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[Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge...

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MessageSujet: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime29.03.14 17:30

An 298, Sixième Lune, Semaine 4

Les flots noirs venaient harceler la grève et les rochers sous la lueur pâle d’une lune orangée. La puissante forteresse de Peyredragon somnolait, alanguie, au-dessus des lames écumeuses et chargées de houle.
Stannis veillait, comme à son habitude, rongé par un concert de questions silencieuses qui tiraillaient ses journées et chargeaient ses nuits d’encombrantes réflexions infinies.
Le départ précipité de Port Réal, la semaine précédente, avait éveillé en lui toute une somme d’interrogations et de doutes. La mort de Lord Jon ne pouvait pas être naturelle. Il en était persuadé. Il en aurait mis sa main au feu. Il avait cherché à comprendre mais devant les mystères, les suspicions et les non-dits, il n’avait pu aller plus avant dans ses recherches sans éveiller les soupçons trop lourds qui lui auraient occasionné trop de problème pour un homme isolé comme il l’était. Son saoulard de frère n’était pas le Roi qu’il aurait pu ou dû être, les manigances et les intrigues de ce Varys et ce Littlefinger étaient par trop irritantes pour qu’il les tolérât plus longtemps et les Lannister grouillaient au Donjon Rouge.
Personne n’avait semblait se préoccuper des questions qu’il formulait ou des doutes qu’il cherchait à faire émerger et le Baratheon avait estimé plus raisonnable de s’en retourner dans son fief afin de s’y reposer et d’y poursuivre, à distance, les recherches qu’il avait engagées.

Ici, rien n’avait changé. Ou presque. Il avait retrouvé sa fille, ses hommes, sa forteresse et ses dragons, ses navires et… sa femme. Par ordre de préférence. Et tout était sensiblement resté comme il l’avait laissé. Shôren grandissait, sa femme se renfermait et une femme mystérieuse aux cheveux rouges avait été accueillie sur l’île et elle avait attendu là plusieurs semaines son retour, dans l’attente de le rencontrer.

Elle se disait originaire d’Essos et souhaitait l’entretenir de quelque chose d’importance qu’elle ne voulait dévoiler qu’à lui seul. Depuis son retour, il n’avait pas consenti à la rencontrer, trop occupé par l’étude des documents qu’il avait rassemblés pour faire la lumière sur la mort étrange de la Main du Roi son frère. Elle avait patienté un mois, elle pouvait bien attendre quelques jours de plus avait-il jugé.

Lorsqu’on frappa à la porte, il sut qu’Elryk avait trouvé Lord Davos et que tous deux étaient là. Comme il l’avait demandé. Ces deux hommes étaient ceux en qui le Maître des Navires avait le plus confiance. Tous deux s’étaient montrés, années après années, d’une indéfectible loyauté à son égard et la droiture -pour ne pas dire la raideur- de l’homme s’accommodait très bien de cela. On peut même dire que d’une certaine façon il les respectait profondément pour leur dévouement et leur sens du devoir. Stannis aimait les hommes d’honneur et de parole. Il aimait les chevaliers fidèles à leurs vœux. Chose qui commençait à être une rareté.

– Oui ! leur lança-t-il de l’autre bout de la pièce afin de les inviter à entrer.

Lorsque les deux hommes eurent pénétré dans les appartements de Stannis, le Seigneur de Peyredragon les invita à s’asseoir et, au besoin, de se servir un verre de vin ou de piocher de quoi manger dans la coupelle de fruits qu’il avait désignés d’un doigt inattentif.

– Messieurs, j’ai besoin de vos avis sur quelque chose qui me préoccupe, dit-il tout en s’asseyant – Mettez-vous à votre aise. Cela va durer.
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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime31.03.14 11:56



Année 298 – Lune 5 – Semaine 3
Peyredragon

Elryk arpentait les couloirs de l'immense forteresse sans un mot. Le silence n'était rompu que par les cliquetis réguliers de son armure, et les pas de l'homme qui marchait a ses cotés. Ser Davos. Un des hommes de Stannis. Le géant appréciait l'ancien contrebandier. Il n'avait jamais oublié que lors du siège d'Accalmie, alors que lui est les autres mourraient de faim, Davos était arrivé avec des provisions. Jamais un oignon n'avait eu si bon gout. Depuis ce jour, Davos était d'une fidélité sans failles à Stannis. Un profond respect liait Davos et Elryk. Un respect qui se passait de mots. De toutes façons, l'un comme l'autre étaient avare de paroles, et c'était parfait ainsi. Chacun servait son Suzerain à sa manière, et tous deux y consacraient leur vie. Mais ces derniers temps, Stannis avait semblé bien sombre. Il s'isolait souvent. Ce jour là, il était sorti de son silence et avait convoqué son Epée lige, lui demandant d'aller quérir le chevalier oignon. L'affaire semblait importante. Assez importante pour soucier Lord Stannis. Elryk s'était empressé d'aller chercher Ser Davos, et tous deux se tenaient maintenant devant ma porte des appartements de leur suzerain.

