La nuit noire venait de tomber sur Salvemer. Les dernières échoppes venaient de fermer, tandis que leurs occupants s'en allaient vaquer à leurs occupations nocturnes habituelles. Les habitants avaient pour la plupart cesser de se mouvoir, de parler, de prétendre à qui voulait bien l'entendre que leurs marchandises étaient bien moins chère et de meilleure qualité que celle de son voisin. La ville semblait morte en comparaison à l'agitation qui l'animait la veille.

Byron traversait seul une des ruelles humides dont les habitants avaient semblé désertés pour on ne sait quel raison. Comme seule source d'éclairage, la lumière de la lune se reflétant dans les flaques d'eau tombés plus tôt dans la journée et à l'occasion, des halos de lumières provenant surement de bougies s’échappant de par les fenêtres des chaumières. L'héritier de la maison Terrick savait où il voulait aller mais le cheminement pour y arriver lui était inconnu. Mais après tout, les tavernes ne devaient pas manquer, et si la chance était avec lui, il tomberait dessus au détour d'une ruelle ou d'un croisement. Malheureusement, il avait beau espérer, la chance n'était pas son fort, surtout en ce moment. Cela faisait trois jours qu'il était arrivé à Salvemer depuis la River road et ses recherches ne lui avaient menés à rien.

Le premier jour, il s'était dit tout naturellement que les taverniers, aubergistes et habitants à qui ils avaient demandés des renseignements n'étaient pas les bons et qu'il y en aurait au moins un parmi toutes les personnes résidant à Salvemer ou dans ses alentours qui avait vu ce qu'il cherchait. A chaque fois qu'il demandait, il s'attendait à un réponse négative, c'était normal après tout, les troubadours et autres voleurs et escrocs qui se prétendait comme telle parce qu'il savait jouer d'un instruments de musique étaient monnaie courante. Mais les violonistes muettes par contre, ne couraient pas les rues et malheureusement personne parmi les personnes interrogés n'avaient su lui dire si ils l'avaient vu ou non. Un lui avait même répondu qu'il avait vu le prince Rhaegar jouer du tambour avec l'Aïeule et la Jouvencelle, Byron s'était dit après cela qu'il devrait arrêter de demander à des ivrognes leurs avis malgré le fait que leurs réponses étaient toute fois....intéressante. Le deuxième jour, il s'était en partie rassuré en se disant que la ville et ses alentours étaient vaste et qu'il était fort probable qu'il ait manqué quelque chose qui l'aurait aidé dans son enquête. Et le troisième jour, les maigres espoirs qu'ils entretenaient encore étaient parties en fumées.

Personne dans cette foutue ville n'avait eu vent d'une certaine Silvana, aucune signe d'elle ici, ainsi que dans les alentours. Aucun signe d'elle, non plus à Vivesaigues ou à Harrenhall, ni même dans les auberges que Byron avait emprunté le long de la River road durant ces multiples voyages. Était-ce lui qui s'y prenait mal ou elle qui le fuyait comme la peste. Probablement les deux. Et c'est ce qui l'amenait maintenant à déambuler à travers les ruelles à la recherche d'une taverne, quel qu'elle soit, même la plus miteuse aurait convenu. Il avait juste besoin de décompresser et savait que seul la chaleureuse et apaisante compagnie d'une bonne bière, ou d'un alcool un tant soit peu décent, saurait l’apaiser.

Il avançait toujours d'un pas assuré et vif, se déplaçât avec aisance sur les pavés encore ruisselant des intempéries de la veille. Au détour de la rue, il tomba sur une petite place qui suscita chez le Terrick un soudain regain d'intérêt. Il eut un léger sourire en coin. Pour une fois, il avait eu de la chance. Les Sept ne lui avaient pas montrés où était sa femme mais ils avaient eu la décence de guider son chemin vers la taverne pour le consoler. A défaut d'être miséricordieux, on ne pouvait leur enlever qu'ils avaient un certain sens de l'humour.

Byron traversa la place, tout en savourant le fait que sa recherche nocturne venait de prendre fin et qu'une bien belle récompense l'attendait. Il poussa la porte en bois massif de la taverne. Une fois entrés, il enleva sa capuche, et tout en se dirigeant vers le tavernier, scruta attentivement les occupants. L'ambiance générale de la taverne était assez pittoresque, un barde jouant les chansons les plus connus en espérant animer les clients qui n'avaient clairement pas besoin de son aide pour le faire à merveille. La taverne était étonnamment bondé étant donné l'heure qu'il était mais cela pouvait s'expliquer du fait que Salvemer était une ville portuaire et donc attirant tout autant les marins que les paysans. Dans un coin, un vieil homme à forte corpulence avait la tête dans son assiette, en voilà un qui ne tenait pas l'alcool et qui s'était enfilé une bouteille aussi vite qu'il ne l'avait fait pour la commander. Près du comptoir, un groupe d'hommes n'en étaient surement pas eux aussi à leur première bouteille, ils semblaient inoffensifs mais le seraient-ils tout autant à la fin de la soirée? Bah ce n'était pas son problème, pour l'instant la seule chose qui l'importait se trouvait devant lui. Il s'accouda au comptoir et s'adressa au tavernier.

