Le Roi, les Targaryen, les Lannister, les Stark et autres Tyrell ? Franchement, si je les ai déjà vus, c’est de loin et je n’ai aucune envie de me mêler de leurs affaires. Eux ils jouent pour des royaumes, un trône, alors que moi je ne joue que pour quelques pièces ou un repas chaud. Alors M’ssire, comprenez moi bien, je ne fais pas partie de leur monde et ils n’ont que faire de moi et des miens. Qu’ils gagnent ou perde, qu’ils vivent ou meurent, je resterais dans la masse silencieuse qui paye le prix fort dans leurs guerres et leurs mensonges. Je gagnerais ma croute ou perdrais tout, je vivrais au petit bonheur la chance et je mourrais tôt ou tard, et eux, Lions, Cerfs, Loups ou que sais-je, ils ne me pleureront pas. Pourquoi les pleurerais-je ? Moi je ne fais que chanter et jouer, et parfois mes histoires parlent d’eux.

Depuis toujours on m’appelle Hermine, et parfois, à se prénom vient s’ajouter l’un de mes surnoms, la rouquine, la  rousse, la chanceuse, l’orpheline, la douce, la fille de l’eau, La Ruffurque, du Fleuve, Rivers, de Salins, du Conflans, de Port-Real, mais en réalité, je sais qu’Hermine n’est pas un prénom, je sais que je n’en ai jamais eut. Ma mère n’a pas eut le temps de m’en donner un avant de m’abandonner, et mon père je ne sais pas plus qui il était, mais je m’en fiche, après tout, ils n’ont pas voulut de moi alors pourquoi m’en soucier. On m’a nommé ainsi à cause de ma chevelure rousse et de ma peau blanche, comme le pelage d’une hermine d’été, et aussi parce que quand j’étais petite je me tortillais et essayait de me glisser partout et de me carapater. J’ai été trouvée dans le Conflans, plus exactement dans un couffin d’osier tapissé de linges blancs qui voguait sur la Ruffurque et refusait contre toute attente de prendre l’eau. Les lingères qui m’ont retrouvées ont crut à un signe divin, Le Roi Fou était mort un an plus tôt et moi je venais de naitre, et j’avais survécu sur les flots déchainés. En effet mes chances de survie sur la rivière en crue étaient faibles, et je me suis longtemps dis que ma mère n’avait pas eut le courage de me noyer et avait voulut laisser œuvrer les éléments. Parfois je me pose la question malgré tout, pourquoi m’a-t-elle abandonné, qui est-elle et qui est mon père, comment j’ai survécu, qu’est-que tout cela veut dire. Pour se moquer de moi, mes amis successifs m’ont dit que j’étais l’une des bâtardes d’Edmure. Il est vrai que je possède une chevelure proche de celle des Truites d’après ce que j’ai entendu, la leur est auburn, moi je suis rousse. Mais je doute fortement pouvoir prétendre à quoi que se soit, et ce que se soit vrai ou non. D’ailleurs, il n’y a pas que les Tully qui sont roux, alors bon, et puis au final ça m’apporterait quoi d’être une bâtarde plutôt qu’une orpheline ? Parfois je rêve qu’un Prince Charmant, ou un Chevalier, viendra me chercher pour me dire que je ne suis pas une fille de rien, que je suis une Dame et qu’il veut se marier avec moi. Oui je rêve, comme tout le monde parait-il, mais ce n’est qu’un songe, j’en ai bien peur.

Enfin, la vie n’est pas un songe justement loin de là, alors reprenons. Des lavandières donc, cinq, une vieille, très vieille même, une jeune, presque une enfant, une entre deux âge et ces deux filles, je ne me souviens plus de leurs prénoms. Elles aussi étaient rousses sauf la grand-mère qui avait les cheveux blancs. Elles m’ont ramenées chez elles et m’ont élevée comme l’une des leurs, et me nommèrent Hermine, mais parfois, j’ignore pourquoi, l’aïeule m’appelle Chanvrine, et je vois dans ses yeux que c’est un bien mauvais souvenir. La mère venait de perdre un enfant et avait donc du lait pour moi et surtout beaucoup d’amour à donner à un bébé, même un bébé braillard et agité comme je l’étais. Il n’y avait pas d’hommes dans cette famille, j’ai appris plus tard qu’ils étaient tous mort pendant la rébellion. Le père avait été torturé puis pendu aux portes de la ville par les Loyalistes pour qu’il dise où se trouvait Robert. J’ignore même s’il savait quoi que se soit à ce sujet, il était un humble scieur de long et était au travail lorsqu’il avait été cueillit. A cette époque, toute la petite famille, fils, frères et grand père compris, vivaient à Pierremoûtier dans le Sud du Conflans, et ils ont été aux premières loges de la première bataille de la rébellion. Hélas pour eux, car tous les hommes de la famille y passèrent les uns après les autres et je doute que l’enfant que la mère avait perdu soit celui de son mari et puis il y a cette peur dans les yeux de la jeunette. Certains furent tués pour l’exemple, les autres combattirent aux côtés de Robert et furent tués lors de la bataille des Cloches sous les yeux de leur mère, grand-mère et sœurs. Après la bataille, la maison avait brûlé et la famille s’en était allée plus au Nord pour s’installer dans la campagne et s’éloigner de l’agitation. C’était une petite masure de rondins et de glaise séchée sur les bords de la rivière entre Salins et Herpivoie, un endroit calme et agréable. J’ai donc grandit avec elles, dans la douceur et la générosité, je ne manquais de rien, en tout cas je ne me souviens pas avoir été malheureuse, j’ai même appris à nager, et bien sur à laver le linge ou même à le repriser. Mais il y avait une atmosphère de chagrin, un silence pesant, trop de souvenirs douloureux, et, du haut de mes sept ans, je ressentais tout ça comme un étau qui me broyait les côtes et me coupait le souffle. Alors je suis partie…

