Un cauchemar, un vrai cauchemar. Comment est-ce qu’on avait pu en arriver là ? Tout ce qui se passait depuis ses dernières semaines semblaient tellement surréaliste. Et pourtant c’était la vérité, bien que j’aurais préféré qu’il ne s’agisse que d’un horrible rêve. Oui, je voulais me réveiller, et que Père soit auprès de moi pour me rassurer. Mais Lord Stark n’était plus à Winterfell.

Voila maintenant quelques jours que je m’étais réveillé de mon coma, qui d’après Mère, avait duré plusieurs semaines. Et à ma plus grande stupeur, j’avais découvert à mon réveil, que la moitié de ma famille était partie. Père, Arya et Sansa étaient partis pour Port-Réal, Snow pour le mur. Il ne me restait plus que Rickon –que je ne voyais jamais- Mère –qui allait aussi partir- et Robb. Oui, heureusement, j’avais Robb. Mais soyons franc, j’étais peiné de voir que ma famille était partie alors que je vivais une épreuve très difficile. Je savais que je ne devais pas leur en vouloir, Père devait faire passer le Roi avant moi, suivre son devoir et son honneur. Mais malgré la présence de Robb, je me sentais seul. Mon frère s’était senti mal lorsque je lui avais dit que je préférais être mort plutôt qu’infirme. Et je pesais mes mots. Moi qui ne tenait pas en place, moi qui rêvait toujours d’aventures, comment serait ma vie maintenant que je n’avais plus l’usage de mes jambes ? J’avais tout perdu, tous mes rêves, et mon avenir. Je ne serais jamais comme Robb et Père. Et j’étais seul.

Mestre Luwin continuait de me donner des cours quotidiennement, essayant d’avoir toute mon attention et ainsi me distraire le plus possible de mes sombres pensées. Shadow, mon loup qui avait maintenant un nom, restait toute la journée à mes côtés, me procurant un peu de réconfort. Pendant de nombreux jours, je m’étais laisser aller dans la déprime, n’ayant pas envie de manger, et encore moins de parler. Robb voyait bien que je lui cachais quelque chose, concernant mon accident. Mais je ne pouvais rien dire. Etrangement j’avais peur de lui dire que ce n’était pas un accident. Je ne me rappelais pas qui, mais on m’avait poussé. Si je parlais, il y aurait de graves conséquences. Alors je me contentais de dire « je suis tombé ». Mais Robb ne me croyait pas, après tout, il m’avait vu grimper sur les murs les plus glissants et les plus hauts de Winterfell, jamais je n’avais eu d’accident, étant même plus à l’aise en hauteur que sur la terre ferme. Ce à quoi j’avais répondu une nouvelle fois « Je suis tombé. » d’un ton neutre mais qui montrait que la conversation se terminait là. Il n’obtiendrait pas plus. Temporairement ou non, Robb avait cessé de me questionner. Peut-être qu’il avait lui-même sa propre idée sur les évènements.

Toujours est-il que malgré mon côté sans vie, j’avais aujourd’hui décidé de me reprendre en mains. Hodor me porta sur son dos, me permettant de montrer ma petite frimousse à l’extérieur de la demeure Stark, Shadow à ses talons, nous suivant de prêt, ne me quittant pas des yeux, comme un fidèle garde du corps.

La direction que prenait Hodor, sous ma demande, était simple : celle de mon frère ainé. Et effectivement, je finis par tomber sur lui. Je penchais la tête sur le côté pour pouvoir voir mon frère sans avoir la vue gâchée par le dos d’Hodor. C’était tellement rare que je sorte de ma chambre, mon frère devait être surprit. Je lui adressais un petit sourire. Hodor me posa sur un banc et s’éloigna un peu. Je caressais Shadow pendant un petit moment avant de finalement prendre la parole, sans pour autant lever la tête vers Robb.

« J’ai changé d’avis …. Je ne veux pas mourir. »

Ce changement était déjà un grand pas en avant. Enfin, façon de parler, parce que physiquement, je n’étais pas capable de faire un pas, mes jambes ne répondant pas aux ordres donnés par mon cerveau. Enfin je relevais la tête vers Robb, avant de déclarer avec détermination.

« Je ne remarcherais plus jamais, je l’ai compris, mais … Mais je ne veux pas être inutile ! Je ne veux pas que mes rêves soient brisés ! Robb, je deviendrais quand même aussi valeureux que Père et toi ! Alors c’est pour ça que je veux que tu continues de m’entrainer ! Je t’en supplie Robb, ne me laisse pas tomber comme les autres ! Aide-moi ! »

La vie de Robb n'avait plus à être enviée de quiconque depuis quelques temps. En l'espace de quelques semaines, Winterfell était passé d'un lieu agréable et familial, à un désert affreux glacial. Seul le vent semblait s'amuser à courir dans les couloirs vitrés ou non, à jouer avec les feuilles posées par terre et la fumée. Tout était calme, étonnamment calme. Père avait emmené avec lui Arya et Sansa jusqu'à Port-Réal, quelques jours plus tôt. Son dernier dialogue avec son père, il s'en souvenait. Quelque chose le tracassait visiblement, tout devait avoir un rapport avec la curieuse missive que mestre Luwin avait amassé sur un corbeau aussi noir que la nuit. Noires ailes, noires nouvelles.

Robb ne savait pas réellement de quoi il s'agissait, mais tout avait changé. Le départ de Père s'était fait prestement, et finalement, en deux trois mouvements, il n'était plus là, emportant la fraîcheur même de l'âme de Winterfell avec lui. Une poignée d'heures auparavant, voilà que sa propre Mère l'informait que quelque chose n'allait pas, et qu'elle aussi allait partir pour Port Réal. Robb se souvenait nettement de cette réunion dans le bois Sacré, un peu plus haut. Mère pensait que quelqu'un avait délibérément essayé de tuer Bran, en le poussant, et en commettant un essai pour le tuer dans son lit. Ces nouvelles avaient profondément choqué Robb, de plus parce qu'il avait une bonne idée sur qui était responsable. Les Lannister. L'histoire était riche en exemples montrant leurs sournoiseries, leurs complots. Et l'histoire ne finissait-elle pas par se répéter inlassablement?

