La montagne est belle, mais la montagne est sauvage, cruelle et traître.

La Garde Grise, la Garde Ailée, les Suzerains de Val, leur prisonnière, le Silure ainsi que la suite d’Ashara avaient quitté les portes de la Lune la veille en milieu de journée et avaient pu passer leur première nuit dans leurs tentes. Avec Lady Lysa, aux fers, et le grand nombre d’hommes, chevaliers ou reître et de femmes, servantes ou nobles dames qui se déplaçaient alors, à cheval ou en carriole, c’était plus simple ainsi. Aussi la brune n’avait pas prévu d’arrêt dans une quelconque Auberge ou même un des rares châteaux qui se trouvaient sur la route de Cordial. Et comme elle était pressée, elle comptait bien ne s’arrêter qu’à la nuit tombée. Mais voila, un orage avait éclaté et fait résonner le tonnerre de mille échos sur la roche, et la pluie diluvienne qui s’abattait maintenant sur la colonne ne laissait pas d’autre choix, il leur fallait un abri pour la nuit, et il fallait trouver cet abri au plus vite. Sur les capes de laine bleue ciel au Faucon et à la Lune blancs que portaient les hommes de la jeune femme, les couleurs du Val commençaient à se ternir et devenaient tristement grises. Hommes et chevaux courbaient l’échine capuches remontées sur le crâne, têtes enfoncées entre les épaules, crins dégoulinants et sabots dans la boue. Les bannières pendaient, telles de serpillières le long de leurs mats. Le métal de armures sonnait à chaque goutte qui tombait formant une symphonie funèbre telles les cloches annonçant la mort du Roi. Même Ashara n’avait plus son habituel port altier.
Après un rapide échange avec son époux qui, quelques instant auparavant lui avait dit de se mettre à l’abri dans le carrosse, ce qu’elle avait catégoriquement refusé, elle se décida à agir. Elle savait qu’il y avait une auberge un peu plus loin et cela lui avait été confirmé par son époux qui connaissait bien évidemment mieux le chemin qu’elle, bien qu’elle en sache long sur sa région et sur ses routes qu’elle avait beaucoup sillonnées.

« Sers Neraron, Dimedes, Selered et Torval. Filez en avant aussi vite que le permettent vos monture et prévenez de notre arrivée à la prochaine auberge. »

Lyonel leva alors la main et ordonna : « Au trot. »  A mesure que l’ordre était relayé aux cinquante membres de l’escorte, tous se mirent à l’allure demandée en espérant que les éclaireurs reviennent avec une bonne nouvelle.


Quatre chevaliers arrivèrent au galop dans la cour de l’humble auberge et s’arrêtèrent en hâte avec force hennissements de la part de leurs montures poussées à bout. Puis, mettant pied à terre et laissant aux garçons d’écurie le soin de les mettre à l’abri, ils entrèrent dans la salle à manger presque vide. La chaleur de l’endroit était douce à leurs corps détrempés, la bonne odeur de porc rôti donnait l’eau à la bouche, le feu dans l’âtre promettait la meilleure des soirée, mais ils n’avaient pas le temps de se reposer. Le plus vieux, cheveux mi longs et barbe taillée, tous deux blanchis par les années, tout recouvert d’acier et épée à la ceinture s’avança vers la première employée qu’il croisa et lui expliqua à voix basse de quoi il retournait. Les trois autres observaient la pièce à la recherche du moindre danger, échangèrent un signe de tête et deux d’entre eux ressortirent aussitôt dans un grand courant d’air humide. Ils allaient avertir le reste de la troupe qu’une auberge pouvait les accueillir à quelques kilomètres de là. Près de la porte, restait un homme entre deux âges, brun aux cheveux rasés très courts dont la moustache et le bouc dissimulaient maladroitement plusieurs cicatrices. Les employés de l’auberge s’agitèrent soudain, les uns pour aller préparer les chambres, les autres pour le souper. Il n’y aurait pas assez de lits pour tous, la grande salle et les écuries conviendraient pour les autres, mais pour ce qui est de se sustenter, on ne pouvait pas donner le foin des chevaux aux hommes qui les montaient.

Une dizaine de minutes plus tard, un jeune garçon tout aussi trempé que les autres entra et annonça d’une voix qui se voulait forte mais qui en réalité était mal assurée.

« Lord Lyonel Corbray-Arryn, sire des Eyrié et Défenseur du Val. Lady Ashara Arryn-Corbray, Dame suzeraine du Val et de la montagne. »  

Le seigneur annoncé et sa dame firent leur entrée aux cotés d’une bonne des Chevaliers de la Garde Ailée dont l’un de ceux qui étaient apparu un peu plus tôt. Evidemment, tous les occupants de l’auberge, employés et clients, se mirent à genoux, enfin Ashara était bien trop frigorifiée pour remarquer si l’un d’eux ne le faisait pas. Elle portait une robe simple en soie verte foncée ainsi qu’une tunique fendue en cuir et cotte de maille avec un gorgerin et des épaulettes renforcés de cuir clouté. Par-dessus, elle avait une cape de fourrure grise avec les rayures typiques des Lynx des montagnes. Elle retira sa capuche et en remontant légèrement ses mains, paumes vers le ciel, parla à son tour :

« Relevez-vous honorables Valois. Je ne puis que me féliciter que l’orage me force à partager humblement cette auberge avec vous. Nous sommes néanmoins fort nombreux, je vous demanderais donc de nous faire assez de place pour que ceux qui ont jurés de vous protéger puissent se reposer. »

Les tombereaux qui transportaient ses robes ainsi que ceux qui transportaient ses suivantes et ses servantes n’étaient pas encore arrivés car ils ne pouvaient aller trop vite sur les routes rendues glissantes par le déluge. Elle décida donc de s’installer au coin du feu pour se réchauffer le temps de pouvoir mettre des vêtements secs, elle s’avança donc dans cette direction, bien évidemment accompagnée de ses chevaliers. Cependant, l’un de ceux qui s’y trouvait déjà ne prit pas très bien le fait que Ser Barristan, un puissant jeune homme blond barbu le force à quitter sa place. Et évidemment avec le Tallett, cela avait dégénéré et l’inconnu se retrouva rapidement devant la Suzeraine, empoigné par le col, et entouré des autres chevaliers qui avaient tous la main à la garde de leur épée.