- Oui ! entendirent ils.

Comme d'habitude, Stannis ne se perdait pas en dialogues inutiles. Quel trio ils formaient. Ils auraient pu communiquer sans prononcer la moindre parole. Mais en entrant dans cette pièce, Elryk remarqua immédiatement que quelque chose n'allait pas. Il connaissait très bien Stannis. Même si son seigneur était d'un naturel maussade, là, c'était pire que d'habitude. A la demande de son seigneur, les deux hommes prirent place. Elryk prit la cruche de vin et en versa une coupe qu'il posa devant Stannis, un autre devant Ser Davos, et une autre pour lui même. Il déboucla son ceinturon et appuyé son épée contre la table avant d'enlever ses gantelets. Si cela devait durer, autant s'alléger un peu. Il sortit de son manchon sa longue pipe de bois qu'il entreprit de bourrer méthodiquement. Même si sa vie était consacrée au service de Stannis, Elryk restait très indépendant, et possédait son propre style qui, même s'il agaçait souvent son entourage, il faisait preuve d'assez d'efficacité dans les taches qui lui étaient confiées pour que l'on passe l'éponge sur ses excentricités. Il regarda Stannis.

- Nous sommes à votre service, mon Seigneur.




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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime06.04.14 9:56



A l’extérieur, la lune faisait miroiter ses reflets dorés sur les flots sombres qui venaient lécher la falaise jusqu’aux pieds de la forteresse. Alors que le soleil avait depuis longtemps passé la ligne nue et triste de l’horizon automnal et que la nuit était déjà venue envelopper entièrement Peyredragon dans les ténèbres de ses longs doigts élancés, Lord Stannis se remémora soudain, comme il avait souvent coutume de le faire, les jours sucrés et acidulés d’une insouciance disparue et de laquelle il lui semblait à présent qu’il avait trop peu profité.

Ser Davos s’était assis face au Baratheon, comme souvent sans mot dire. Elryk, avait servi un peu de vin à chacun avant de s’asseoir à son tour, pas beaucoup plus bavard. Ainsi réunis, ils formaient un sacré trio de comiques !

Mais pendant ce temps-là, l’esprit de Stannis vagabondait toujours.

Qu’elles étaient lointaines, désormais, ces années d’insouciance, et comme il lui manquait, parfois, de ne plus être aujourd’hui ce jeune noble sans tracas que les responsabilités et le statut de son père puis de son frère avaient si souvent contribué à tenir à l’écart des douloureuses réalités de la vie d’un seigneur d’importance. Ses yeux, hypnotisés par les reflets dansant sur l’argent des mâchoires acérées, sondaient l’abîme de ses rêveries passagères et dévisageaient les fantômes d’une époque réconfortante mais désormais révolue. Jon Arryn était mort et le doute l’avait étreint lorsqu’il avait cherché à comprendre. Ses doigts gantés avaient, longuement et en une danse narcotique, fait lentement tournoyer sur elle-même la coupe d’argent ciselée de dragons féroces des Targaryen. Cette coupe dans laquelle les anciens maîtres du fief avaient dû boire avant lui et qui, dans quelques années, viendrait peut-être aider à leur tour ses enfants et leurs descendants à étancher leur soif lors de froides soirées comme celle-ci.

La réponse laconique de son épée-lige finit par tirer le Seigneur de Peyredragon de ses nostalgiques vagabondages...

– Bien, reprit alors Stannis. – Je vais avoir besoin de toute votre attention et votre discrétion. Il y a deux choses au sujet desquelles j’aimerais votre avis. Son regard passa de l’un à l’autre, froid mais serein, et sûr de la confiance qu’il pouvait placer en eux et en leur jugement.

Les dernières semaines avaient été difficiles pour le Baratheon qui avait vu croître, au Donjon Rouge, toute la perfidie mise au service de l’ambition humaine.

