Aryos était assis à une grande une table en bois de chêne sur laquelle se trouvait posée une énorme carte de Westeros. Ce n'était pas une carte ordinaire. A la place des royaumes et seigneuries avait été dessiné, avec beaucoup de soin, la production particulière de chaque recoin du royaume des Sept Couronnes. Poissons, peaux, céréales, minéraux et bétails dansaient sur cette carte pour le regard du marchand. Un royaume qui n'était plus composé de seigneurs mais de richesses naturelles et humaines. Des petites figurines étaient posés sur la carte. Il avait sur Beaumarché, Summerhall, Oldstones et Lancehélion des figurines représentant un marchands. Pas besoin d'être un divin pour savoir que ceci étaient les cibles d'accords commerciaux, des nœuds d'échange central pour assurer l'accès au marché interne de Westeros. Sur les terres des Baelish et de Vieux Havre, on pouvait voir des figurines de navires posées. Port Lannis, Castral Rock et Port royal pour leur part, étaient marqués par un homme encapuchonné, le signe des espions. Devait-on vraiment mentionner que les Tarnos, comme toutes les grandes familles de Braavos, se trouvaient dans une lutte informelle contre les Lannisters ? Une lutte qui ne durerait plus longtemps car comme savaient les banquiers de Braavos, le vieux lion toussait plus de poussière que de l'or, ce qui le rendait particulièrement dangereux.

Plusieurs bougies illuminaient la petite pièce d'une des auberges de Beaumarché. La Lune pleine brillait à travers la fenêtre, une divinité céleste que les prêtres de la Lune devait célébrer en ce moment même à Braavos. Un peu de Heimweh envahit Aryos en voyant la Lune. Décidément, l'odeur nauséabonde des canaux de la cité lui manquait ainsi que l'eau claire et courante qui coulaient des tuyaux en bronze dans les maisons patriciennes. Tout était plus simple à Westeros. Tout plus sauvage aussi. Mais cette sauvagerie cachait un magnifique potentiel commercial qu'il devait réussir à faire exploiter. A quoi bon laisser ce continent en friche ? On pouvait apporter des nouvelles méthodes agricoles, des manufactures et ateliers ainsi qu'une nouvelle conception de commercer. Mais Westeros était un géant lent et paresseux. On ne pouvait pas venir auprès les plus puissants et leur dire : « Bon, finis de rigoler, vous arrêtez vos méthodes archaïques et on va commencer à créer des manufactures, rationaliser l'agriculture, améliorer le rendement du sol et par tous les dieu, commencer à créer un vrai système monétaire. ». Non, il fallait installer par ici et par là des centres de commerce, de production et de savoir. Loin des capitales ou conspiraient les puissants et proche de là ou le commerce avait lieu ainsi qu'en dehors du contrôle des anciennes élites pour construire sur des mois, années et décennies un basculement du pouvoir vers ceux qui avaient le regard tourné vers l'avant.

Aryos écrivait une lettre au bord de la table avec le regard posé sur la carte, plus exactement sur Summerhall. Ce lieu fut jadis la résidence d'été des Targaryen avant qu'un feu brûle le château. Aujourd'hui il était en ruines et à l'abandon complet. Un gâchis de grande ampleur. Les terres de Summerhall étaient situés stratégiquement au pied du passage traversant les montagnes vers le Dorne. Contrôler Summerhall, c'était contrôler la sortie de ce passage stratégique. On pouvait y ériger des auberges et des relais pour chevaux à fin de permettre aux commerçants du Dorne de prendre un repos. Un marché dans ce lieu pourrait capter une partie substantielle des produits venant du Dorne par l'accueil de marchands ou l'envoi de commerçants vers les terres dorniennes. En somme, un fabuleux potentiel économique reposait entre les colonnes solitaires de Summerhall. Les Tarnos allait donc tenter de recevoir le contrôle de cette seigneurie en friche mais ô combien stratégique. Mais ceci supposait de convaincre le seigneur des Stormlands, Renly Baratheon. Accepterait-il l'idée ? Tout dépendait quelle avis il avait sur cette question. Préférait-il l'efficacité et des seigneuries en bonne santé ou maintenir le statut quo ?

La lettre fut enroulée par Aryos pour ensuite être attaché au pied d'un corbeau. L'animal s’élança alors à travers la fenêtre ouverte en direction du Sud.