Cependant, si Barristan aimait bien faire du zèle pour mettre à l’épreuve sa force et ses talents de bretteur, il avait aussi un grand sens de l’humour, un gout prononcé pour l’alcool et une très grande complicité avec Lady Ashara qui lui passait tout. Ainsi, une fois entendues les paroles de l’homme qui ne semblait pas si saoul que ça à son gout, sans le lâcher, il regarda la jeune femme avec un sourire et demanda :

__ Il a refusé de se lever pour vous Ma Dame, voulez vous que je lui arrache la peau du cul pour qu’il ne puisse plus jamais s’asseoir ou pouvons nous offrir à ses pauvres gens une tournée générale. »
__ Est il nécessaire que vous soyez systématiquement grossier Ser Barristan ? »
__ Il a été fort grossier aussi, mais je ne saurais vous rapporter ses paroles, elles ne sont pas dignes de vous, cependant qu’il essaye, on pourrait bien se marrer. »  Termina-t-il en replongeant son regard bleu foncé dans celui de l’homme.

Ashara piaffa en soupirant avait plus ou moins entendu ce qu’avait dit l’homme qui effectivement était probablement encore plus grossier que ce qu’avait dit Barristan. Elle n’aimait pas cela et ne le tolérait pas dans ses rangs, mais voila son cher et tendre, lui, s’en fichait royalement. Il posa donc une main sur l’épaule de sa jeune épouse qui était en train de s’énerver et dit :

__ Pardonnez ma Charmante épouse, elle est exténuée et a besoin de se réchauffer et Ser Barristan aime bien se prouver qu’il est le plus fort d’entre nous. Vous devriez être honoré qu’il vous ait choisi pour relever le défi. Et puisqu’il est si prompt à vouloir offrir à boire à tout le monde, hé bien qu’il paye la première tournée alors ! »

Barristan sourit et lâcha le mercenaire avant de lui faire un signe de tête amusé et de lever la main en gueulant : « Tournée générale ! »

Ce à quoi tout le monde répondit par des hourras, lâchant alors épées ou haches pour les choppes qu’apportaient une serveuse tout à fait appétissante qui se prit quelques mains au cul au passage. Heureusement, Ashara était en train de s’asseoir à coté de l’âtre et elle ne remarqua rien. Lyonel s’installa à son tour à coté d’elle, puis les autres chevaliers servis, sauf Barristan et Creighton, un brun un peu moins imposant physiquement que son ami, mais nettement moins souriant et qui semblait bien plus digne et froid. Il ne buvait d’ailleurs pas, contrairement à son acolyte blond qui après avoir violemment collé une choppe entre les mains de l’homme qu’il venait de malmener, en avait pris deux dont une qu’il s’était envoyée d’une traite avant de la reposer sur le grand plateau que la jeune femme bien en chair trimbalait et qui était déjà vide.

Ce petit accrochage avait donné le temps aux retardataires d’arriver, et bientôt, les femmes, dont Ashara montèrent se changer. Une bonne occasion pour les hommes de se lâcher un peu...

Les suivantes d’Ashara avaient dues voyager sur leurs montures, en effet, l’un des tombereau de la Suzeraine avait dû être réquisitionné entièrement pour Lady Lysa et le petit Robert. Fermé à clé, il était gardé par le Silure, quelques chevaliers et hommes d’arme qui avaient en charge la sécurité de la prisonnière et qui devait faire en sorte qu’elle ne s’enfuit pas.  Normalement les femmes étaient, pour les longs trajets, dans le carrosse, sauf la brune qui détestait ça et préférait rester à cheval pour tout un tas de raisons qui échappaient à la plupart des gens ici présents, quitte à faire une petite entorse au protocole. Elle était bonne cavalière, elle n’aimait pas ne pas être maître de son transport, elle n’aimait pas être secouée sur les routes parfois escarpées du Val. Elle pensait qu’il était plus simple ainsi de fuir en cas de problème, même si elle était effectivement plus exposée, cela dit elle avait une tenue en conséquence.  Et enfin, elle avait appris de ses années d’Intendance deux choses, d’une part l’importance du moral des troupes, et d’autre part à se mettre à leur place. Aussi, si elle ne se battait pas car elle restait une Lady, elle savait qu’elle exigeait beaucoup d’eux, et voulait le vivre avec eux, ainsi elle se rendait plus facilement compte de leur fatigue et des difficultés rencontrées. De plus, elle aimait se passer de voiture quand c’était possible et pour ça, elle avait intérêt à être habituée à passer des journées entières à cheval sans avoir le cul en sang. Ca lui était souvent arrivé quand elle était plus jeune, avant que ses fesses délicates ne soient habituées et avant qu’elle ne trouve quelques stratagèmes pour les protéger à savoir, des braies portées sous ses robes.

Quoi qu’il en soit, Ashara avait eut le choix entre la carriole de vêtements - impossible de la vider, elles auraient toutes besoin de leurs plus belles tenues pour Port-Real et les affaires des Chevaliers devaient aussi être du voyage – celle des servantes, qui alors auraient dû marcher à pied car elles n’avaient pas de chevaux ce qui aurait considérablement ralenti le convoi – et celle des suivantes. Le choix avait été vite fait, même si dans l’absolu elle aurait avec plaisir laissé Lysa marcher derrière elle, attaché à son palefroi, pieds nus dans la boue, jusqu’à ce que mort s’en suive. Sauf qu’il fallait encore que cette catin soit en état de parler à Port-Real, et si possible présentable au Roi, de plus, cela n’aurait certainement pas plut à Brynden. Or si elle lui avait confié la sécurité de sa nièce, c’était bien pour être certaine que ce genre d’abus serait évité, et aussi pour prouver sa bonne foi et gagner la confiance du Silure.