Toute la famille au loin Robb était le seul Stark le plus âgé pour pouvoir gouverner. Les jours sans Bran avec qui parler étaient diablement longs et ennuyeux. Il était propulsé dans des affaires d'état qu'il ne comprenait pas, et remerciait les Anciens Dieux d'avoir Ser Rodrick à ses côtés pour l'aider. Et puis, Bran était sorti de son coma, apprenant par la même occasion qu'il ne pourrait plus marcher. Mestre Luwin restait discret sur ce sujet, n'ayant pas envie de s'exprimer, visiblement, à chaque fois que Robb l'interrogeait dessus. Etait-ce vrai alors? Bran avait-il perdu l'usage de ses jambes à jamais? Lui qui voulait devenir un chevalier, lui qui voulait parcourir les Sept Royaumes secourir la veuve et l'orphelin... Robb ne pouvait s'empêcher de penser à son frère avec un pincement au coeur. Même la selle confectionnée par le Lutin ne changeait pas la donne. Bran était lui aussi resté très évasif sur l'accident, préférant soit ne pas s'en souvenir, soit dissimuler quelque chose.

Dans la cour, Robb discutait avec le forgeron de Winterfell lorsqu'il entendit un 'HODOR' familier. Il se retourna, sa longue cape noire fouettant l'air, pour se retrouver face au demi géant Hodor qui portait sur ses épaules son frère Bran. Il sourit. Hodor avait pris cette habitude de porter Bran partout où il allait, et il ne s'en plaignait pas. C'était un curieux personnage. Pour autant que Robb s'en souvienne, il avait toujours été à Winterfell. Quelle n'a pas été sa surprise lorsqu'il apprit que son nom n'était en fait pas Hodor mais bien Walder ... !

« J’ai changé d’avis …. Je ne veux pas mourir. »

Le sourire de Robb disparut alors qu'il repensait à ce que lui avait dit Bran à son réveil. Il disait préférer mourir à rester dans cet état. Robb avait craint pendant un moment que ce ne soit pas passager et qu'il le désire vraiment. Mais il se rendait compte avec soulagement que cela lui avait passé. Tant mieux. Les nouvelles étaient suffisamment mauvaises et la situation tendue sans en rajouter. Robb croisa les bras, sentant par avance ce que Bran allait lui demander. Et cela ne manqua pas. Il lui expliqua qu'il ne voulait pas être laissé derrière, et qu'il demandait à ce que Robb continue de l'entraîner. L'héritier de Winterfell baissa les yeux, sentant un pincement au coeur. Que pouvait-il lui répondre? Il ne voulait pas risquer sa vie, mais il comprenait son désir de faire ses preuves.

« Mestre Luwin n'a pas donné son dernier mot, Bran. Il se peut que ce ne soit que temporaire, nous n'en savons rien. Quant à ton entraînement... »

Robb soupira, puis le fixa.

« Je ne peux rien te promettre, Bran. Commençons par faire un tour à cheval, et on verra comment les choses se goupillent, d'accord? »

En voyant le sourire de Robb, je ne pouvais m’empêcher d’être heureux. Tant que Robb serait là, tout irait bien n’est-ce pas ? Si Mère partait pour rejoindre Père à Port-Réal, Robb resterait ici pour régner sur Winterfell. Après tout, il était l’héritier du Lord Stark. Ca me rassurait de savoir que je ne serais pas tout seul. Un peu plus et je me serais jeté sur Robb pour le remercier de sa gratitude, mais c’était maintenant quelque chose que je ne pouvais plus faire, à moins qu’Hodor me propulse sur Robb, bien que je doute que se soit dans ses intentions. Je me contentais donc de rester assit sur le banc, à sourire doucement. Un fin sourire.

Le sourire de mon frère ainé disparu lorsqu’il m’entendit parler d’un sujet plus douloureux qui l’inquiétait : mon envie de vire ou mourir. Cependant, il paraissait soulager de me voir changer d’avis à ce sujet, vouloir continuer de vivre. Honnêtement, je n’étais plus spécialement attaché à la vie, mais avec du recul, je ne me vois mal quitter ma famille. Ils sont certainement plus précieux que mon mal être.

Robb prit la parole, me certifiant que rien n’était irréversible. Peut-être qu’un jour, je retrouverais l’usage de mes jambes, Mestre Luwin ne s’était pas prononcé à ce sujet. Je secouais négativement la tête en murmurant un vague « Stop … ». Je ne voulais pas entendre ces paroles de réconforts et d’encouragement. Surtout ne pas avoir de faux espoirs. Je ne voulais pas espérer toute ma vie, sans rien obtenir, sans parvenir à mes fins. La vérité était peut-être dure à accepter, elle était tellement déprimante, mais c’était toujours mieux que l’illusion. Mes yeux posés sur mes jambes inertes, je ne disais mot, perdu dans le fin fond de mes pensées obscures avant de soupirer.

En ce qui concerne mon entrainement, l’héritier des Stark n’osait pas prendre d’initiatives, de peur sans doute que je me mette en danger. C’était une tache délicate avec mes jambes hors d’usage. Est-ce qu’un infirme pouvait se battre ? Robb devait se poser la même question. Il préférait donc commencer doucement, à savoir par une balade à cheval. Ne sachant trop quoi penser, je me contentais de caresser Shadow qui avait l’air de me regarder avec inquiétude, compatissant à ma douleur. Est-ce qu’une balade à cheval serait un pas en avant ? Ou au contraire, le signe que je n’étais plus bon à rien. La vérité était que j’avais peur de tomber. La selle donnée par Tyrion devait justement empêcher que cela n’arrive, mais je ne pouvais m’empêcher de me montrer craintif, n’étant pas du tout rassurer. C’était stupide et indigne d’un petit Stark …

« J’ai peur Robb … »

La peur était un sentiment humain. Et je suppose qu’il est normal d’avoir peur d’un avenir incertain. Est-ce que Robb parfois avait peur ? En tout cas, il ne le montrait pas. Tellement valeureux, j’étais si fier de lui. Mes yeux se posaient sur la selle en question, déjà accrochée à mon cheval. Je frissonnais puis soupirais. Qui ne tente rien n’a rien comme on dit. Vouloir quelque chose et le faire était complètement différent, mais je ne devais pas me laisser abattre, je n’allais pas me défiler.

Détaillant le visage de Robb, je le trouvais anxieux. Serait-ce à cause du départ de Père ? En fait, il était comme ça depuis l’arrivé des Lannister à Winterfell. Je fus pris d’un long frisson en pensant à eux.