– Voici des documents que j’ai regroupés suite à la mort de Lord Jon Arryn, commença-t-il finalement en éparpillant quelques parchemins et reliures sur la table. – Je vais en poursuivre l’étude mais il me faudra sans doute d’autres éléments pour compléter ceux-ci et étayer ma théorie selon laquelle le décès de la Main est en fait un assassinat. Il se redressa un peu, à présent très raide dans son fauteuil. – Je demanderai prochainement à l’un d’entre vous de retourner à Port Réal pour enquêter et rassembler les preuves qui me manquent encore pour prouver ce que j’avance. Vous avez séjourné avec moi là-bas et les gens de la cour vous connaissent. Vous y aurez vos entrées. Mais attention ! Il s’agira d’être prudent car le danger vous y guettera !
Le regard métallique de Stannis se posa sur le chevalier de Broad Arch. Il semblait le plus indiqué pour cette mission à venir. Certes, sa carrure imposante lui refusait toute discrétion mais il savait lire et écrire et le Maître des Navires avait besoin que des nouvelles régulières lui viennent de là-bas lorsqu’il aurait son homme sur place et ser Davos, bien que plus discret qu’Elryk, était analphabète et ne pourrait pas envoyer de corbeaux sans être obligé de dicter le contenu de ses missives à quelqu’un... Et cette option manquait par trop de prudence pour que le Chevalier Oignon soit désigné pour remplir ce rôle.

- Elryk, ce sera toi qui ira enquêter à Port Réal et qui me tiendras informé de tout ce que tu peux trouver comme éléments liés à la mort de Lord Jon. Tu seras là-bas sous couvert d’une permission de quelques jours et tu feras comme si tu venais prendre du bon temps à la capitale ! Lord Stannis n’ignorait pas que le Staedmon connaissait quelques difficultés à se montrer tout à fait à l’aise avec les femmes, mais il faudrait au chevalier prendre sur lui. – N’hésite pas à te montrer dans les bars et les bordels de la ville... Surtout ceux de Lord Petyr. Il faudra que chacun pense que tu es là pour te détendre et profiter des quelques jours de liberté que je t’aurai octroyés...

Mais il y avait aussi autre chose. Cette mystérieuse femme du grand continent Est qui souhaitait être présentée à Stannis.

– Et celle qui se fait appeler Mélissandre ? Depuis son retour à Peyredragon Stannis n’avait toujours pas daigné la recevoir... Mais Elryk et Davos l’avaient peut-être rencontrée. – L’un d’entre vous peut-il m’en dire plus sur elle ?




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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime10.04.14 10:12



Année 298 – Lune 5 – Semaine 3
Peyredragon

Elryk avait craint une situation épineuse, une mission déplaisante, il ne s'était pas trompé. Lorsque Stannis déploya les documents sur la table, le Lord Rouge vit l'embarras apparaitre sur le visage de Ser Davos. Il était de notoriété publique que ce dernier ne savait ni lire ni écrire. Cela était un vrai handicap pour lui. Mais Elryk avait beaucoup d'affection pour le chevalier oignon. Il n'oublierais jamais que lors du siège d'Accalmie, c'était à lui qu'ils devaient tous leur survie. Il s'empressa donc de rassembler les parchemins devant lui. Tout en y jetant un oeil, il prit une des bougies sur la table et alluma sa pipe, recrachant de larges volutes de fumée bleutées. L'air s'emplit de la douce odeur de tabac aromatisé. Un luxe qu'Elryk faisait venir de Volantis et qui lui coutait chaque mois une petite fortune. Il but une gorgée de vin et se pencha sur les documents. Des registres de naissance, pour la plupart. Des bribes de correspondances entre Lord Baelish et Lady Arrhyn. Des arbres généalogiques. Elryk lisait les en têtes des parchemins à voix haute, comme s'il se parlait à lui même, réfléchissant tout haut. Mais c'était subtilement pour tenir Davos au courant du contenu de ces papiers, pour que ce dernier ne se sente pas mis à part à cause de son illettrisme.

- Si vos soupçons s'avèrent exacts mon seigneur, nous nous apprêtons à donner un coup de bâton dans un nid de frelons...