La Rouquine sur les chemins, j’ai offert mes services en tant que lavandière, couturière, domestique, je me suis coupée les cheveux pour devenir palefrenier et j’ai même faillit être engagée comme écuyer. Ah se sont certainement les plus belles années de ma vie, j’ai tout fait, tous les métiers du monde, des châteaux aux champs, je me suis révélée une bien piètre chasseuse et tout aussi nulle pour me défendre. Mais je me suis amusée, je courrais la campagne à la recherche d’aventure et je me suis fait tout un tas d’amis, d’autres orphelins avec qui je faisais les 400 coups. Nous volions, nous mendions et nous nous protégions les uns les autres et combinions les atouts de chacun pour survivre. Moi j’étais incapable de faire du mal à qui que se soit, bête ou homme, mais je courrais vite et j’étais une sacrée acrobate, de plus j’avais un minois à faire craquer n’importe qui et j’imitais très bien les animaux. Alors souvent je montais la garde ou je servais de diversion, en plus je tirais les bourses comme personne et j’échappais à mes victimes par ma vitesse et mon agilité. C’est là que je me suis rendue compte que mon surnom m’allait comme un gant. Je sautais, je me faufilais, je grimpais, j’allais sur les toits, dans les caves, la ville était mon terrain de jeu. D’abord Salins, Viergétang, Sombreval et enfin Port-Real. Nous avions nos cabanes dans le Bois du Roi et nous braconnions lorsqu’on n’avait pas pu voler assez d’argent et de nourriture pour nourrir tout le monde. Nous nous prenions pour la Fraternité et chantions les frères du Bois-du-Roi autour du feu le soir, nous étions heureux malgré les difficultés de la vie et les mauvais coups du sort qui prenaient parfois l’un des nôtres.

Je m’amusais comme une enfant, mais je n’en étais plus tout à fait une et je suis tombée amoureuse de Gendry dès que je l’ai vu. Car parfois je travaillais aussi, souvent même, et j’ai été prise dans la forge pour fabriquer les fourreaux et certaines pièces d’armure, je faisais mine de rentrer chez moi le soir, mais c’était pour rejoindre mes amis. Mais un soir je suis restée avec lui et je ne le regrette pas, c’était la plus belle nuit de ma vie, et cela a duré environs un mois. Au clair de la lune nous nous embrassions, nous dormions dans les bras l’un de l’autre, un sourire satisfait sur les lèvres, j’étais amoureuse et ce sentiment me donnait des ailes, c’était sensationnel. Pour moi c’était tout comme, mais ça n’était pas tout à fait la première fois, simplement la première fois que je me donnais de mon plein gré, sans contrainte et sans peur, sans dégout et sans remords. J’aurais voulut que ça dure toujours, mais un de mes amis passa me voir, j’avais disparut depuis près d’un mois ! Jaloux de mon bonheur, ou simplement de son rival, il vola une épée et le forgeront m’accusa, il voulut me battre avant de me livrer à la justice. Gendry m’a défendit et se mit en travers de son chemin, devant moi, pour me protéger, il dit qu’il travaillerait deux fois plus pour payer ma dette s’il me laissait partir. Il m’ordonna de fuir avant que notre maitre ne change d’avis, je partis, j’attendis dans le grenier où nous avions l’habitude de dormir, il arriva au milieu de la nuit, exténué et fondit sur moi, rouge de colère, me prenant par le col et me secouant :

- Hermine ! Pourquoi t'as fais ça ?!
- C’est pas moi Gendry, c’est pas moi, j’ignore qui c’est.
- Pourquoi je devrais te croire ?
- Parce que je t’aime ! Pourquoi j'aurais fais ça ?
- Hum…
- Je te le jure sur notre amour, j’ai rien volé. Je me mis à pleurer devant cette accusation injuste, j’étais une voleuse, mais je n’avais jamais aimé ça, et puis là je n’avais rien volé, s’il arrêtait de m’aimer pour cela c’était trop injuste !
- Je te crois ma douce, je te crois. Il réfléchit un instant. J’ai même peur de savoir qui a fait ça. Il prit ma tête entre ses mains et m’embrassa sur le front avant de me prendre dans ses bras. Demain à l’aube nous partirons, j’ai pris du pain et de la viande séchée.