« Je ne comprends pas Robb … Pourquoi notre famille n’est plus là ? Pourquoi Père a accepté ce rôle ? … Et pourquoi Snow est partit aussi ? Est-ce qu’on ne le reverra plus jamais ? … Je voudrais que tout le monde revienne, j’ai tellement besoin d’eux. C’est trop dur Robb, c’est trop difficile. S’il ne m’avait pas poussé, rien de tout cela ne serait arrivé !! »

Me rendant compte du sens de ma dernière phrase, que je venais de confirmer les doutes de Mère et Robb, je plaquais brusquement mes mains sur ma bouche, fixant mon frère avec inquiétude. Même Shadow avait relevé la tête, comme s’il comprenait le sens de mes paroles.

« Oublie … »

Par instinct, j’allais me redresser pour partir mais évidemment, rien ne se produisit. L’ambiance était pesante. Mon regard se posait sur les murs de Winterfell. Un pincement au cœur me prit en pensant que je ne pourrais plus grimper. En fait, c’était simple, aussi « bougeon » qu’Arya, maintenant que j’étais infirme, je m’ennuyais ferme.

Finalement, je tendis simplement les bras vers Robb pour qu’il me mette sur le cheval, s’il voulait faire cette fameuse balade.

Robb aimait beaucoup ses frères et soeurs. Il avait grandi en les voyant arriver au monde un par un, tous différents, tous uniques. Il les avait taquiné, il les avait entraîné dans ses bêtises. Il leur avait fait peur en leur racontant des histoires de chevaliers errants, de pieuvres gigantesques dans les mers près des Iles de Fer. Ils avaient grandi tous ensembles, soudés au maximum, d'un seul homme contre le froid glacial du Nord, que peu de gens à part les Stark pouvaient supporter. Robb avait appris à vivre avec, à voir que le froid n'était pas nécessairement un mal si l'on savait comme y faire. Il suffisait d'être attentif à ce qui nous entourait, et rien n'était plus facile que d'éviter de se perdre dans les étendues neigeuses du nord de Westeros. Robb en venait à penser qu'il n'avait pas nécessairement besoin de voyager pour se sentir heureux. Il avait tout ce qu'il lui fallait ici, famille, proximité. Mais l'on ne fait pas toujours ce que l'on veut n'est-ce pas? Il aurait des devoirs, qu'il accomplirait avec honneur, mais d'ores et déjà sa vie était condamnée à ressembler à celle de n'importe quelle noble.

Bran en revanche, aurait eu la promesse d'une vie comme il souhaitait la faire. Une vie où il aurait été libre de parcourir les sept Royaumes de Westeros, ou au contraire de demeurer à Winterfell. Bran n'aurait accédé au gouverneur de Winterfell qu'à l a mort de Robb, ou après ses héritiers éventuels. A cette pensée en le regardant, Robb sentit un frisson lui parcourir l'échine. Le mariage.. Cette pensée le terrifiait autant qu'elle l'intriguait. Lorsque l'héritier de Winterfell tentat de réconforter son frère, celui ci baissa la tête, honteux peut-être, lui suppliant d'arrêter. Robb serra la mâchoire. Et là, quel était le plus adulte des deux, n'est-ce pas? Robb ne voulait pas le priver de l'entrainement qu'il voulait obtenir. Il ne pensait pas à lui en tant qu'infirme, non. Bran était son frère, et son frère avant tout. N'importe qui devrait être capable de faire ce qu'il veut de sa vie, peu importe les circonstances. Robb craignait plus que Bran ne souffre du regard des autres. Il allait devoir être fort, et ce quelque soit la direction dans laquelle il allait dans le futur. Les gens le regarderaient de travers dans le meilleur des cas, de haut sinon. Il devrait faire ses preuves. Mais pas à Robb. Robb avait confiance en lui. Et il savait ce qu'il valait et qu'il l'aiderait pour tout, dans la limite du raisonnable, sans qu'il ne se blesse.

Robb héla un palefrenier qui comprit sa demande. En moins de deux, il se retrouvait à côté d'eux avec deux chevaux. Robb flatta l'encolure du sien tandis que Hodor criait Hodor, trouvant la présence de l'animal visiblement rassurante. Bran lui confia qu'il avait peur, et Robb se tourna vers lui. Il savait ce qu'il ressentait. Robb aussi voyait sa famille partir petit à petit. Les loups étaient appelés au grand soleil du sud. Il craignait pour sa famille, pour leur futur. Que Bran s'imaginait-il? Que Robb ne craignait rien? Bien que sûr que si. Certains choses le terrifiaient, profondément, le glaçant jusqu'à la moelle. Il était l'aîné, lui avait un jour dit Père. Il devait se comporter en homme de la famille, et qui plus est, le Gouverneur de Winterfell. Il n'avait pas le luxe de montrer qu'il avait peur. Bran en revanche, semblait trop jeune pour saisir de telles nuances. Tout ce qu'il voyait était que sa famille l'abandonnait progressivement. Il voyait chacune des personnes qu'il chérissait l'abandonner pour partir à la poursuite d'une quête qu'il ne comprenait pas. Père avait des responsabilités. Robb aurait aimé que Bran le comprenne, mais c'était quasiment impossible. Alors qu'il s'apprêtait à le réconforter, Bran finit sa tirade sur une phrase qui désarçonna Robb un moment.

S’il ne m’avait pas poussé, rien de tout cela ne serait arrivé !! Robb lança un regard dur vers son frère. Ainsi donc, il en savait plus qu'il ne le disait. Bran se sentit confus, et il lui demanda d'oublier, mais le mal était fait. Le sang de Robb commençait à bouillonner dans ses bras, déclenchant des fourmis dans ses doigts. Il attrapa son frère du dos de Hodor et le plaça sur le cheval, nouant la selle que le Lutin avait fabriqué pour lui. Il laça une sangle, puis l'autre, un peu brusquement.

« Ne garde pas tout ça pour toi, Bran. Nous sommes des Stark, nous sommes une famille puissante. Ne pas riposter à ce genre d'attaques ne ferait que montrer aux autres qu'ils peuvent nous blesser. Et il ne faut pas ça. Père est allé traiter un des problèmes à sa source, mais nous en avons d'autres ici. C'est pour cela qu'il ne faut pas avoir peur. Nous n'avons pas le temps pour ça. »

Robb se rendit compte qu'il parlait à un enfant et que ses paroles pouvaient sembler dures. Trop tard néanmoins, pour les retirer.