Elryk aurait pu, comme beaucoup de chevaliers avides d'attention, prendre ce que Stannis disait pour argent comptant. Mais il tenait à vérifier lui même. Et c'est cette franchise qui faisait que le seigneur de Peyredragon aimait l'avoir à ses cotés au même titre que Ser Davos. Ils n'étaient pas de ces lèches bottes dispenseurs de compliments. Les deux chevaliers remettaient sans cesse leur ouvrage sur le métier. Et pour une affaire aussi grosse que le prétendu assassinat de la main du Roi, mieux valait être absolument sur de ce que l'on avançait si l'on ne voulait pas voir sa tête orner le parapet de Port Réal.

Lorsque sa mission lui fut confié, Elryk hocha la tête. Prendre du bon temps. Il n'avait pas la moindre idée de comment s'y prendre. Depuis toujours, il n'avait que remplit son devoir, sans songer à autre chose. Alors traîner dans des bars? Dans des bordels? Lui qui n'adressait pas la paroles aux femmes, la tache ne serait pas des plus aisées. Bien sur il lui était arrivé de culbuter quelques servantes dans les couloirs sombres et froids de la forteresse, mais il ne menait pas d'enquête à ce moment, et n'avait pas besoin de leur parler. Il se laissa aller dans son fauteuil en tirant une longue bouffée sur sa pipe. Les ordres étaient les ordres. Il comprenait bien les raisons qui avaient poussé Stannis à le choisir lui. Ser Davos était un excellent enquêteur, et savait se montrer d'une discrétion absolue. Son passif de contrebandier lui avait apprit à ne pas se faire voir quand il le désirait. Seulement il ne savait pas écrire. Et l'ampleur et les conséquences que pourraient avoir une telle mission ne permettait pas de faire intervenir une tiers personne pour écrire les compte rendus à sa place. La capitale était un nid de vipères, et le moindre grouillaux pouvait être un espion au service de l'araignée ou du grand argentier.

L'affaire semblait réglée. Mais Lord Baratheon ne les congédiait pas. Ce qui ne pouvait signifier qu'une seule chose. Un autre sujet le préoccupait. Les deux chevaliers connaissaient assez bien leur seigneur pour deviner que ce sujet serait aussi sensible que le précédent. Davos porta machinalement la main à son cou ou il portait toujours les reliques de ses phalanges perdues. Elryk termina son verre de vin et s'en servit un second. Stannis aborda alors le sujet de Melissandre. Le visage d'Elryk s'illumina durant une fraction de seconde avant de retrouver le flegme qui lui était propre. Il avait en effet rencontré la jeune femme. De nombreuses fois même...

- Melissandre d'Asshai mon seigneur. Elle est originaire d'Essos. D'Asshai lès ombres pour être précis. Il s'agit d'une prêtresse rouge, servante du dieu de Lumière.


- Foutaises! Maugréa Davos. Les Sept sont nos dieux. Nous n'avons que faire d'une quelconque divinité étrangère mon seigneur.

Elryk attendit que son ami ait terminé pour poursuivre. Davos était un vieux bougon.

- Elle est ici pour vous rencontrer mon seigneur. Elle dit qu'elle a des informations à vous transmettre. Des informations concernant... votre futur...

Il marchait sur des oeufs. Il savait que Lord Stannis était quelqu'un de très terre à terre. Et commencer à aborder le sujet de la magie avec lui, c'était aussi risqué que de vouloir lui arracher un sourire. Mais il avait posé une question, et une fois de plus, la franchise d'Elryk ne serait pas mise à mal par de quelconques règles de politesses ou de fausse courtoisie.

- Elle dit vous avoir vu dans les flammes. Un des prodiges que les prêtres rouges prétendent pouvoir accomplir. J'ai longuement discuté avec elle. Je ne pense pas qu'elle soit un danger mon seigneur.





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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime19.04.14 16:55


Le vin tournoyait lentement à l'intérieur de la coupe argentée. Stannis n'en détachait que rarement les yeux, si ce n'était pour enfoncer un regard sévère et métallique vers Davos ou Elryk dans l'attente de leur avis respectif. Toutes ses pensées se cristallisaient sur les ondulations du liquide. Des ondulations régulières, rythmées, qui lui donnaient la vague impression de contempler une reproduction miniature d'un lac étrange aux bords arrondis.