La brune était désolée de leur avoir fait subir ça et si elle y avait pensé au moment ou l’avant de la colonne avait forcé le pas pour rejoindre l’auberge et se mettre au sec au plus vite, elle leur aurait dit de la rejoindre. Mais d’ailleurs pourquoi étaient elle tant à l’arrière ? Ah oui, elle leur avait demandé de la laisser seule avec son époux, pour pouvoir discuter vec lui et faire ainsi plus ample connaissance. Car même si elle commençait doucement à le comprendre, il y avait encore des milliers de choses qu’elle ignorait, ou en tout cas, trop de choses déformées par la rumeur et les médisances. Elle ne savait pas même s’il aimait autant chasser que se battre, elle l’espérait, pour pouvoir partager cela avec lui puisque, moins encore qu’auparavant, elle ne pourrait pas s’afficher avec une épée en tant que son épouse. Hélas, cette pluie avait quelque peu interférée dans leur conversation. Mais maintenant, ils étaient tous au sec, même Lady Lysa qui était arrivée depuis peu. Après quelques signes de tête échangés entre Neraron Vanbois et Ronan Froideseaux, elle fut menée à travers la grande salle à manger et conduite directement à une chambre suivie de près par son fils. Elle y serait recluse jusqu’au matin et sous bonne garde.

La brune se retourna et vit arriver avec plaisir ses suivantes et ses domestiques, gage qu’elle allait bientôt pouvoir enfiler des vêtements secs. Elle se leva donc et prit congé des hommes présents avec un léger hochement de tête.

__ Messers. Mon Seigneur Epoux, permettez moi de monter me changer. Désirez vous que les femmes redescendent ensuite ou que nous restions dans nos chambres ? »

Lyonel fut quelque peu étonné par cette demande, Ashara avait l’habitude de n’en faire qu’à sa tête, il le savait et la voila qui demandait si elle pouvait revenir. Tout bien considéré, peut-être qu’avec tous ces hommes, elle ne se sentait pas tout à fait à sa place, elle y était pourtant habituée, et ce depuis des années. Mais désormais elle était mariée, alors cela changeait tout. De toute façon, il avait trop envie de l’avoir à ses côtés pour l’obliger à rester enfermée dans sa chambre jusqu’au lendemain, et puis quelle tristesse de lui infliger ça !

__ Mais bien sûr ma… Dame. Revenez dès que vous serez au sec. »

Ashara regarda Moira avant de designer son époux d’un brusque mouvement de tête, la camériste demanda alors au Lord s’il désirait aussi se changer ce à quoi il répondit non. La brune fronça les sourcils mais s’abstint de tout commentaire, s’inquiétant tout de même pour la santé de son époux alors qu’elle se dirigeait doucement vers l’escalier avec sa suite. Les filles étaient précédées de Ser Creighton, Ser Torval, Ser Jasper Ruthermont et Ser Marwyn Belmore deux nouveaux venus dans la Garde Ailée qui ouvraient la voie pour se poster à la porte de la chambre d’Ashara où la brune et ses suivantes se changeraient. Les servantes d’Ashara montèrent des robes sèches pour les suivantes pendant que l’une d’elle demandait de l’eau chaude pour qu’elles se débarbouillent si elles le souhaitaient.

__ Je suis désolée Yzi, j’aurais préféré qu’il en soit autrement, mais je n’ai pas le choix. Cependant, s’il pleut encore demain quand nous repartirons, tu pourras prendre place avec les servantes. Cette option ne va peut-être pas te plaire, mais tu seras au sec au moins. Et c’est valable pour vous toutes ! Mais je souhaite arriver à Cordial au plus tôt. »

Ashara se débarbouilla avec l’eau chaude et plongea ses mains gelées dedans pour les réchauffer, ça la brulait presque, mais c’était follement agréable de sentir de nouveau ces doigts. Quand elle laissa la bassine aux autres, ses mains et le reste de son corps avait à peu près retrouvé une température normale, elle se sécha et se dirigea vers sa malle de vêtements.

__ C’est un vrai casse tête d’être une femme mariée, je ne sais pas quoi me mettre. Si je suis mal habillée je ne lui fait pas honneur et si je manque de pudeur dans mes tenues je lui manque de respect. Je ne voudrais pas le rendre jaloux, mais je ne voudrais pas non plus qu’il cesse de me regarder et me préfère une autre femme. Qu’en pensez vous… j’hésite… »


Pendant ce temps en bas, heureux d’être au chaud et au sec et le gosier désaltéré, les hommes trinquaient en riant. Une jolie serveuse portaient des plateaux remplis de choppes de bière se faufilant avec grâce entre les tables et les bancs pendant que le maitre des lieux veillait au grain et que sa femme, plus que plantureuse aidait elle aussi au service. Un petit homme sortit alors des cuisines en claudiquant et entreprit de compter le nombre de convives avant d’abandonner au bout de dix avec un geste d’énervement, se disant qu’ils étaient trop nombreux et qu’ils bougeaient trop. Il jeta un coup d’œil désespéré à son patron  qui hocha la tête comme pour dire qu’il n’y était pour rien, mais bientôt, un doux fumet  de cochon rôti s’échappa de l’arrière salle. Les nombreux fils des propriétaires de l’auberge courraient entre les chevaliers et s’arrêtèrent devant Lord Lyonel, certainement impressionnés par sa cicatrice et sa carrure.