« Réfléchis à tout cela, mais nous en reparlerons, je le jure sur les Ancien Dieux, Bran. »

Après avoir fini d'atteler son frère, il grimpa lui même sur son cheval, donnant quelques indications à mestre Luwin qui s'était rapproché d'eux. Il lança ensuite l'allure du petit trot, suivi de près par Bran, et ils quittèrent le château de Winterfell en direction du Bois Sacré.

Un silence pesant s’était installé entre nous suite à ma gaffe. J’avais trop parlé. Le temps me paru une éternité pendant que Robb digérait l’information. Je baissais la tête vers le sol, honteux, les rougies par la gêne. Je sentais d’ici la colère de mon frère ainé, bien qu’il essayait de se maitriser. Ne pouvant m’empêcher de trembler, mon rythme cardiaque c’était accéléré et mon cœur s’était serré. Je n’avais pas voulu le mettre en colère, et surtout j’espérais que mes paroles n’auraient pas de conséquences. Mon but n’était pas de déclencher une guerre ou quoi que se soit d’autres.

La tête basse, mes yeux étaient remplis de larmes, qui pourtant ne coulèrent pas. Comment la situation avait-elle pu autant dégénérer ? Dire qu’il y a seulement quelques semaines, nous étions tous soudés, à rire, ou comploter pour ne pas assister à un banquet de formalité. Ces saletés de Lannister étaient entrain de déchirer notre famille. En plus de m’avoir tout prit, à moi. Non … il me restait encore quelque chose, ma famille, et ça, je ne laisserais rien ni personne me l’enlever. C’est pour ça que je n’avais rien dis. Je ne voulais pas d’une guerre, il y aurait trop de conséquences. Soudainement, je me sentis décoller de terre. Relevant la tête, je pu constater que Robb m’avait soulevé pour me mettre sur mon cheval, attachant les sangles avec des gestes un peu brusques, maitrisant mal sa fureur. Je le regardais sans dire mot, bien que peiné. A cet instant, j’aurais fait n’importe quoi pour le voir sourire. J’avais mal, si mal. Mon cœur me faisait souffrir. Secouant la tête, je repris mon air impassible avant de poser ma main sur celle de mon frère qui achevait de lacer les sangles.

« Robb …. Robb. Regarde-moi. Ca va d’accord ?! »

Mais malgré mes paroles qui se voulaient rassurantes, la colère de Robb ne se calma pas. Au contraire, voyant certainement le mensonge dans ma phrase, il me parla un peu trop durement, ce qui eu pour effet de me braquer, alors que me raidit sur mon cheval. Je n’avais pas l’habitude que Robb me parle de la sorte. Avec moi il était toujours prévenant et gentil, compatissant et juste. Pour moi, Robb avait toujours été un modèle à suivre, mon idole. Celui à qui j’aurais sans doute confié ma vie, car pour moi, il est aussi vaillant que Père. Une raison de plus de haïr les Lannister qui au cause des tensions changeaient nos comportements.

Restant silencieux un moment, à cet instant j’aurais voulu disparaitre, plutôt qu’affronter le regard de mon frère. Il pensait que je ne comprenais pas l’enjeu. Le temps n’était pas à la peur. Je ne suis qu’un enfant Robb, ne m’en demande pas trop. Je suis obligé d’avoir peur. Oui c’est vrai, j’ai peur. J’ai peur que quelqu’un revienne pour finir le travail. Peur de mourir, peur de ne plus jamais pouvoir marcher, peur de n’avoir aucun avenir. Oui, c’est vrai, tous les jours, je me demandais ce que j’allais devenir. Parce que pour le moment c’était gérable, je n’étais qu’un enfant, Hodor pouvait me porter et m’aider dans toutes les taches. Mais quand je serais adulte, est-ce que je serais toujours dépendant d’Hodor ? Comment est-ce qu’on allait me regarder ? Je serais la risée de tous, ou alors j’inspirerais la pitié. Comme pour Lord Thyrion, on se moquera de moi …. Indigne d’un Stark, la honte de la famille. Je ne serais plus rien tout simplement.

Encore une fois, je secouais la tête, ne voulant pas penser à tout ça. Robb se montrait dur, mais ce n’était pas pour me faire du mal, plutôt pour me faire comprendre certaines choses. Comme le fait que les Stark était une famille puissante et qu’on ne devait pas laisser ce geste impuni, c’était au final une question d’honneur et de réputation.

Toujours silencieux, je laissais mon frère terminer sa leçon de moral et s’installer sur son cheval, avant de prendre la route à petit trot. Mon cheval le suivi, calmement et lentement. Malgré le fait que je n’étais pas très assuré, je réfléchis tout de même avant de déclarer d’une voix forte et déterminée.

« Je ne parlerais pas ! Parce que si je fais, ça se terminera par une guerre ! C’est peut-être égoïste Robb, mais je ne veux pas que tu partes, parce que je n’ai plus que toi ! JE NE VEUX PAS QUE TU MEURS !!! »

Prit d’une soudaine impulsion, je fis courir mon cheval, qui galopa à tout allure dans la forêt, m’éloignant beaucoup trop de Robb. Echapper à la vigilance de mon frère n’avait pas été la meilleure de mes idées, bien au contraire. La scène se passa beaucoup trop rapidement pour que je puisse prendre conscience de ce qu’il se passait. Mon cheval fonçait droit vers un ours. Je tirais sur les reines mais trop tard. N’ayant pas le temps de freiner, le cheval percuta l’animal sauvage, qui se redressa de toute sa hauteur en le voyant arriver pour pousser ma monture, avant qu’il ne lui arrive malheur. Le cheval perdit l’équilibre et tomba sur le sol, moi avec. La selle que le lutin avait faite se détacha. Mon corps percuta le sol, et je rampais comme je pouvais, pour échapper à l’ours. L’animal n’avait pas encore sa taille adulte, mais tout de même, il pesait bien son poids et surtout, il était terrifiant. C’est alors qu’il se décida de se jeter sur moi, je poussais un crie d’épouvante, fermant les yeux.