Contrairement à d'autres, cette vision n'éveillait chez lui la soif, mais seulement la volonté de chasser l'épaisse brume qui enveloppait le moindre de ses raisonnements.
La faute à ce sommeil défaillant, à ces nuits épouvantables, à ces insomnies capricieuses jonchées de questionnements et de réflexions intenses, souvent les mêmes, nuit après nuit. N'avait-il pas assez souffert de la perte de ses parents et de la grave maladie infantile de sa fille, pour que les Sept le condamnassent à revivre chaque nuit la mort si réaliste des premiers, et l'abomination qui s’était acharnée sur la seconde ? Et puis il y avait la mort de Lord Jon, la forfanterie quotidienne et l’inconséquence navrante et régulière de Robert et les manigances insupportables de Varys ou Littlefinger... Par les Sept, qu’il abhorrait tout cela. Que le monde était affligeant et détestable... Ne pouvaient-ils donc pas tous se comporter avec un peu plus de rigueur et de dignité ? Le dessein des dieux restait atrocement obscur à ses yeux. Son châtiment tout autant. Oint des sept huiles, n'avait-il point montré à maintes reprises son attachement à la religion des Sept ?
Chaque nuit écoulée présentait, en tout cas, une occasion de lui signifier leur désapprobation. Fatigué et accablé depuis la mort cruelle et soudaine de ses parents, Stannis ne voulait plus croire en les Sept. Ils n’étaient qu’inventions coupables des hommes pour pallier à leur inconséquence et pour répondre à leurs craintes... Il connaissait parfaitement bien la manière que son frère aîné avait eu de réagir à la mort de ses parents ; et sa façon insupportable de se vautrer lamentablement dans une dépravation et une langueur aussi faciles que coupables pour se prétendre intouchable par la peine et légitime sur son trône. Le Seigneur de Peyredragon avait pourtant la nette impression que tout ceci ne tiendra plus très longtemps et que les mensonges de Robert à lui-même et les aveuglements dont il était si régulièrement coupable et sur lesquels il avait bâti son règne tout autant que son existence, le précipiteraient bientôt dans les abysses de ses défaillances criantes. Si la façon dont les deux aînés des Baratheon avaient eu de construire leur vie après cette tragédie différait de beaucoup, Stannis était pourtant conscient qu'il lui suffisait d'un seul faux pas, d'un seul instant de faiblesse, pour que sa vie basculât elle aussi dans des limbes de déchéance et d’insuffisance comme c’était le cas pour Robert. Une couronne masquait bien des défauts et un trône bien des absences...

Mais malgré l'immensité de sa perte et le nombre de ses contrariétés, le Maître des Navires ne se jugeait pas assez vieux pour se laisser mourir, pas assez résigné pour se laisser terrasser. D'autres combats requéraient sa présence et d'autres horizons guettaient le terme de sa renaissance. Aussi, s’appliquait-il à œuvrer pour ce qu’il estimait être juste et honorable, comme par exemple élucider le mystère de la mort de Lord Jon et s’affairer à lui rendre justice, le cas échéant.

Lord Stannis fut soudain tiré de ses réflexions coutumières par la première réaction qu’Elryk exprima après avoir farfouillé quelques minutes dans les documents que son seigneur leur avait présentés.

Un coup de bâton dans un nid de guêpes. C’était exactement cela. Mais si le Baratheon rejoignait son épée-lige sur ce point, il n’était pas homme à se soustraire à ses devoirs, s’il les estimait justes et fondés. Et rendre justice à Lord Jon, homme honorable et droit s’il en était, était à l’évidence, un devoir à ses yeux.

Ser Davos acquiesça en silence, approuvant son maître et son homologue tout en triturant le petit sac de cuir contenant les ossements de ce qui avait autrefois été quelques un de ses doigts.

Le Chevalier Oignon semblait, autant que le Lord Rouge, prêt à suivre Lord Stannis dans ce combat des plus dangereux. Tous deux œuvreraient de façons différentes mais commune pour cela.

Stannis ploya une main gantée sur l’un des accoudoirs de son fauteuil et se redressa, attentif, lorsque le chevalier de Broad Arch évoqua la mystérieuse femme aux cheveux rouges. Asshaï-lès-l’Ombre ? Voilà qui n’était certes pas commun... Qu’est-ce qu’une orientale venait-elle faire à Peyredragon ? Stannis redoubla de concentration alors que ser Elryk poursuivait.

Mélissandre ? Mon futur ? Les interrogations s’amoncelaient dans son esprit et concourraient à l’intriguer toujours plus. A mesure qu’Elryk parlait, la curiosité du Baratheon grossissait et ses réserves quant à la foi et ses déités s’étrécissaient en conséquence.

