Ashara portait une robe de brocard bleu et blanc avec des perles à la ceinture et sa tête ornée d’un chignon était ceinte d'une chaîne en or blanc avec des perles tout comme son cou et ses oreilles. Sur ses épaules, une cape en fourrure de lynx de fumée fut retirée de ses épaules par une servante lorsqu'elle entra dans le grand septuaire. Pas celui qu’elle avait rencontrée lors de son pèlerinage dans la montagne, non, celui-là était toujours sauvage et libre, et vivant, elle n’avait eut le cœur ni à le capturer, ni à le tuer. Elle s’était vue dans ses yeux et avait préféré le laisser vivre sa vie dans les montagnes tandis qu’elle vivait une autre vie de devoir et de pouvoir. Mais il hantait toujours ses rêves, comme le songe d’une liberté à laquelle elle ne pouvait prétendre et qu’elle vivait à travers lui.

Nous y voilà… Où est donc la Reine ? Se demanda-t-elle avait de voir approcher le future Roi en personne.

__ Votre Altesse, je suis honorée d’assister à votre couronnement et à la fois infiniment triste que Lord Raymar Templeton n’ait pas pu être présent. Je sais combien il aurait été heureux de voir sa mission ainsi couronnée de succès avec votre avènement. Il sera bientôt de retour dans le Val pour prendre ses titres et fonctions de Lord Commandant des Armées de la Montagne et du Val et de Maréchal des montagnes de la lune. Mais avant tout, je lui ai donné pour mission de rester auprès de son épouse sur le point d’accoucher.

Suite à cette entrevue tout sauf discrète malgré ces révélations anti-diplomatiques, la brune aux yeux azur discuta de-ci de-là avec les invités sous la protection de ses chevaliers et de sa dague dissimulée. Lorsque les portes de la grande salle furent ouvertes, elle avança jusqu’au devant de la scène à la place d’honneur qui lui avait été attribuée. Elle posa un regard sévère sur la Main du Roi et se retint de grogner trop bruyamment. Ces hommes ne pouvaient pas entrer dans la grande salle avec leurs armes, néanmoins, si les autres Chevaliers étaient restés dehors, l’un d’entre eux l’accompagnait pour sa protection, il n’avait point d’épée, mais sa présence lui semblait indispensable. Il se mit sur le côté, discret mais à l'affût du moindre danger. Il y avait des manteaux d’or partout, la sécurité était à son maximum, mais la veuve n’avait confiance en personne à part en ses hommes. Elle avait chargés ceux, armés, à l'extérieur, de l’avertir de tout danger et de venir s'exfiltrer en priorité, si possible en protégeant aussi Durran. L’un d’eux avait à sa ceinture l’épée de sa Suzeraine et son arc. Ashara avait toujours été bonne archère, mais elle s’était entraînée à l’épée depuis la mort de Robert. Avec tous les dangers qui pesaient sur elle et sur les siens, elle estimait que, malgré ce que certains pourraient en dire, il en était de son devoir, de la survie de la Maison Arryn et de son peuple de se former au maniement des armes. Évidemment, en deux lunes dont une passée sur son navire, elle n’avait eut le temps d'acquérir beaucoup de technique, mais elle pouvait se défendre seule contre des bandits mal armés.

__ Lord Tyrion, je suis ravie de vous revoir en si bonne compagnie. Dame Silithia, bienvenue au premier rang.

Les deux Lannister étaient ses voisins et elle leur adressa ces mots et un signe de tête juste avant la cérémonie tout en repensant que sa tante Ysilla aurait pu se trouver à la place de la Farman sans son caprice. Qu’importe, elle avait perdu l’Ouest, mais elle allait gagner le Nord et Nyella se chargeait du Conflans. La Dame du Roc aurait, elle aussi, fort à faire après l’attaque des Fer-Nés, la mort de Tywin et le Duel judiciaire innocentant la Reine et son frère pour se construire une légitimité et une puissance. Peut-être qu’un projet commun était envisageable malgré l’absence d’alliance matrimoniale se dit elle avec un sourire en coin, reportant son regard sur le futur Roi tout de noir et d’or vêtu.