J’étais triste de quitter Port Real et ma Fraternité du Bois du Roi, mais j’étais heureuse parce qu’il venait avec moi. Nous nous endormîmes lovés l’un contre l’autre et dès les premières lueurs de l’aube nous nous dirigeâmes vers la porte des Dieux pour nous offrir une nouvelle vie. Ma main paressait si frêle et si fragile dans la sienne énorme et calleuse, son baluchon sur l’épaule, moi je portais la nourriture dans le mien car je n’avais strictement rien d’autre à emporter. Je souriais guillerette, je pensais que nous allions nous marier, évidemment il n’avait rien du Noble Chevalier de mes rêve d’enfant, mais je l’aimais, et puis à sa manière, il était noble, plus certainement que bon nombre de chevaliers. D’un coup nous fûmes stoppés net, de grosses main sur nos épaules, je tombais en arrière et ensuite tout ce passa très vite, je reconnus le Forgeron il était furieux et accompagné de plusieurs gardes du Guet. Gendry hurla, me disant de fuir et de ne pas me retourner, alors je pris mes jambes à mon cou, lâchant même le linge qui contenait nos futurs repas et mis toutes mes compétences au service de ma fuite. Je parvins par miracle à sortir de la ville et là je me cachais dans une carriole sous un tas de vêtements en tout genre, il y avait des masques, des costumes colorés, des marionnettes, un joyeux bordel que je ne pris pas le temps de détailler. Les gardes me cherchèrent pendant plusieurs heures, mais lorsqu’ils interrogèrent la propriétaire de la carriole, elle prétendit m’avoir vu partir en direction de la Nera. Pendant ce temps, un jeune homme m’extirpa de ma cachette en me mettant la main sur la bouche et me fit signe de me taire puis de me cacher dans un grand coffre à double fond. Et lorsque les gardes revinrent et fouillèrent enfin le tombereau, ils ne trouvèrent rien, même en ouvrant le coffre dans lequel j’étais pourtant caché.

Dans le double fond très étroit, je sentis qu’on prenait la route, mais je n’osais pas bouger et ce n’est qu’une heure plus tard que le même jeune homme m’ouvrit et m’aida à sortir avec un sourire. Il s’agissait en fait d’une des caravane d’une troupe d’artistes, théâtre, marionnettes, acrobates, musiciens, ils me racontèrent ce qu’ils faisaient et me demandèrent pourquoi le Guet était à ma recherche, je leur déballait tout et fondit en larmes à l’idée de ne jamais revoir Gendry. Ils me dissuadèrent d’y retourner et continuèrent leur chemin avec moi. Ils quittaient Port-Real où ils avaient gagné beaucoup d’argent pendant le Tournoi des douze ans de Joffrey et se rendaient à Port Lannis où leurs services avaient été requis. Ils me questionnèrent sur mon passé et la femme compris vite que je pourrais apporter certains de mes compétences à la troupe. Je commençai donc par m’entrainer avec le jeune homme qui ne disait jamais rien pour un numéro d’acrobaties puis avec des filles pour une danse aérienne mêlant grâce et sauts. J’appris aussi à jouer la comédie et à manier les marionnettes, à chanter, à jouer des percutions, à monter à cheval, à me tenir debout au galop dessus. Cela fait seulement quelques mois et pourtant je me révèle plutôt talentueuse pour la voltige, à cheval ou à pied, ou encore la danse et le théâtre, il faut dire que je travaille beaucoup. Et si les instruments ne font jamais ce que je veux ma voix est plutôt agréable à entendre parait-il et puis je sais aussi repriser les costumes et faire la cuisine. En tout cas, je refuse d’être un poids pour eux, ils m’ont aidés, recueillit, sauvé la vie, je leur dois bien ça ! Nous voyageons et montrons nos talents dans toutes les Sept couronnes, dans les villages, les Tournois, mais aussi pour les noces et les banquets dans les châteaux.