__ Dites M’sire, vous z’êtes fait ça comment ? » Demanda le plus âgé d’entre eux après un petit temps d’hésitation pendant lequel il rassembla tout son courage pour oser parler au Suzerain du Val.
__ En corrigeant un petit malandrin gamin. » Répondit Lyonel en riant à gorge déployée. Tous les autres gosses prirent la fuite en hurlant, comprenant que c’était un jeu, mais ayant tout de même un peu peur. Mais le jeune adolescent ne broncha pas.
__ Z’êtes le Noire-Epée, je sais. Parce que votre épée est spéciale. On dit aussi que vous êtes fort comme deux hommes. Z’avez fait la guerre ? Moi aussi je veux faire la guerre. Quand je serais grand, je serais chevalier. »
__ Voyez vous ça ? Le gosse veut être chevalier ! L’un de vous a-t-il besoin d’un écuyer ? Assieds-toi gamin, et… tiens, prends à boire. Tu t’appelles comment ? »
__  Dickon M’sire »
__ Je vais te raconter quelques histoires et si tu n’as pas changé d’avis et que ton père est d’accord on te trouvera bien un place. »

Le garçon buvait les paroles du Corbray comme si c’était du petit lait tout en dégustant avec forces grimaces qu’il tenait de cacher la bière trop forte pour lui. Will et Chardon s’étaient assis par terre à côté de lui et écoutèrent, et peu à peu tous les gamins de l’auberge firent de même. Ainsi, Lyonel se prit à raconter ses batailles à une assemblée de gosses qui le mangeaient des yeux, et aussi à essayer de faire un peu attention à son vocabulaire du coup, et à éviter soigneusement le sujet des femmes.  

__ Edric, tu sais où est Alys ? Je l’ai vu quitter les écuries mais impossible de la trouver ici. » Demanda Ulric, l’épée lige de la jeune Shett qui était un simple homme d’arme, mais quelqu’un de bien au fond, même s’il prenait parfois sa tâche un peu à la légère prétextant qu’avec tous els chevaliers et reitre présents, il ne pouvait pas arriver grand-chose à sa petite protégée.
__  Elles sont montées se changer je crois. » Répondit alors Ser Adam Rogers, garde de la Grandison qui venait de trinquer avec Sigfryd Templeton, chargé de la sécurité de Nyella Belemore.
__ Elles sont gardées par les Gaaardes Ailéééés, wouuuuuuuuuuh. Elles sont en sécurité et nous, on peut profiter de l’alcool et des femmes ! » Ajouta ce dernier d’un air moqueur ce qui lui valut quelques regards noirs des autres membres de la garde ailée présents non loin de là.
__ Des femmes ? Y’en a pas assez si tu veux mon avis… »

__ Evidemment, elles ne savent pas monter, aussi n’avons-nous pas d’autre choix, j’espère simplement que cette pluie ne durera pas ! »

Ysilla ne s’abaisserait jamais à voyager avec les servantes, elle tiendrait bon, pour Alys et les autres, Ashara n’en était pas aussi certaine, d’ailleurs, la Belmore ne répondit pas. Enfin tout ceci importait peu tant qu’ils avaient un endroit où se réchauffer et se laver le soir, mais il fallait espérer que se soit possible si le mauvais temps perdurait. Quand aux humeurs de sa tante, Ashara y était habituée, elle laissa donc couler tout en enfilant une tunique sèche le temps de choisir sa tenue.

__ Naturelle, oui, mais il faut quand même que je m’habille. Déjà que je ne prends pas le temps de me coiffer, ni même de prendre un bain brûlant ce qui, vu mon état, n’aurait pas été de refus. Je ne veux pas laisser les hommes trop longtemps tout seuls en bas. »

Ashara trouvait la tenue d’Alys très bien, mais pour Alys, et celle d’Ysilla très bien, pour Ysilla. Mais elle, elle était la suzeraine du Val, que penseraient ces gens si elle redescendait vêtue d’une simple robe de lin ? Que les caisses étaient vides ? Qu’elle se fichait d’eux ? Qu’elle les représenterait à Port-Real vêtue comme une roturière ? De toute manière il faisait bien trop froid pour s’en contenter.

__ Rouge ? N’est-ce pas  un peu osé ? Oh et puis oui, après tout, se sont les couleurs de mon époux, tu as raison, se sera parfait pour lui faire honneur. »

La brune enfila donc la fameuse robe bordeaux en velours. Pour le coup, aucun décolleté, la robe montait jusqu’en haut du cou. Elle était très ajustée sur la poitrine et jusqu’à ses hanches, attachée par des boutons dorés, ce qui, sans rien montrer, suggérait ses formes féminines. En bas elle était très large et très longue ce qui l’obligeait à la tenir pour marcher. Elle lâcha ses cheveux et après les avoir brossés Fanya ramena les mèches des cotés derrière sa tête avant de les y fixer avec un peigne en bronze. Pendant ce temps, Moira aidait Ysilla à se déshabiller, il restait Sienna et Gwen pour les trois autres suivantes, mais leurs robes étaient nettement moins compliquées à enlever, et puis de toute façon, Ashara était déjà aimable de leur prêter ses femmes de chambre. Tout le monde fut bientôt rhabillé de sec et s’apprêtait à redescendre.

__ Je pense que s’ils parlent de femmes, ils ne parlent pas de femmes vierges Ysilla, et si je ne le suis plus, je n’ai connu d’autre homme que mon époux, aussi, je doute que les hommes aient à dire sur nous. »

Elle regarda un instant Sienna, sachant très bien que cette dernière était loin d’attendre le mariage et fit un sourire à Alanei qui, sans qu’elle en soit certaine car cette dernière faisait preuve d’une grande discrétion, ne lui semblait pas toujours très pudique. Qu’importe, la Jouvencelle reconnaîtrait les siennes. Mais en réalité en bas, cela buvait, parlait de gueuses effectivement, et surtout, pour Lyonel, il était question de guerres.

Sur ces mots, Ashara et sa suite redescendirent lentement à cause de sa robe qui était véritablement très longue. Elle fut étonnée de retrouver son époux en train de raconter ses faits d’arme à une bande de gosses qui le regardaient comme s’il était le Guerrier lui-même. Que les Sept soient bénis, il fera un père extraordinaire pour ces fils, faites que j’en ai, de très nombreux fils. se dit elle en le voyant ainsi avant de se rendre compte que certains d’entre eux avaient des bières. Elle fronça les sourcils un instant, mais elle trouvait ça beaucoup trop adorable pour s’énerver et se contenta donc de soupirer en regardant tour à tour Lyonel et le dénommé Dickon qui peinait à terminer sa boisson. De toute façon, elle ne lui ferait aucune remontrance devant ces hommes, qui, nombreux autour de lui, trinquaient au souvenir de certaines batailles et écoutaient ou racontaient à leur tour leurs exploits.