-Une bière, mon brave.

Il adressa au Terrick un regard en coin, et se remit à son travail. Il s'assura que tous les autres clients étaient à leurs aises et ne manquaient de rien, puis le servit en lui donnant la chope.

-Tenez, par contre vous arrivez tard, et il ne me reste que cela donc faudra faire avec.

Byron acquiesça et quelques secondes après ne put que confirmer les dires du tavernier, la bière qu'il lui avait servi étant tiède et ayant une sorte de léger arrière gout assez discret pour que cela ne soit pas imbuvable et que l'on puisse l'oublier trois verres après mais présent tout de même. Malgré cela, il empoigna la chope de sa main droite, l'avala cul sec et essuya sa barbe légèrement imbibé d'alcool de sa main gauche. Il déposa la chope sur le comptoir et en demanda une autre au tavernier qui lui demanda si il avait de quoi payer. Ce à quoi le Terrick répondit en sortant quelques piécettes de sa poche en nombre suffisant pour payer sa consommation qu'il remit au tavernier.

-C'est tout? Vous avez besoin d'autre chose?

-Non, pour l'instant, ça va aller. Le tavernier acquiesça et alla s'occuper d'un autre client venant d'arriver. Oh et puis vous savez quoi? tout ces hommes là m'ont l'air bien assoiffé. Il se retourna, leva son verre et éleva la voix. TOURNÉE GÉNÉRALE c'est moi qui paye!

Il commença à boire la bière qu'il tenait dans ses mains, savourant la plus infime goutte. Cela devait bien faire plusieurs années qu'il n'avait pas bu, probablement depuis la rébellion en y réfléchissant bien et il n'aurait jamais pensé avoir envie d'aller boire après une série d'échec et de déceptions comme il venait d'en vivre depuis cette dernière année. Mais le fait est que, cette nuit était pleine de surprise et elle ne faisait que commencer.

Patrek Mallister, Tristan Ryger et Marq Piper étaient là depuis plusieurs heures, à fêter... A fêter quoi, déjà ? Était-ce un exploit à la chasse, une nouvelle conquête ou simplement le fait d'avoir à peine un peu plus de vingt ans et de trouver en chaque événement heureux une bonne raison de s'enivrer ? Peu importait le motif, ce qu'il fallait, c'est que le vin coule à flots chaque fois que les gaillards étaient réunis.

On les repérait de loin et même si les taverniers se frottaient les mains en les voyant arriver, il fallait tout de même admettre que le manque total de sérieux de la part de l'héritier de Salvemer n'était résolument pas pour rassurer certain de ses gens. Malgré cela, les petites vieilles des alentours n'hésitaient jamais à minauder un « Il faut bien que jeunesse se passe » en reluquant le séduisant jeune homme, tandis que bien des filles aux mœurs légères écartaient les cuisses pour l'insouciant fils de Jason.

Ce soir là était donc un soir comme les autres : Patrek et ses compagnons étaient déjà bien éméchés. Le Mallister avait d'ailleurs une bonne longueur d'avance sur Tristan et Marq après avoir défié l'un des hommes présents dans la taverne à un jeu à boire. Et s'il avait gagné contre le vieux ventripotent qui s'était écroulé face la première dans son assiette, l'alcool lui faisait résolument tourner la tête. Heureusement qu'il avait beaucoup d'entraînement et d'endurance. Impossible déjà de se souvenir quel avait été l'enjeu de ce défi.

Lorsqu'un homme à la carrure impressionnante leva son verre et annonça une tournée générale, Patrek ne pu s'empêcher de lui donner une grande claque amicale sur l'épaule en s'exclamant :

- Bien dit l'ami!

Dans la taverne à l'ambiance déjà survoltée, l'annonce de bière gratuite avait encore réchauffé le lieu où toute la fine fleur des pochtrons de Salvemer et des alentours semblait être réunie ce soir là.

Tandis que le tavernier s'affairait à remplir chopes sur chopes, le fils de Jason se tourna complètement vers le mystérieux homme. Il ne l'avait jamais vu par ici, et cela, même saoul, il en était certain. Ses yeux gris bleus cherchèrent un blason sans en trouver mais, même s'il avait l'apparence d'un homme qui n'avait fait que voyager ces derniers temps, Patrek était certain qu'il avait face à lui non pas un vagabond mais un homme de noble lignée ou à défaut, au moins un individu qui servait une importante Maison du Conflans.

Patrek désigna tour à tour ses amis avant de les présenter :

- Voici Marq Piper et Tristan Ryger.

Il leva sa choppe pleine pour trinquer avec l'homme en ajoutant :

- Je suis Patrek Mallister, et toi, qui es-tu ? Qu'est-ce qui t'amène à Salvemer ?