Comme à son habitude, la plus belle rose du bief était vêtue selon les codes de la mode du Bief à savoir bien trop légèrement pour une noble jouvencelle bientôt Reine qui plus est, selon Ashara. Cependant, la Dame des Eyrié était consciente des différences culturelles entre le sud et le nord, aussi, même si pour elle une telle robe était du plus mauvais goût, elle ne fit aucune remarque désobligeante.

__ Dame Margery, ou devrais-je dire votre altesse…

Ashara sourit, un peu espiègle.

__ C’est un plaisir pour moi aussi, sachez que je suis ravie que les engagements entre la Maison Tyrell, la Maison Baratheon et la Maison Arryn ait finalement été respectés. Je n’ai rien contre la Maison Martell, mais j’aime lorsque les promesses sont tenues. Or, feu Lord Jon Arryn, mon grand oncle, avait juré que vous deviendrez Reine si Hautjardin offrait protection et éducation au Prince Durran. Vous avez rempli votre part de cette promesse, c’était donc à nous de remplir la nôtre.  

Pour une fois Eddard n’avait pas complètement été à côté de la plaque et Durran lui même semblait plutôt heureux de ce mariage et prêt à honorer cette alliance avec toute la noblesse qui le caractérisait. Cependant, Dorne ne manquerait pas de ronger son frein après que les fiançailles imposées par Lancehélion au futur Roi aient été annulées. Il faudrait tâcher de les ramener dans le giron de la couronne d’une manière ou d’une autre… Et si c’était ça la clé de son plan ? Ramener un Martell à Port Real afin de prendre le poste de Maître des chuchoteurs sous l’égide du secret du Faucon. C’était une idée à creuser, la question étant qui, car d’après ce qu’elle avait entendu, Oberyn n’était pas le bienvenue et effectivement, il semblait par trop impulsif pour tenir le rôle sans exposer les Faucons.

__ J’ai appris le retour de Dame Olenna à Hautjardin de sa main, mais j’avais espéré la voir ici pour le couronnement, à moins qu’elle ne réserve sa venue pour votre royale union ?

La brune n’avait pas eut le temps de répondre à la Reine des Épines, mais il faudrait qu’elle s’y attèle bientôt. Cette dernière l’avait invité à Hautjardin, mais elle ne pouvait hélas pas se déplacer aussi loin. Aussi avait-elle espérer pouvoir la rencontrer ici même à Port-Real à l’occasion du couronnement. Si elle parvenait à rester à la capitale, et à y survivre, elle aurait certainement l’occasion d’avoir cette fameuse conversation que la Reine des Épines souhaitait avoir de vive voix sans lui en avoir dit d’avantage. Quoi qu’il en soit, avec tout cela, elles n’avaient pas eut l’occasion de conclure le partenariat prévu pour la reconstruction de la flotte du Bief, mais si celle du val était déjà en cours, peut-être que les Tyrell n’étaient pas aussi pressés, d’autant plus qu’ils étaient nettement plus exposés à une destruction préventive par les Fer-Nés. Tout comme la flotte du Nord et du Conflans construite à Salvemer qui avait été incendiée lors de l'attaque de la ville par les Fer-Nés avec les réserves de bois. A la pensée de ce bien mauvais choix de la part de Lord Eddard et Lord Edmure, elle eut un petit rictus amusés. Cependant, consciente que si les Fer-Nés détruisaient une fois de plus une flotte du Royaume, ils mettraient aussi en péril leur partenariat commercial avec l’Ouest et le projet de canal et la coalition de l’Aube et du Crépuscule ce qui serait très dommage pour eux et pour les trois autres régions impliquées. Pourtant, le simple fait d'imaginer cette flotte brûler dans le port de Salvemer avant que les Fer-Nés débarquent lui mettait le sourire au lèvres à chaque fois. Le vengeance ne faisait pas toujours bon ménage avec la politique et le commerce, ni probablement avec la paix. J’aviserais.