__ Vous fabulez messire, vous n’avez échappé à l’embuscade que parce que vous étiez parti chier à l’écart du campement ! »
__ Peut-être, mais je vous ai évité de finir tous embroché sur leurs lances émoussées ! »
__ Je ne vous retire pas cela, mais si j’avais autant mangé et bu que vous la veille, s’aurait pu être moi ! »
__ Encore faudrait-il que tu aies la même descente ! »
__ Et le même estomac ! »

Les hommes et les enfants éclatèrent de rire, mais cela ne fit pas rire labrune un seul  instant. Cependant, malgré la vulgarité des propos échangés, elle mourrait d’envie de s’installer à côté du Noire-Épée et de l’écouter à son tour, blottie tout contre lui. Mais il semblait évident qu’elle le gênerait plus qu’autre chose, surtout si ses suivantes commençaient aussi à bavasser de bien d’autres sujets.

Après avoir appelé Mestre Udo d’un signe de main et lui avoir glissé quelques mots à l’oreille, elle passa derrière lui et effleura discrètement sa nuque du bout des doigts, juste pour lui signifier qu’elle était là et qu’elle l’aimait. Puis elle alla s’asseoir près du feu, mais de l’autre côté avec ses Dames.

__ Vous voyez, ils ne parlent pas de nous, ils parlent d'eux même... » Sourit-elle en jetant un coup d’œil à son époux avant de se détourner de lui de manière ostentatoire. « Une belle bande d’egocentriques en somme ces hommes, que pouvons nous bien leur trouver pour les aimer de tout notre cœur malgré leurs défauts. Enfin, qu’importe, d’autant que je parle à d’innocentes jouvencelles qui ne savent rien des choses de l’amour. J’espère en tout cas que vos époux seront aussi attentionnés que le mien, c’est tout ce que je vous souhaite. » Elle s’approcha d’Ysilla et Alys et murmura : « Et je compte bien faire en sorte que ça soit le cas. Mais tenez votre langue, il ne faut surtout pas dire à vos pères et frères, ni à mon époux, que je m’immiscerais dans ces histoires d’homme pour vous garantir, si ce n’est l’amour, au moins l’affection qui vous est due en plus, évidemment d’un rang et de revenus adéquate à votre nom de naissance. » Elle sourit d’un air carnassier et reprit « Pourquoi ne pourrions nous pas tout avoir, ou en tout cas tenter notre chance en ce sens. »

Pour sûr il n’y avait pas assez de femmes pour tous ses hommes, de plus, les personnes qui connaissaient bien Ashara savaient qu’il fallait opérer en toutes discrétions et avec un minimum de courtoisie quand on portait les couleurs du Val. Mais ça n’était pas le cas de tous les Chevaliers et reître présents, et tant que la brune suzeraine ne regardait pas, on pouvait se permettre quelques mains au panier. Tant que les filles ne se plaignaient pas, tant qu’elles vous envoyaient leurs regards coquins, c’était que tout allait bien, même si le patron ne voyait pas cela du même œil quand cela concernait ses propres filles.

La remarque d’Ysilla au sujet de la pluie fit rire Ashara, elle reconnaissait bien là sa tante, à vouloir avoir une quelconque autorité sur la météo, elle aurait bien fait exécuter les nuages, mais elle n’en avait hélas pas le pouvoir. Enfin, qu’importe, le plus importante était de pouvoir se réchauffer désormais et rester au sec au moins pour la nuit, et si le lendemain il fallait repartir sou la pluie elle le ferait, sans broncher, quant aux suivantes, elles pourraient toujours se mettre à l’abri, elle se débrouillerait pour mettre Lysa avec les servantes, ou peut-être même les servantes à pieds, même si cela risquait peut être de les ralentir un peu trop.

Ce soir, tout le monde mangerait à sa faim dans cette auberge, sur ordre d’Ashara, passé au tavernier par le Mestre, des assiettes avaient été ajoutées pour les enfants et les autres clients. Pendant qu’Ashara prenait place sur une des imposantes et longues tables en bois, réservant la place à sa droite à son époux, on servait déjà la soupe fumante. Ça ne serait pas un banquet de mariage avec des plats compliqués et exotiques, mais au moins il réchaufferait les corps et serait nourrissant. D’ailleurs, tout le monde avait faim, et cela s’entendait au relatif silence qui régnait dans la grande salle alors que quelques instants auparavant, les bruits des bancs et des tables s’étaient soudain ajoutés à ceux des rires et des conversations tonitruantes. Quelques entretiens subsistaient à voix basse, mais une fois qu’Ashara eut frappé la table avec sa fourchette, tous se turent.

__ Merci à notre hôte pour ce bon repas qui s’annonce, et la nuit douillette qu’il nous offre, bon appétit à tous ! »

Et les bribes de dialogues qui reprirent furent bientôt couvertes par les bruits de cuillère aspirées, de choppe qu’on pose, d’écuelles qu’on racle. Ashara mangeait avec plus de distinction que la plupart des hommes présents. Mais elle ne leur en tenait pas rigueur. Trop habituée à leur manque de tenue mais consciente qu’ils n’étaient que des hommes, et qui plus est des guerriers qui avaient plus l’habitude de manier l’épée que la cuillère. Elle, elle avait été éduquée pour être et paraître parfaite en tout point, digne de son rang et de son nom ainsi que des plus belles cours de Westeros et des plus fastueux banquets. Eux ils étaient là pour se battre, pour la protéger et protéger Lyonel, pas pour faire des courbettes et devenir des précieux alors même qu’ils portaient encore leurs armes à la ceinture.