« ROOOOOOOOOOBB !!!! »

Robb et Bran commencèrent à s'éloigner de l'enceinte de Winterfell, à cheval, au pas pour l'instant. L'héritier de Winterfell avait beaucoup en tête, et Bran venait de lui en rajouter. Que devait-il faire si les Lannister avaient poussé Bran? Devait-il crier à la guerre, prendre les armes pour défendre son sang, pour défendre son honneur? Il regrettait que son père soit si lion, lui aurait su comment agir. Lui avait des années d'expérience derrière lui, il savait que ce genre d'insinuations sans preuves ne tiendraient pas, et qui plus est, pourrait déclencher une guerre sanglante. Et puis, si Bran disait la vérité, personne ne le croirait. La parole d'un enfant d'une dizaine d'années contre un homme mûr et aguerri qu'était Jaime Lannister? Cela ne tiendrait pas une seule seconde. La justice n'avait rien à voir là dedans.

Robb se sentit serrer les poings sur ses rênes, impuissant face à la situation. Il ne pouvait rien faire tant que rien ne serait prouvé. Mais pouvait-on seulement prouver une telle chose? Etait-ce seulement la peine de s'y attacher? Trop de questions se bousculaient, si bien que lorsque Brna prit la parole, Robb faillit sursauter. Il lui livra son sentiment sur ce qu'il se passait, laissant Robb complètement pantois devant son discours poignant. Le futur gouverneur du Nord avait tendance à oublier qu'il s'adressait à son petit frère. Lui même ayant été propulsé dans le monde d'adultes très tôt, il pouvait faire en sorte que ce ne soit pas le cas pour Bran. Mais c'était difficile à présent, de faire la part de l'enfant et l'adolescent en lui tant on exigeait de lui des choses qu'il ne comprenait pas toujours. Soudain, le cheval de Bran le dépassa en vitesse, et Robb retint le sien qui était prêt à le suivre.

« BRAN! » hurla-t-il, dans l'espoir que ses paroles atteignent son frère qui avait déjà disparu derrière les arbres feuillus.

Robb vit Vent Gris passer en bas à toute vitesse, bondissant entre les obstacles pour se frayer un chemin jusqu'à ce qu'il disparaisse dans un buisson. Robb n'hésita plus et lança son cheval au galop derrière la piste de Bran. Les feuilles lui fouettaient le visage. Il entendit un cri, puis un hurlement, différent, comme s'il provenait d'une autre personne. Le feuillage diminua, et lorsqu'il retrouva son frère, ce fut un spectacle assez étonnant qui l'attendait.

Bran gisait au sol, appuyé contre un tronc d'arbre, visiblement sain et sauf, mais essoufflé. Son cheval piaffait, incontrôlable, ne tenant plus en place, poussant des hennissements apeurés. Les rênes pendaient le vide et amenèrent Robb à la scène suivante. Un ours, massif, était au sol. Le sang entourait ses membres, quelques gouttes avaient giclé, montrant qu'une lutte avait eu lieu. Et enfin, il releva les yeux pour apercevoir une ombre. Il sauta au sol, dégainant son épée, prêt à faire la peau à cet inconnu. Au vu de l'accoutrement, il n'était pas d'ici. Des peaux de bêtes, des cheveux longs en pagaille, attachés négligemment en quelques grosses tresses. Vent Gris fit quelques pas vers l'inconnu, puis leva la queue et s'approcha comme s'il le connaissait. Quelque peu désemparé, Robb détendit un peu son bras, levant néanmoins la voie pour demander:

« Qui es-tu? »

Il n'avait pas confiance. Et il ne savait pas ce qui s'était passé. Mais il avait le souvenir d'avoir accordé sa confiance aux Lannister, et tout cela pour quoi? Pour être remercié avec une nouvelle trahison? Alors non. Cette fois il ne commettrait pas la même erreur.

« Retourne-toi doucement, et laisse moi voir tes mains. »

Il se déplaça jusqu'à son frère, ne quittant pas des yeux l'inconnu.

« Est-ce que ça va? »

La scène s’était déroulée bien rapidement, trop rapidement pour que je puisse réaliser ce qu’il se passait devant moi. Allongé sur le sol, je fermais les yeux, attendant que les morsures de l’ours s’occupent de m’achever. Et pourtant, l’attaque ne vint pas. A la place, un crie surpuissant, qui faisait d’ailleurs drôlement penser au crie d’un loup retentit. Eté ? J’ouvris brusquement les yeux, qui s’écarquillèrent sous la surprise. Ce n’était pas mon loup Eté qui venait de faire son apparition, pas du tout même, mais plutôt une jeune « femme » qui hurlait, s’élançant vers l’ours. Celui-ci se prit d’ailleurs une lance. Je sursautais alors que son sang me tombait dessus, la bête étant au dessus de moi. En quelques secondes, la sauvageonne sauta sur le dos de l’animal, lui cachant le visage dans la cape qu’elle venait de retirer pour l’empêcher de me dévorer. La scène était tellement surréaliste. La jeune sauvage se battait telle une diablesse, avec force et vigueur, poussant des cries sur humains. A vrai dire je ne faisais plus attention à ce qu’il se passait autour de moi, je ne voyais qu’elle et la scène, au ralenti. Ainsi, elle n’avait pas du tout l’air humaine, mais plutôt d’une créature fantastique que je pouvais trouver seulement dans mes livres. Inutile de préciser que j’étais plus que fasciné.

Mais le gémissement de l’ours me ramena à la réalité. Elle venait de sortir un couteau pour l’enfoncer avec force dans la nuque de l’animal. Encore une fois, du sang s’échappa de la plaie dégoulina sur mon visage.

« Non, ne le tue pas !!!! »

Trop tard, l’animal s’effondra sur le sol, mort, inerte, dépourvu de toute vie. Je reprenais mon souffle, regardant la dépouille de l’ours puis la jeune sauvage qui venait de me sauver la vie. On se regardait dans les yeux pendant quelques secondes avant que son attitude change. Je lui faisais peur. Malgré mon jeune âge, je compris tout de suite pourquoi. Son allure montrait qu’elle ne venait pas de Winterfell mais peut-être plutôt de l’autre côté du mur. Elle n’avait donc rien à faire ici. Pourtant, elle m’avait sauvé la vie, je n’allais certainement pas la punir parce qu’elle n’était pas sur ses terres. Et même c’était le cas, étant infirme, je n’étais pas en position de faire quoi que se soit. Puis entre nous, c’était plutôt le travail de Robb en l’absence de Père.