D’une nature enthousiaste et enjouée, Hermine est le plus souvent de bonne humeur, prompte à rire et à faire rire, le cœur léger de ne jamais rien regretter et d’être une éternelle enfant, insouciante et parfois frivole. Gentille et généreuse, elle est d’une loyauté sans faille vis-à-vis de ses amis, la troupe, mais aussi ceux d’avant, même si ça fait longtemps qu’elle ne les a pas vu. Douce et attentionnée elle a souvent plus d’égard pour les autres que pour elle et cela lui joue bien des tours, d’autant plus qu’elle est d’une naïveté extrême et incapable de voir le mal ou la perfidie chez quelqu’un. Au contraire, même s’il lui fait du mal elle ira plutôt lui chercher des excuses pour justifier son comportement et le pardonnera bien vite quitte à tomber dans une spirale infernale. Dotée d’une sorte d’empathie, elle lit certains sentiments chez les autres comme dans un livre ouvert, et se prends le chagrin ou la haine en pleine poire. Mais si elle peut détecter de mauvaises choses elle croit trop en l’être humain pour ne pas donner une chance à la personne, voir même une dizaine de chances avant de se méfier réellement. Sa naïveté est donc certainement plus due à un déni de la réalité qu’à une bêtise intrinsèque, car elle est tout à fait à même de comprendre la dureté de la vie et la cruauté de certains, mais jamais dirigé contre elle.

Elle est romantique, sensible et attachante, totalement incapable de faire du mal, elle n’aime pas voler et s’en veut toujours, mais la survie lui a appris à faire avec même si elle est bien contente d’avoir trouvé un métier honorable. Plutôt docile, parfois même trop, à tel point qu’elle s’estime coupable des abus dont elle a été victime et qu’elle n’a jamais eut assez de cran pour les éviter. Elle fait ce qu’on lui demande, surtout si la personne qui lui donne des ordres est d’un rang supérieur au sien, jamais il ne lui viendrait à l’idée de se rebeller, sauf peut-être pour sauver quelqu’un qu’elle apprécie. Ça n’est pas calculé, elle a été élevée comme ça, à courber l’échine pur ne pas être remarquée, soit du temps où elle travaillait dans las châteaux soit du temps où elle volait dans Culpucier. Être une grande gueule ne lui aurais alors apporté que des ennuis et elle a appris à ne pas faire de vague sans même s’en rendre compte, sans que ça soit réellement une stratégie de survie. C’est d’ailleurs parce qu’elle ne calcule rien qu’elle peut faire des gaffes et se mettre dans des situations très inconfortables. Mais finalement, le plus souvent, sa gentillesse et sa douceur lui permettent de déjouer les mauvais tours et de s’attirer la bienveillance des autres, ou peut-être est-ce de la pitié.
Elle aime les fleurs, les oiseaux qui chantent, le soleil et la brise d’été. Elle aime l’eau, elle sait nager et faire des ricochets, grimper aux arbres et faire des bonds et des saltos. Elle ne sait par contre ni lire ni écrire, ses notions d’histoire et de géographies sont plutôt succinctes et n’est pas douée du tout pour se battre ou chasser.

Pas farouche pour un sou, elle est tout de même un peu timide et souvent effacée, en tout cas plutôt discrète, comme un fantôme, comme  une ancienne voleuse aussi, ou tout simplement une roturière parmi tant d’autre, ni spécialement jolie, ni laide. La seule chose qui ne peut pas passé inaperçu se sont ses cheveux orange, mais à part ça elle a un physique plutôt banal, ni grosse ni maigre, plutôt petite, un joli minois et des yeux bleus-verts. Elle porte le plus souvent des tuniques de lin bon marché et des surcots de laine mal coupés, et cela n’aide en rien à la mettre en valeur, pas plus que la  simple tresse dont elle se coiffe. Sa peau claire comporte néanmoins quelques cicatrices qui racontent une histoire bien différente du sourire éclatant qu’elle arbore généralement et qu’elle adresse à tous.
Mais si elle peut passer inaperçu perchée sur une roulotte lorsqu’elle arrive dans un nouveau village avec toute la troupe, dès qu’elle joue ou qu’elle chante, son visage s’illumine et elle devient l’éclatante et prisée Hermine d’hiver. Habitée par le souffle de la danse, des acrobaties, par l’histoire une scénette ou celle d’une geste, elle se métamorphose, et nombreux sont ceux qui alors tombent sous le charme de la rouquine. Dans ses habits de lumière, costumes en tout genre, de la princesse à la fée, de couleurs vives et de transparences, elle éblouit par une grâce dont elle semble pourtant incapable au premier abord. Mais si tôt qu’elle quitte a scène elle se fond de nouveau dans la masse et l’on retiendra un timbre légèrement cassé, quelques mots baignés dans la lumière, cette chevelure, ce regard plein de mystères, toujours entre rires et souffrance. On ne retiendra qu’un songe, on se demandera même si c’était bien réel, à moins qu’on la recroise avant d’oublier complètement.