__ Cette soupe est excellente, n’est-ce pas Ysilla, ça fait un bien fou de manger quelque chose de bien chaud après une telle journée. »
__ La soupe c’est bien, mais j’espère qu’on aura de la viande après, parce que manger liquide, c’est pour les gosses et les impotents, pas pour les hommes, n’est-ce pas Messire Lyonel ! »
__ Vous regretterez vos paroles quand vous serez vieux et impotent messer Barristan. »
__ Je compte bien mourir avant, dans un geste héroïque pour sauver Ma très chère Dame. »
__ Cela ne vaut pas la tourte aux pigeons, c’est un peu mince comme repas de mariage. »
__ Mon repas de mariage était très bien Messer Creighton, avec ou sans tourte, je me suis régalée. »

C’était faux, la brune n’avait presque rien mangé, elle avait eut la nausée toute la soirée, craignait la cérémonie du coucher et ce qui allait se passer ensuite, à tort. Quoi qu’il en soit, elle ne se souvenait même plus du menu, détail dont elle se rendit compte avec stupeur. Que dirait-elle dont à ses filles et à ses fils quand ils poseraient la question ? Et comment rappeler par un plat ce mariage finalement si merveilleux lors de ceux de ses enfants ? Mestre Udo devait s’en souvenir lui, elle lui poserait la question quand ils seraient seuls, il n’était pas question que le Noire-Epée pense, à cause de cet oubli, qu’elle se fichait de leur mariage, et encore moins d’avouer sa faiblesse devant tout le monde.

__ Mouais, surtout pendant la nuit de noce, si je ne m’abuse. » Ajouta alors Barristan en riant.
__ Ser Barristan ! »
__ Pardon, c’est juste que… vous allez si bien ensemble tous les deux, vous semblez si… amoureux, je pensais que je pouvais me permettre de plaisanter un peu. »
__ Non, quoique vous ayez entendu, je vous prie de ne pas me mettre dans l’embarras avec de tels propos. »
__ Bien, veuillez m’excuser. »

Le grand chevalier était tout penaud, il se disait que cela prouvait au moins qu’elle n’était pas frigide ce qui était une excellente nouvelle pour Lyonel, qu’il aimait bien désormais et pour le Val tout entier après tout, mais il n’osa rien ajouter, se contentant d’un regard à son Suzerain.
Ashara se rapprocha de l’oreille de son époux et chuchota :

__ Mon seigneur époux, Ysilla me demandait tout à l’heure si vous parliez de nous, je sais maintenant que ça n’était pas le cas et peut-être est-ce mieux ainsi. Mais je dois avouer que, bien que tout le monde le sache, j’aimerais que le sujet de vos conquêtes passées ne soit pas évoqué trop souvent et surtout pas en ma présence. »

Elle regarda ensuite Ysilla et s’approcha d’elle pour lui murmurer quelques mots.

__ Ais-je donc fait tant de bruit que cela ? »

Les servantes mangeaient avec les enfants près du feu, les reîtres et les mercenaires à une autre table et seules les suivantes à gauche d’Ashara, la Garde Grise à droite de Lyonel et les Chevaliers les plus proches d’Ashara ainsi que Mestre Udo. A l’étage, les deux hommes chargés de garder Lady Lysa, avaient eux aussi eut à manger et une choppe de bière pour faire glisser et la traîtresse avait aussi été servie.

En bas, les filles se faisaient des messes basses pour que les hommes n’entendent rien de leur conversation, mais ils étaient de toute façon trop occupés avec leurs conversations qui d’ailleurs commençaient de plus en plus à n’être point adaptées à de chastes oreilles

__ Grand et fort oui, et juste, et digne. Je sais parfaitement ce que tu veux Ysilla, je voulais la même chose et n’ai-je pas été comblée ? En plus, il est beau, gentil et doux, même si j’aimerais qu’il se coiffe un peu mieux les cheveux… Enfin bref, tu sais que je ferais tout ce qui est en pouvoir pour te satisfaire, même si se sera probablement Lord Yohn qui choisira pour toi. Cela dit je ne doute pas qu’il fera le bon choix, sans compter que les prétendants ne doivent pas manquer, belle et bien élevée comme tu es. »

Alys répondit à son tour et tout en écoutant elle posa les yeux sur Creighton Trop haut rang puis sur le Melcom. Elle hocha la tête et sourit.

__ Donc riche aussi, un noble si possible ou plutôt un riche marchand ou un artisan ? Très franchement après avoir été ma suivante pendant si longtemps, j’aurais du mal à accepter que tu fasses dans la roture, mais bon, s’il y’en a un qui te plait et qui est riche après tout, en plus il parait que parfois ils ne demandent même pas de dote. Ne fais pas attention à la façon dont les hommes se comportent entre eux, c’est une sorte de dance des chevaliers, mais ils peuvent être très différents dans l’intimité. Et j’espère aussi que tu pourras rester non loin de moi, j’aurais bien besoin de toi quand mon époux m’aura donné tout un tas d’héritiers. »

Elle rit alors qu’Alys parlait des devoirs des Dames.

__ Les hommes ne choisissent pas d’avantage, tout comme nous, ils doivent faire en sorte de préserver le nom de l’outrage d’une mésalliance et d’obtenir des biens de leur épouse. La plupart du temps, ce sont les parents qui décident, alors même si effectivement, il arrive qu’ils choisissent, eux aussi doivent obéir au final. Et nous, hé bien c’est notre devoir que d’obéir à nos pères puis à nos époux, c’est ainsi, et nous sommes mariées plus jeunes parce qu’avec l’âge notre ventre se tarit et nos traits aussi. Edric n’a toujours pas eut l’occasion de faire une telle alliance et vu sa base extraction il n’a pas autant de devoir que mes oncles par exemple, toi non plus d’ailleurs, mais toi tu as le devoir de me représenter… » Ashara fronça un instant les sourcils, se demandant d’où lui venait de telles considérations.« Je ne vois pas en quoi c’est injuste, ils nous protègent et nous leur obéissant, tout comme nous protégeons nos vassaux qui nous obéissent et tout comme nous protégeons le peuple qui nous obéit. C’est l’ordre juste des choses. Et franchement, si les mariages étaient mus par les sentiments, se serait l’anarchie ! Je crois que le plus important dans le mariage, ça n’est pas le choix, mais la capacité des époux à se comprendre et à s’apprécier et se respecter. Enfin moi… » Elle s’approcha un peu plus et parla plus bas. « Enfin moi, j’ai de la chance, je crois que je suis en train de tomber amoureuse de mon Seigneur époux… »

Elle avait un sourire béat, trop heureuse de partager cela avec ces amies.

