J’ai gagné ! J’ai gagné ! Aiyana revenue en vie avec Dame Affliction, Littlefinger mort, Ashara Suzeraine du Val et portant l’héritier ou l’héritière. Elle était, tout à la fois, soulagée, heureuse et un brin fière d’elle et de ce qu’elle avait accompli grâce à ces alliés. Après sa conversation avec le Roi, c’était désormais à lui de se débrouiller avec les informations qu’elle lui avait données. Il semblait qu’il était prêt à temporiser, comme elle le lui avait conseillé, en attendant d’être prêt à frapper, fort, vite et sans pitié. De ce côté-là, il restait tout à faire, mais, bien que tant qu’elle restait à Port-Real elle et ces amis étaient en danger, ça n’était, en un sens, plus son problème. Elle s’était débarrassée de son pire ennemi et, gagnée par la joie de porter un enfant de l’homme qu’elle aimait, elle pensait que désormais, seul un avenir radieux s’ouvrait devant eux. Elle déplorait néanmoins que ses entrevues avec Oberyn et Renly n’aient pas données grand-chose et il restait encore Varys, le Maître des Chuchoteurs. Ce dernier avait voulu la doubler, l’accusant d’avoir produit un faux document devant la Main et jetant le discrédit sur ses accusations contre Lady Lysa et Petyr Baelish en disant que le coupable du meurtre de Lord Jon Arryn était Hug du Val, désormais mort et donc incapable de témoigner. Pour sûr, quand Littlefinger tuait quelqu’un, il couvrait ses arrières, et plutôt bien. Un homme dangereux, un homme qui aurait pu lui nuire si elle n’avait pris les devants. Oh Merci Aiyana, merci mille fois, merci pour le Val, pour ma vie et celle de mon enfant, celle de Lyonel et de tous les Valois venus avec moi.

Alors qu’elle marchait d’un pas lent dans les couloirs du Donjon Rouge, perdue dans ses pensées après être allée prier au Septuaire, pour son fils et pour la paix, accompagnée de cinq de ses chevaliers, elle baissa la tête et la secoua sans comprendre. Car Varys, avait certes œuvré contre elle et louvoyé pour se sortir de sa propre trahison en accusant Mestre Mycelle de tous les maux lors de l’arrivée des Valois à Port-Real. Mais il l’avait aussi aidée à se rendre auprès du Roi dans le plus grand des secrets, via les passages dérobés de la Fortresse des Targaryen. Il aurait alors pu la tuer sans que personne ne puisse jamais retrouver sa dépouille, il aurait pu la trahir, mais il n’en avait rien fait, il l’avait conduite jusqu’à Robert et elle regrettait encore d’avoir été obligée de confirmer son nom au Souverain quand ce dernier lui avait demandé comment elle était arrivée là. Mais comment trouver un mensonge crédible à ce moment-là et dans ces conditions ? Si les chemins étaient toujours impénétrables, le fait que Varys soit le seul à même de les connaitre sur le bout des doigts n’en était pas un, hélas. Elle espérait de tout cœur qu’il ne lui en tiendrait pas rigueur, mais elle ne comprenait toujours pas pourquoi il l’avait laissé dire la vérité au Roi, la vérité sur les Lannister, sur sa femme, sur ses enfants et enfin sur son véritable héritier. Cela prouvait une chose, il n’œuvrait pas pour eux, comme elle soupçonnait Mestre Pycelle d’être à la botte de la Reine et Petyr à la botte de lui-même. Varys lui, voulait autre chose et elle n’arrivait pas à comprendre quoi, cela hantait ses pensées car elle savait désormais combien l’information et la compréhension de l’ennemi pouvait être un atout, voir une condition pour la survie.

Elle marchait la tête baissée et lorsque ses gardes firent halte devant un Seigneur des Terres de la Couronne, certainement venu pour assister au procès de Lady Lysa, comme tant d’autres, elle rentra dans le dos de Ser Barristan ce qui la sortit de ses pensées.

__ Que se passe-t-il ? » Demanda-t-elle, anxieuse, soudainement revenue à une réalité dangereuse.
__ Qui va là ? » Demanda Ser Neraron, Capitaine de la Garde Ailée à l'intru.

Elle se décala légèrement pour voir qui se présentait devant elle. Lord Renfred Rykker de Sombreval. Elle l’avait déjà vu à de nombreuses reprises à Port-Real, aux Tournois des anniversaires de Joffrey et peut-être même à son propre anniversaire de treize ans, lorsque Jon Arryn avait annoncé à la cour qu’elle, sa petite nièce, serait désormais Surintendante du Val avec Nestor Royce. Il habitait les Terres de la Couronne et devait se rendre souvent à la capitale, il en avait en tout cas les moyens. Il devait connaitre l’Araignée, Petyr, tous les membres du conseil restreint, au moins de vue si ce n’est plus. Il pouvait observer ce qui se tramait au Donjon Rouge sans que personne ne le remarque, contrairement à elle. Restait à savoir pour qui il travaillait et surtout à qui allait sa loyauté, car il était probable que, déjà, un des locataires de la forteresse ait abouti aux mêmes conclusions. Elle s’avança et hocha la tête pour le saluer, sortant du carcan de ses gardes, même si deux chevaliers restèrent à côté d’elle, prêts à la défendre et à la confier aux autres pour l’extraire de ce couloir.

__ Messire Renfred, veuillez pardonner mes Chevaliers. En ces temps troublés où une épouse aidée d’un vassal peut assassiner son Suzerain, Epoux et Main du Roi sans que personne ne constate le crime, la prudence et la méfiance devienne une gangrène qui gagne tous les esprits. Permettez-moi de me faire pardonner en vous invitant à déjeuner dans mes appartements. »

Ashara sourit et lui indiqua la direction d’un geste gracieux de la main, l‘invitant ainsi à la suivre.