixèrent leur chef d’un regard effaré. Oberyn attaqua :

« Stompa, j’ai profité des charmes d’Ava, elle m’a dit que ta virilité était insignifiante. Elle m’a dit qu’elle te croyait torride en te rencontrant, elle a constaté que tu étais monté comme un têtard. L’affriolante l’a avouée aussi à toutes ses amies. Le bruit court partout en ville. »

Stompa fulmina et se mit dans une fureur folle. Il bredouilla, il bafouilla, il bavocha, il crachouilla et conclut carrément catatonique :

« Tu crois que tu es à l’abri parce que tu es un prince ? Tu crois que j’ai peur de t’affronter en duel ? Il n’y a aucun témoin ici, qu’est-ce qui m’empêche de te tuer et de faire enterrer ton corps dans un endroit secret ? »

Les féroces étaient prêt à foncer sur lui. Ils dégainèrent leurs épées. Stompa fit un grand sourire :

« Tu va faire quoi ? »

« Tu as vraiment besoin de 2 hommes pour te protéger ? Moi il m’en faut un seul, et pas n’importe lequel. »

Oberyn lança son signe de la main à Edmund pour qu’il intervienne. Les cerbères défaillirent en apercevant les deux épées de Dorne, ils se replièrent et se réfugièrent presque dans le giron de leur maître à la seul vue d’Edmund. Oberyn afficha son petit sourire satirique. Stompa nullement apeuré par la nouvelle apparition, avait le regard brillant et brutalement belliqueux.

« Tu crois que j’ai peur de lui ? J’en ai défié et vaincu beaucoup trop pour me laisser impressionner, même par lui ! Vous deux ! Tuez-moi ces soi-disant deux épées de Dorne. »

Il se retourna, mais ces deux sbires n’étaient plus là, ils avaient décampés en courant plutôt que d’affronter Edmund. Même Oberyn n’avait pas eut le temps de les voir partir. Stompa s’agita et fulmina :

« Bandes de lâches ! »

Il dégaina son arme et fonça vers Gargalen avec la furieuse envie de le trucider. Oberyn lança aussitôt :

« Non ne fais pas ça tu va… »

«…te faire avoir. » Aurait-il voulut finir, mais il n’en eut pas le temps, Stompa était déjà sur Edmund.