Sen était terminé. Ils étaient rentrés, tous. Enfin, tous… Non, pas tous puisque Waymar, lui, était resté au Mur.
Sèche et rafraîchie. Réchauffée, coiffée et présentable. Ysilla avait suivi les femmes en bas se demandant bien de quoi les hommes pouvaient parler si bruyamment. D’elles ? Finalement elle en doutait et elle espérait que non. Ils semblaient déjà à moitié imbibés par l’alcool. Les hommes… S’étaient-ils seulement séchés ?! A coup sûr les femmes tomberont malades alors qu’ils continueront à gambader sans souci ! Ce que la vie était injuste ! Elle le prenait ainsi puisqu’il était évident que celle qui tomberait malade serait elle-même. Pourtant elle vivait dans le Val, elle était habituée au frais, au vent, son corps n’aurait plus dû réagir ainsi ! Saleté de corps ! Elle l’aurait aussi fait exécuter si celui-ci n’avait pas été le sien !

Elles s’étaient mises à parler entre elles. Conversation typiquement féminine, cela allait de soi ! Mariage, amour etc etc… Les licornes étaient de sortie dans la tête de la jeune valloise irritée et qui peu à peu redescendant de ses grands chevaux.

__ « Nous sommes toutes les mêmes. Nous voulons toutes la même chose finalement à quelques différences géographique près je dirais. – Je suis convaincue que ta famille fera au mieux pour te trouver le meilleur parti possible. » Les enjeux étaient moins gros que pour une jeune femme comme Ashara par exemple. Moins gros aussi que pour Ysilla mais elle savait au fond d’elle qu’il y avait avant elle un tas de filles de meilleures famille que des pères désiraient pour leur fils, leur terre, leurs alliés… Mariage d’amour… Qui pouvait encore rêver à cela ? Il fallait être réaliste. Beaucoup de choses lui échappaient mais pas cela. C’était toujours ça de pris !

__ « Edric aimerait effectivement te garder auprès de lui. Je pense qu’il ne vet pas vous voir séparé. Son instinct protecteur est grand, avec son aide et sa détermination votre père trouvera peut-être le parfait mari en nos terres. Il y en a forcément ! » Elle aussi avait peur de devoir quitter le Val. Elle aurait aimé rester dans le coin mais allez savoir ce que lui préparait sa famille. Elle avait seize ans bientôt, il était temps qu’elle devienne une femme. Elle le ferait en s’unissant mais à qui… ? Heureusement, comme Alys, elle avait un père qui ne voulait que son bien. Jamais Lord Royce ne la marierait à quelqu’un de mauvais, de laid ou de violent. On ne pouais être sûr de rien mais les Royce feraient toutes les recherches qu’ils pourraient pour s’assurer que celui qui leur prendra leur petite « Prinpeste » sera un homme bon. Après, elle ne les verrait plus, ou peu et c’était ce qui la rendait le plus triste. Devoir partir loin… C’était injuste. Elles étaient toutes préparées à cela mais ce n’était jamais de gaité de cœur qu’elles quittaient leur demeure familiale.

__ « Plus nous sommes jeunes et plus nous sommes susceptible d’enfanter beaucoup… Tout simplement. Ne sommes-nous pas venues au monde pour cela ? Les hommes sont plus libres car leur responsabilités plus grandes… C’est ce qu’il me semble. J’accepterais la décision de Père quand il m’annoncera qu’il veut me marier. Peu-être aurais-je quelques objections mais cela ne sera que pour la forme. Au final, j’irais où il m’ordonnera d’aller. J’ai confiance en lui. Tu devrais aussi avoir confiance Alys. » Tout se passerait bien, pour elles en tout cas. Elle en était certaine !
Ashara la comprenait. Evidemment et elle aussi serait de son côté en cas « d’abus » de la part de son père. La nièce se sentait chanceuse avec son époux. Pourquoi pas. Il ne reflétait pas vraiment tout ce qu’elle pouvait en dire mais pourquoi pas. Ashara semblait comblée…

__ « Pour avoir été bruyante… Etait-ce si douloureux ? » Si elle avait fait tant de bruits, c’était bien qu’elle avait souffert non ? Quelle autre raison ? Bon, sa mère lui avait bien dit qu’exercer son devoir d’épouse pouvait être agréable, mais pas la première fois. En tout cas, cela n’avait pas été le cas de sa mère. Mais quand tout va bien, on ne crie pas ? Tout cela était fort déroutant !

__ « Quelle chance oui. Bien que je ne crois pas réellement en l’amour, j’admets que je prie les Sept souvent pour tomber amoureuse de celui auquel on m’aura unie. Comme Père et Mère. Ainsi les choses se passent mieux je suppose. » Elle était de l’avis de sa nièce mais elle ne la considérait pas comme femme à part entière dans le sens où elle était suzeraine et que quand elle l’imaginait, elle la voyait, elle, être au-dessus de son époux et faire la loi. Non l’inverse. Peut-être l’idolâtrait-elle un peu trop. Surement puisque pour Ysilla sa nièce était une femme de pouvoir incroyable. Par conséquent, que voulez-vous qu’elle pense de son mari ? Bon, certes il était du genre ogre farouche qui grogne à tout va. Mais il lui apparaissait comme un sauvage et les sauvages, c’est pas fut-fut !

© Fiche de Hollow Bastion sur Bazzart

Alors qu’Ysilla débattait sur la différence entre hommes et femmes, Ashara bougonna et finit par dire sa vérité :

__ Les hommes sont plus libres parce qu’il est impossible de prouver leur virginité ou plutôt son absence, parce qu’ils n’enfantent pas et n’ont pas de saignements inopportuns une fois par lune. C’est une injustice de la nature qu’il nous faut accepter et compenser par notre intelligence. » Largement supérieure à celle des hommes se dit-elle en jetant un coup d’œil à son époux.