Mes yeux se posèrent sur la plaie de la fille. Elle ne pouvait pas rester comme ça. La blessure pouvait s’infecter. J’essayais de me redresser, en vain. Oui, effectivement. J’avais l’espace d’un instant, oublié que mes jambes ne pouvaient plus bouger.

« N’ai pas peur … Je ne vais pas te faire de mal, je suis gentil. Je m’appelle Bran. Tu es blessé … il faut soigner ça. Approche, n’ait pas peur, je vais t’aider. »

Loin de m’écouter, la jeune femme prit soudainement une écharpe qu’elle noua fortement autour de son bras. Encore une fois, j’écarquillais les yeux, figés sur l’écharpe qui ne m’était pas inconnu. Mon rythme cardiaque s’accéléra.

« Jon …. »

Est-ce que … Est-ce qu’elle avait eu affaire à Snow ? Mon cœur battait de plus en plus vite et mon inquiétude montait. Jon. Est-ce qu’ils se sont battus ? Est-ce qu’elle l’a tué comme elle a tué l’ours ? Et ensuite volé son écharpe ? Hé oh, du calme Bran ! Pas de conclusion hâtive !!! D’ailleurs Vent Gris qui venait d’arriver m’empêcher de réfléchir d’avantage à ce raisonnement. Vent Gris suivit de mon frère !

« ROBB !!! »

Frère qui se montra d’ailleurs des plus méfiants à la vue de la sauvageonne.

« Attends Robb, elle n’est pas une ennemie, elle m’a sauvé ! »

Robb me demanda comment je me sentais, visiblement inquiet ? Un petit coup d’œil à me jambes montra que celles-ci étaient en sang, sans doute à cause de la chute que j’avais fait de mon cheval. Evidemment, je n’avais rien senti, mes jambes ne pouvant plus ressentir la douleur ou quoi que se soit d’autres. J’haussais les épaules.

« Je n’ai rien sentis … »

Est-ce que cette nouvelle blessure diminuerait mes chances de guérir ? Etrangement, je ne voulais pas savoir la réponse. J’essayais de me redresser toujours en vain. Eté, mon loup me rejoint et me regarda avec la même inquiétude que Robb. C’est vrai que j’avais toujours le sang de l’ours sur mon visage et mes vêtements. Je caressais doucement mon loup pour lui montrer que tout allait bien, mais quelque chose d’autre me préoccupais. L’écharpe de Snow.

Grognant doucement, je me jetais en avant, mon corps percutant le sol. Si je ne pouvais pas marcher, tant pis, j’allais faire autrement. Eté aboya alors que je me trainais jusqu’au sol jusqu’à l’inconnue qui m’avait sauvé la vie. Robb était certainement contre le fait que je m’approche, mais je n’avais pas peur. Si elle me voulait du mal, elle ne m’aurait certainement pas sauvé. Ignorant que je pouvais sans doute l’effrayée, je me redressais du mieux que je pouvais sur mes avants bras, avant d’agripper d’un coup sec l’écharpe de Jon.

« Où est-ce que tu l’as trouvé ! C’est à Grand Frère ! Cette écharpe est à Jon ! Robb, c’est à Jon ! »

Mes avant bras faiblirent et je retombais sur le sol, lâchant ainsi l’écharpe.

Robb grimaça à la vue de la blessure de son frère. Il avait beau ne rien n'avoir senti du à son handicap, ce n'était pas beau à voir, et il faudrait que le mestre regarde cela de plus près. Et cela entraînerait des questions, encore des questions. Robb se ferait sans doute taper sur les doigts pour avoir mis en danger Bran... Oh, mais en fait non. Père était absent. Ce qui le laissait complètement en charge. C'était en fait sa première vraie décision de gouverneur de Winterfell qu'il avait prise de laisser Bran sortir de l'enceinte de Winterfell. Elle était peut être mauvaise, mais c'en était une première. Il s'améliorerait, c'était certain. Mais il s'en voulait néanmoins d'avoir agi si stupidement avec la vie de son frère.

Bran lui répondit que tout allait bien, mais la vue de la blessure fit que Robb serra la mâchoire et sa main sur la garde de son épée, même si il voyait que l'inconnu n'était pas un danger. Il se retourna, obéissant à son avertissement, et Robb découvrit qu'il s'agissait en fait de Luna. Il avait rencontré la sauvageonne un jour par l'intermédiaire de Vent Gris, qui s'était lié d'amitié avec elle. Interloqué, il le fut, et il le demeura lorsqu'elle dit avoir vu Jon. Bran avait reconnu l'écharpe, ce qui fit ensuite réaliser à Robb que son frère avait peut -être raison. Il rengaina son épée, laissant Vent Gris trottiner autour d'eux trois, et de la carcasse de l'ours mort. Luna avait bondi vers Bran lorsqu'il avait tiré l'écharpe de sa main, en un réflexe tellement animal qu'il en était confondant. Vent Gris avait retroussé ses babines et hérissé le poil, plantant ses griffes dans le sol boueux. Tremblante, visiblement secouée, la jeune femme s’était ensuite confondue en excuses, en expliquant pourquoi elle avait cette écharpe. Robb fronça les sourcils.

« Tu l'as vu? Quand? »

C'était impossible. Soit elle l'avait vu sur le chemin lorsqu'il partait pour le mur, soit elle l'avait croisé après. Mais, elle était une sauvageonne, et lui un homme de la Garde de Nuit. Il devait avoir pris ses voeux maintenant. Comment se faisait-il qu'ils se soient rencontrés?

Robb s'approcha de son frère, faisant reculer la sauvageonne dont il se méfiait toujours un peu, surtout après ce nouvel épisode troublant. Il leva son frère du sol, se rapprochant du cheval qui avait fini par se calmer. Il le replaça dessus, tant bien que mal, pour qu'au moins il ne soit pas au sol. Il hésita à soigner la blessure du mieux qu'il pouvait, mais ses connaissances étaient on ne peut plus limitées. Il se tourna vers Luna.

« Les sauvageons font-ils des raids contre le Mur? Mon frère est-il en danger? »

Il ne se le pardonnerait pas. Il fallait envoyer au Mur tous les hommes possibles. Mais le Royaume était trop occupé à traiter les affaires autres pour s'occuper du Nord. Tout ceci allait dégénérer, Robb en était persuadé. Si seulement Père était là...