__ Votre majesté.

Ashara fit une révérence. Normalement, ayant peu de personnes au dessus de son rang, elle se contentait d’un signe de tête au mieux, mais il s’agissait là de la Reine, aussi, cette révérence était justifiée. Pour autant, la fière Arryn aurait pu s’en passer, mais voilà, cette Reine était la seule à avoir reconnu, et à reconnaître une fois de plus, ce que la Couronne lui devait, à elle, au Val à la Maison Arryn. Cette Reine aurait pu la haïr et la faire assassiner pour ce qu’elle avait fait contre la Maison Lannister, contre Jaime, contre Tywin, contre Cersei elle même, révélant au Roi ce que Ser Raymar lui avait dit des secrets de feu la Main du Roi Lord Jon. Mais cette Reine lui avait écrit, pis, elle l’avait remerciée, mieux, elle lui avait envoyé une partie de la flotte de Dorne pour remplacer la sienne, sacrifiée pour sauver le Conflans des Fer-Nés. Tandis que le gros Robert se réjouissait de sa sale victoire contre le Lion d’Or et que Ned demandait de l’aide contre les Marcheurs Blancs à la guilde des alchimistes, avec le tacte qui le caractérisait. Le Faucon Blanc brûlait trois quart de la flotte Fer-Née faisant voile vers le trident devant Goëville et envoyait une partie de son ban tout juste revenu de l’Ouest avec son époux et Seigneur mort des suites de sa blessure contre le régicide pour aider les Riverains et des volontaires au Mur pour grossir les rangs des Faucons du Nord.

__ Je suis heureuse d’avoir l’occasion de vous dire de vive voix combien votre sollicitude me touche. Vous êtes toute excusée, je suis votre obligée.

La Suzeraine du Val hocha la tête en souriant à son regard appuyé. Malgré ce qu’elle venait de lâcher comme bombe au futur roi sur le retour de Raymar et Ayiana, Cersei n’en avait pas profité pour l’attaquer. Malgré tout ce qu’elle aurait pu lui reprocher et toute la haine qu’elle aurait pu ressentir, Ashara était toujours en vie et recevait les remerciements de la Lionne couronnée. Alors oui, elle la rencontrerai avec plaisir, en espérant survivre à cette entrevue, mais qu’elle ne pouvait de toute façon pas éviter, et que d’ailleurs, elle ne voulait pas repousser. Elle ne pouvait se passer de cet appui, d’ailleurs, elle le désirait, depuis qu’elle avait reçu cette missive qui l’avait tout à la fois, touchée au cœur, surprise et effrayée, elle voulait en savoir plus. Savoir si tout cela n’était que façade afin de mieux l’atteindre et de l'éliminer. Savoir de quel bois se chauffait cette femme qu’elle connaissait finalement bien peu, sauf à travers le regard des hommes, celui de Jon Arryn, celui de Robert ou d’Eddard. Comprendre pourquoi elle avait trompé son Roi époux.

Sur ce point, avec les nouvelles reçues de Pentos, elle commençait à entrevoir quel homme était Robert, ou plutôt quel Roi il n’était pas. Avec ce qu’elle avait vécu avec Lyonel, le bon comme le moins bon, ce qu’elle estimait être une trahison de la part du Stark ainsi que d’Ades Overton et l’absence de retour de la part d’Edmure Tully sur ses demandes de Bois, ce dernier préférant fournir une flotte au Stark, la Main du Roi qui ne leur avait envoyé aucune troupe pour les défendre contre les Iliens... Elle commençait à entrevoir les choses autrement. On lui avait enseigné à être loyale et fidèle, à servir les hommes et leurs intérêts. Mais elle n’avait jusqu’ici jamais imaginé à quel point ce travail était vain et dénué de toute reconnaissance de leur part, à quel point vous finissiez vide, de respect d’affection parfois et du moindre merci. Et au moindre faux pas, ils étaient sans pitié ? Une vie de service pour être finalement condamné aux Sept enfers à la moindre erreur alors qu’ils commettaient bavure sur bavure, ne respectaient pas l’œuvre des autres, n’écoutait que leur orgueil démesuré et jouait à qui avait la plus grosse comme des enfants. Ce roi avait intérêt à avoir plus de jugeote !