N’allez pas croire qu’elle le trouvait idiot, mais pour elle qui c’était toujours battue pour être, si ce n’est légale des hommes au moins une femme que l’on respecte autant qu’un homme, les failles de ces derniers lui apparaissaient souvent bien plus clairement que les siennes propres. Elle avait toujours pensé que leur orgueil de mâle et leur passion pour les femmes étaient leurs plus grandes faiblesses, faiblesses que les femmes ne pouvaient avoir. Elles pouvaient oublier leur fierté, pour un temps en tout cas et elle ne saurait être déconcentrées par un homme aussi charmant soit-il, surtout lorsqu’il s’agissait de protéger leurs enfants. Peut-être leur unique faiblesse, mais plus probablement leur plus grande force. Ashara avait une grande lucidité concernant les autres, mais parfois, elle pouvait en manquer sur elle-même.

Quoi qu’il en soit, sans se croire supérieure, elle se croyait au moins égale à tous ses hommes qui gouvernaient, elle avait, toute sa vie durant, œuvré pour arriver à un idéal féminin proche de Lord Jon et de Sharrah Arryn, fort, intelligent, diplomate, stratège. Elle avait appris à exploiter ces faiblesses pour devenir une femme accomplie et gagner par la malice le pouvoir que les hommes refusaient aux femmes depuis toujours. Elle ne refusait pas leur autorité, quoi que parfois, cela l’énervait de les voir s’entretuer plutôt que de s’occuper de leur peuple. En revanche, elle refusait catégoriquement d’être une potiche de plus dans un monde qui, s’il continuait sur cette voie, était voué à l’anéantissement. Elle était néanmoins consciente qu’elle n’arriverait jamais à la cheville de son époux concernant le maniement de l’épée ou la force pure. Elle utiliserait donc, comme depuis toujours, les atouts que la nature lui avait octroyé.

Si les larmes étaient l’armure des femmes, alors elle préférait ne pas en porter. Son regard était capable de désarmer bien des hommes, sa voix aussi, son autorité naturelle, ça façon de marcher, de s’exprimer. Son rang lui avait permis d’utiliser tout cela au mieux, mais il était loin de suffire, et il fallait sans cesse qu’elle le rappelle à tous, de par ses actions et son comportement.

Elle rougit violement quand Ysilla lui rappela la nuit bruyante qu’elle avait passée pour la première fois avec Lyonel.

__ Heu… un peu… au début… mais ensuite non. Je ne criais pas parce que j’avais mal. C’était heu… je ne saurais expliquer. C’était… bien… agréable… un peu effrayant… très effrayant en fait… mais je n’avais jamais ressentis ça… c’est normal, mais je veux dire, je ne connais pas de sentiment comparable. C’est un peu comme si je dégustait le meilleur des vins avec le meilleur des plats tout en galopant cheveux au vent sur la plage et en me baignant dans l’eau glacée de Roche Aux Runes. »

Ashara désormais rouge comme une tomate arborait un sourire jusqu’aux oreilles et rêvassa quelques instants à cette nuit magique avant de se rendre compte qu’elle était dans une salle commune. Elle prit alors ses couvert pour les mettre bien parallèles autour de son assiette, prit son verre, le reposa, tripota à nouveau ses couverts et finit par prendre son verre pour se cacher dedans en buvant à petite gorgée le plus longtemps possible.
Le changement de sujet arriva donc à pic.
Elle se pencha vers ses suivantes après avoir jeté un nouveau regard à Lyonel.

__ Quel que soit l’époux qu’on vous choisira, je pense qu’il est possible, avec le temps, avec quelques concessions, d’y faire naitre l’amour et l’affection. » Elle sourit. « C’est finalement, je le crois, notre plus grand rôle dans la vie en dehors de faire des enfants. Car en l’oubliez pas, les hommes sont souvent plus libres, mais la plupart d’entre eux ne choisissant pas leur épouse plus que nous ne choisissons nos époux, pour la plupart d’entre eux, se sont leurs parents qui décident. Seulement pour eux, le sacrifice est moins grand, et si nous ne voulons pas faire de ce sacrifice une erreur, alors il faut nous employer à en faire une opportunité. Le mariage n’est que le début d’une vie à deux qui durera des années, je préfère pour ma part œuvré pour que ces années soient belles plutôt que l’inverse. Je ne doute pas que vos pères vous choisirons des époux avec qui ce chemin sera possible, cela n’est hélas pas donné à toutes. »

Ashara eut une pensée pour la Reine avant de se souvenir de ce que cette dernière avait fait. Elle fit la grimace et mangea un morceau de tourte en se disant que jamais elle ne ferait ça à son époux, et que même si elle ‘lavait hait, même s’il n’avait pas été aussi gentil et doux avec elle, même s’il ne l’avait point aimé, elle n’aurait pas pu lui faire cela. En revanche, elle l’aurait peut-être fait tué… Lysa a tué Jon… pour ça ? Impossible, il était tellement gentil avec elle, tellement bon. Pourquoi faire une telle chose… Même si elle avait aimé Petyr, c’est… Possible. Terrible, mais possible. Et le Roi ? Cersei chercherait-elle à tuer le Roi ? Après tant d’années de mariage ? Elle n’y serait toujours pas parvenue ? Bon tuer le Roi n’était pas si simple, mais tout de même. Cette folle de Lysa avait bien réussit à tuer sa Main. Bon avec l’aide de Littlefinger, qui d’ailleurs pour sa part ne cherchait pas uniquement l’amour de Lysa, j’en suis persuadée.

Elle ne pouvait pas pardonner mais elle pouvait comprendre, elle même avait le sentiment parfois de ne plus rien valoir après la nuit de noces, et pourtant elle aimait son époux et elle n'envisageait sa vie avec personne d'autre. Ce sacrifice elle l'avait fait, elle était bien obligée de consommer ce mariage pour le rendre inaliénable aux yeux de la loi. Elle ne l'avait pas regretté, elle avait pris du plaisir comme jamais, mais il n'en restait pas moins qu'elle se sentait dépossédée de son propre corps et de toute valeur potentielle aux yeux des hommes.
Elle voulait, elle devait, garder sa force, garder son autorité. Elle refusait de ne devenir que l'épouse de Lord Lyonel.