Ne tenant pas sur mes jambes, j’étais tombé par terre, tirant sur l’écharpe de la sauvageonne, où plutôt celle de Jon. La douleur avait fait crier l’inconnu, qui dans sa rage, me menaça de sa dague, prête à m’égorger. J’avais hurlé à mon tour sous la peur, les yeux pleins de larmes.

« ROBB !»

Mais la sauvageonne n’alla pas jusqu’au bout de son geste, prenant probablement conscience de l’acte qu’elle s’était apprêté à commettre. Elle recula subitement, le visage aussi terrorisé que le mien. Je baissais la tête pour ne pas montrer les larmes qui coulaient silencieusement le long de mes joues pâles. J’aurais voulu être fort et ne pas pleurer, mais je ne pouvais m’empêcher de trembler et de laisser exploser mes émotions. Je ne pense pas que ses larmes sont les conséquences de ce qu’il venait de se passer, mais que c’était un tout. Les derniers événements m’avaient beaucoup chamboulé et je craquais tout simplement. Mon « accident », la perte de l’usage de mes jambes, le départ de Père, Arya, Sansa et Jon, le stress évident de Robb, l’accident d’aujourd’hui. Tout ça, c’était trop pour moi. Je … Je ne voulais qu’une seule chose …

« Père … Père …. »

Mais j’aurais beau l’appeler Lord Stark n’était pas là. Du calme Bran, du calme, tu n’es pas tout seul. Robb est là … mon frère est là, Robb ! La sauvage se rapprocha doucement et me tendit la main. Avec la force de mes bras, je me trainais en arrière, loin d’elle, incapable de me calmer. Ce fut Robb qui m’attrapa pour me hisser sur le cheval. Il avait l’air très soucieux, le visage fermé. Il était en colère … Je le reconnais, j’étais allé trop loin, ayant mis ma vie en danger bêtement, et il se sentait responsable. De toute évidence, Robb regrettait d’avoir prit la décision de m’emmener avec lui, et ne retentera certainement jamais l’expérience. Je sentis mon cœur se serrer douloureusement, les larmes coulaient encore plus sur mes joues, bien que je baissais encore la tête pour ne pas trop le montrer, même si c’était évident. Mordillant mes lèvres, j’inspirais un bon coup pour me calmer, en vain. Je ne voulais pas que Robb me laisse. Depuis tout petit, j’avais l’habitude de passer beaucoup de temps avec lui, l’accompagnant dans ses balades, lui à cheval, moi à poney à l’époque. Parmi tous les Stark, Robb était celui avec qui j’aimais le plus rester. Je suis tellement désolé Robb, tellement désolé ! Mes mains se crispèrent sur la selle de mon cheval, alors que mon frère retournait vers la jeune tueuse d’Ours.

Il voulait savoir quand est-ce que la fille avait vu Jon. Jon … en danger ? J’eu un haut le cœur qui faillit me faire perdre l’équilibre. Mon corps fut parcouru d’un long frisson, alors que je me sentais si mal. Jon ne pouvait pas être en danger, non, c’était tout simplement inconcevable.

Je ne voulais pas que Jon risque sa vie, ni que Robb parte en guerre. La situation était déjà bien compliquée. Pourquoi depuis mon accident tout se dégradait ? C’était comme si je donnais mon malheur aux autres. A cet instant je maudissais mes jambes, et cette vie. Je me maudissais moi, d’être monté sur cette tour. Je maudissais cette vie qui me rendait si malheureux. Je maudissais toute personne qui oserait toucher à mes frères et sœurs … à ma famille.

« Jon …. »

Je laissais échapper un petit gémissement de frustration et de mal être. A cet instant, je ne voulais qu’une chose, courir. Courir jusqu’au mur et protéger Jon, bien que même si je n’avais pas été infirme cette tache s’avérait impossible.

Ca suffit, je ne supporte plus cette nullité ! Je n’ai jamais été aussi inutile, de toute mon existence. Ma colère me gagnait, ainsi que la frustration. L’envie de me battre pour protéger ceux que j’aime. Mais j’étais tellement désespéré. Je ne supportais plus cette condition. Alors que Robb portait toujours son attention sur la jeune fille, je m’efforçais de respirer calmement. Mes mains se crispèrent sur les blessures de mes jambes, où j’appuyais toujours plus fort, espérant ressentir la douleur, en vain. Pourquoi ? Pourquoi ça ne marche pas ? Je ne veux pas rester estropier !! Je ne veux pas que ma vie soit gâchée ! Pourquoi est-ce que je n’arrivais pas à me calmer ? Les épreuves trop récentes étaient encore trop dur pour moi, venir avait été une mauvaise idée, mais en même temps je ne voulais pas rester sans rien faire. Je voulais marcher ! Alors je marcherais !

Oui je marcherais ! Il le fallait !!!

Subitement, je me laissais tomber de mon cheval pour atterrir par terre. J’essayais de me relever, m’aider en m’agrippant sur un tronc d’arbre. Mais mes jambes refusaient d’obéir. Comment aider Jon si je ne pouvais même pas me lever ?! Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?! Respire Bran ! Tu peux le faire !

Je me trainais jusqu’à la sauvageonne pour m’agripper de nouveau à elle.

« S’il te plait ! Emmène-moi vers mon frère ! Emmène-moi vers Jon ! Je t’en prie ! Je vais marcher d’accord ? Je vais y arriver ! Alors laisse-moi sauver mon frère ! Je vais marcher, je le promets ! Je vais marcher, je ne serais pas inutile ! Je ne suis pas inutile …»

Mes mains se crispèrent sur le haut de la fille, épuisée, je posais ma tête sur elle, sanglotant toujours silencieusement. Je me devais de prouver mon existence, que je n’étais pas tout simplement, plus rien.

La jeune femme sembla se souvenir de quelque chose, et elle prit son temps pour répondre; ce qui rendit Robb encore plus impatient de connaitre la réponse. Pour qui le prenait-elle? Robb n'avait pas l'habitude qu'on lui oppose tant de résistance, c'était une première dans sa prime vie. Elle finit par lui répondre, semblant peu concernée par l’évènement tant sa mémoire en semblait approximative. Pourquoi Robb devrait-il la croire? Elle pourrait très bien lui mentir, là, être en train de tisser un horrible piège de mensonges simplement pour lui faire perdre du temps, ou gagner sa confiance, qui sait?