La brune aux yeux céruléens voyait les choses autrement depuis qu’elle avait condamné Cersei à mourir, tout du moins dans son esprit, pour adultère et inceste et, si cela n’avait pas été aussi dangereux pour elle, elle aurait été ravie du pied de nez que les Sept avaient réservé à Eddard, Ades et Oberyn. Ce duel judiciaire était à marquer d’une pierre blanche, une femme sauvait une femme contre l’honneur bafoué d’un porc défendu par un brave imbécile. Il n’y avait plus qu’à prier les Sept pour que tout cela ne soit pas une mascarade afin de la faire disparaître, mais elle devait prendre ce risque, pour le Val, pour la Couronne, pour Durran, pour ce que la Lionne et le faucon représentaient toutes deux de la grandeur des femmes de Westeros et de leur noblesse. Elle jeta un coup d’œil à Silithia avant d’entrer dans le Septuaire, espérant que ces deux là pourraient s’entendre pour avancer ensemble, mais hélas rien n’était moins sûr.

Ah les symboles. Ashara eut un petit sourire en voyant la couronne apparaître sur son coussin puis être posée sur la tête du tout nouveau Roi. Pour un symbole s'en était un puissant, et avec le discours du Grand Septon et les attributs, Durran marquait le début de son règne avec une belle cérémonie sous le sceau de la paix et de l'union. Un anneau d'or pour les unir tous, les Sept Royaumes de Westeros. Le Nord, le Conflans, les Îles de Fer, le Val, L'Ouest, le Bief et l'Orage. Car du temps de Jaehaerys Ier et Viserys Ier Targaryen, la Principauté de Dorne était encore indépendante. Pourtant faire rentrer les Dorniens dans ce règne avec le Prince Joffrey promis à la Princesse Arianne Martell serait capital. C'était aussi un symbole pour la foi des Sept, mais excluant de fait les autres religions, or le Roi jurait protection pour toutes les croyances, les Anciens Dieux et même le Dieu noyé, puisqu'il faudrait tôt ou tard s'attaquer à ce problème. Cependant, en tant que religion majoritaire et plus encore au grand septuaire de Baelor, ce choix était logique.

__ Longue vie au Roi Durran !

Répondit la Suzeraine du Val, avec un certain enthousiasme, à la bénédiction du Grand Septon. La cérémonie ne s’était pas trop éternisée, c’était une bonne chose, les symboles avaient leur importance, mais ils pouvaient perdre de leur superbe si l’ennui gagnait l’assemblée. Elle resta un moment face aux figures des Sept et pria intérieurement, à la paix et à ce Roi qu’elle pensait sincèrement meilleur que son violeur de père. Puis elle tourna les talons afin de suivre le cortège Royal jusqu’au Donjon Rouge, toujours en bonne position parmis les grands Seigneurs. Arrivée sur le parvis du Grand Septuaire de Baelor, elle rassembla ses hommes et gardant deux épées lignes, elle mit le reste des Gardes Ailés à disposition du Roi afin de renforcer la sécurité autour du cortège qui allait traverser la cité. Elle se mit en selle sur honneur, son palefroi blanc dont la crinière est tressée de rubans bleu-ciel et dont la croupe était recouverte d’un caparaçon azur brodé d’une lune d’argent et d’un faucon azur. Avec cette robe, elle était contrainte de monter en amazone et elle détestait ça, mais elle n’avait pas d’autres robes aux couleurs de sa maison assez précieuses pour une telle cérémonie où elle se devait de représenter le Val d’Arryn comme le trésor qu’il était dans son écrin de montagnes blanches.

C’est alors que, perché sur sa monture aux couleurs de sa région, la brune aux yeux céruléens aperçut une chimère venue du fond des âges au milieu de la place noire de monde. Elle n’avait vu son visage qu’un instant, illusion se dit elle en continuant pourtant à le chercher du regard. Il réapparut et son coeur bondit dans sa poitrine. Puis disparut à nouveau au gré des mouvements de la foule. Elle ferma les yeux et les rouvrit. Il était là. Il semblait presque réel, mais bien sûr il ne l’était pas. Artys Arryn lui apparaissait comme un songe de la grandeur de la Montagne et du Val, lui rappelant ses devoirs auprès de son peuple et sa responsabilité au sein des Sept Couronne. Elle fit tourner son cheval pour suivre le Roi dans les rues de Port-Real tout en se demandant ce que cette apparition pouvait bien vouloir dire à ce moment là de son existence, et comme il semblait réel au milieu des autres visages. Elle sourit de cette sensation étrange qui avait parcouru son corps quand elle avait aperçu ce visage vu maintes et maintes fois sur les tapisseries ornant la galerie menant aux Eyrié.