Elle répondit ensuite à sa deuxième question, confirmant les doutes du Jeune Loup. Oui, tous étaient en danger. Son ton sec trancha l'air, surtout lorsqu'elle confessa que le peuple libre n'était pas leur ennemi. Pourquoi est-ce que chaque fibre de son coprs l'empêchait de la croire? Elle avait une désinvolture dans sa façon d'être que Robb n'appréciait pas, et qui inspirait une méfiance. Mais elle avait un regard perçant, transperçant, intense qui vous happait tout entier. Etrange chose. Avant même que Robb ne put réagir, Bran s'était presque jetée à ses pieds, la suppliant de l'emmener avec lui voir Jon. Robb sentit son coeur valser contre sa poitrine.

La jeune femme lui répondit sèchement qu'il ne marcherait plus jamais, et que rien ne pouvait l'arranger. C'était ainsi. Sa fatalité n'amusa pas Robb, mais il ne pouvait nier une certaine vérité. Elle s'y prenait autrement, mais elle ne lui mentait pas. Ses prunelles croisèrent celles de Robb qui sentit un frisson remonter le long de sa nuque et hérisser ses poils. La proximité de cette sauvageonne avec son petit frère ne lui plaisait guère. Et pourtant, elle n'avait pas d'attitude agressive. Etaient-ce seulement des préjugés qui le poussaient à agir ainsi?

Bran, reviens vers moi.

Robb décida de faire un pas vers elle, et il rangea son épée.

Nous avons une dette envers toi, mais rien de plus. Nous ne sommes ni alliés, ni amis, pas alors que ton peuple traverse le mur sans relâche pour voler nos biens.

Il allait se préparer à partir, mais une question le turlupinait.

Ces ennemis dont tu parles, ce sont les Marcheurs Blancs, n'est-ce pas? Ne sont-ils pas que légende, qu'histoires pour effrayer les enfants du Nord?

Robb en avait entendu parler, évidemment. Lorsque l'hiver viendrait, ce qui ne semblait plus tarder à en écouter les mestres, les Marcheurs Blancs envahiraient Westeros.

« Tu ne marcheras plus jamais »

Des paroles prononcées avec une cruelle franchise, qui, l’espace d’un instant, glaça tout le sang qui circulaient dans les veines du petit Stark. Bran se figea, ses mains se crispaient sur les vêtements de la sauvageonne. La vérité, il la savait depuis son réveil, mais entre savoir et entendre, il y avait une grande différence. Des mots blessants qui ont pour but de ramener à la réalité toute personne qui se laissent bercer par des illusions. Mais Bran n’était pas ce genre de garçon. Ses supplications avaient été dictées par ce désespoir, la peur de perdre Jon ne pouvait malheureusement pas lui faire pousser des ailes. Bien sur qu’il savait que plus jamais il ne marcherait, il l’avait compris, mais pas accepté pour autant.

Les paroles de Luna continuaient de faire frissonner l’enfant, un frisson glacial très désagréable, alors que ses paroles faisaient revenir en lui des sensations et souvenirs qu’il avait enfoui au fond de lui. Le froid de la mort, il la connaissait. Oui, il l’avait senti le jour où on l’avait poussé de cette tour. Mais il s’était battu pendant des semaines, aidé par les loups, soutenu par Robb et Mère. Alors, il avait repoussé la Mort. Celle-ci était décidé de ne pas lui prendre sa vie, mais en revanche, elle gardait ses jambes. Infirme mais en vie. Devait-il s’estimer heureux ? Comme Bran l’avait dit à son frère a son réveil « J’aurais préféré mourir. ». Est-ce que c’était un discours qu’il tenait encore ? Non. Parce que ça signifierait être loin de sa famille, loin de ceux qu’il aime. La mort était un choix égoïste, mais rester pour ne pas être seul, l’était aussi. Est-ce qu’il était Bran l’Egoïste ? A moins que se soit « Rester, par amour ». Vu sous cet angle, c’était plus supportable.

« Je l’ai vu. Je l’ai vu la mort, je l’ai vu ce jour là. Et c’est un sort que je ne souhaite à personne ! Et encore moins à Jon ! »

Qu’est-ce qu’il pourrait faire pour sauver Jon ? Elle avait beau le prendre en pitié, Bran n’en démordait pas. Il sauverait Jon. Ce n’était pas négociable c’est tout. On ne laisse pas tomber sa famille. C’est une question d’honneur et de morale. Comme dirait Père, Jon n’a peut-être pas le nom de Stark, mais il en a le sang. Sa place était donc auprès d’eux.

« Tait toi ! Je suis un Stark, je suis capable de tout, je me surpasserais ! Je trouverais une autre solution ! La garde de nuit n’est pas sa famille, ce n’est qu’une illusion. Sa famille, c’est nous ! Sa famille, c’est Père, c’est Robb ici présent ! Sa famille c’est Arya, Rickon et Sansa ! Et je suis sa famille ! Et c’est ce lien indestructible qui me permettra de le sauver si jamais il est en danger. Notre lien est notre plus grande force. ….. C’est tout. Je n’ai pas besoin de jambes ou d’armes pour prouver ma valeur. On m’a poussé du sommet d’une tour et je suis toujours là, alors tu crois que ….. ….. »

Bran s’interrompit brusquement, se rendant compte de ce qu’il venait de dire, ou plutôt d’avouer devant Robb. Il posa son regard sur son frère, qui s’était approché entre temps, et se mordilla les lèvres. Bran, Bran … Tu parles trop ….

D’ailleurs, ce fut le tour du grand frère d’intervenir. Effectivement, Luna ayant sauvé le petit Stark, ils avaient une dette envers d’elle. Bran se demandait d’ailleurs comment il pourrait rembourser cette dette. Mais il ne pu pousser plus loin ses réflexions, car Robb attira son attention en parlant des Marcheurs Blanc. Un long frisson parcouru le corps de l’enfant, qui repensait soudainement à cet homme que Père avait exécuté, qui disait avoir vu les Marcheurs Blancs. Agrippant les vêtements de son frère, Bran essayait de se redresser.

« Robb … Cet homme délirait, Père a dit qu’il était pris de folie. Les Marcheurs Blanc ….. Ils … Ils n’existent pas ! »

Le jeune garçon n’était pas persuadé de ce que lui-même disait. A vrai dire, Bran croyait un peu à tout ce qui était légendes et contes. Mais si Père disait le contraire alors ….

« Robb s’il te plait, n’écoute pas ces fantaisies … Allons nous en … s’il te plait, allons nous en …. »