Elryk semblait avoir rencontré la jeune femme… Cela n’étonnait pas le Baratheon puisque, au contraire de ce qu’il pensait lui, son épée-lige semblait très attiré par les religions, les mythes et les croyances diverses. Un prodige ? Et si l’on saupoudrait un peu de magie là-dessus… Alors…

Il n’en demeurait pas moins que le Staedmon avait suffisamment éveillé la curiosité de son seigneur pour que celui-ci se résolût à rencontrer l’intrigante dame rouge…

– Conduis-moi jusqu’à elle ! , finit-il par conclure… La nuit était bien avancée et il savait que celle qui se prétendait prêtresse ne dormait pas. Il avait eu plusieurs fois l’occasion de constater, depuis son retour à Peyredragon, que des feux nocturnes étaient entretenus par ses soins durant toute la durée de chaque nuit. – Voulez-vous venir, ser Davos ?

– Je vous accompagne ! répondit le Chevalier Oignon dont la moue dubitative montrait clairement qu’il comptait constituer le pendant d’Elryk dans l’éventuel questionnement de son maître au sujet de Mélissandre. Si le Staedmon semblait très intrigué par la Dame Rouge, l’ancien contrebandier n’était, quant à lui, que trop méfiant à son égard.

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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime21.04.14 22:42



Année 298 – Lune 5 – Semaine 3
Peyredragon

Comme à son habitude, le Seigneur de Peyredragon avait écouté les avis de ses chevaliers avec attention sans les interrompre. Son visage n'avait pas trahis la moindre émotion. C'était pour ça qu'Elryk avait voué sa vie à cet homme. Il était d'une impassibilité impressionnante. Il avait une réserve de roi. Un stoïcisme digne des plus grands héros des histoires que l'on contait aux enfants pour les endormir. Cet homme était un modèle. Un exemple. Une ligne de conduite à lui seul. Il était l'incarnation de la chevalerie. Elryk ne se lasserait jamais de voir cet homme exercer son pouvoir. Et chaque jour, il le servait avec plus de zèle que la veille.

Cependant il était vrai que ces derniers temps, une autre personne prenait de plus en plus de place dans l'esprit du Lord Rouge. Il avait passé des nuits entières à deviser avec Melissandre. Elryk avait toujours été déçu par les religions ouestriennes. Les anciens dieux? De vieux arbres blancs et morts depuis des millénaires. Les sept? Aucun n'avait jamais réellement répondu à ses attentes, exception faite de l'étranger à la rigueur. Mais surtout, aucune manifestation physique ou surnaturelle ne tendait à prouver leur existence. Mais ce R'hllor, et cette prêtresse rouge... Elle lui avait démontré que son dieu lui confiait de réels pouvoirs. Un dieu qui offrait des pouvoirs à ses fidèles existait forcement non? Depuis qu'il discutait avec Melissandre, Elryk avait atteint une sorte de paix spirituelle qu'il cherchait en vain depuis des années. Il reprit le cours de ses pensées en entendant la voix de son Suzerain.

- Tout de suite mon Seigneur.

Il vida sa coupe de vin d'une traite. Sa constitution hors norme lui accordait une résistance hors du commun à l'alcool. Il se leva et ceint à nouveau son ceinturon et son épée à ses hanches. Il enfila ses gantelets, mais ça ne l'empêcha pas de garder sa pipe allumée. Au prix que lui coutait le tabac, il ne comptait pas gâcher une demi pipe. Il se dirigea vers la porte et la tint ouverte pour laisser Stannis passer en premier, puis il céda le passage à Ser Davos. Il savait que le vieux chevalier, quand à lui, n'appréciait pas du tout la dame rouge. Le chevalier oignon était de la vieille école. Il n'était pas prêt à abandonner les anciennes croyances. Mais Elryk ne lui tenait pas rigueur. Ce n'est pas une divergence d'opinion sur la religion qui viendrait semer la zizanie entre les deux chevaliers. De plus, le service de Lord Stannis ne laissait de place à de futiles querelles internes.

Dans les couloirs, leurs pas résonnaient à chaque mouvement. Surtout ceux du géant qui portait son armure de plaque complète alors que Stannis et Davos portaient des tenues plus légères et confortables. Elryk estimait qu'un chevalier se devait de porter une armure en toutes circonstances. Surtout en présence de son Seigneur. Le cliquetis métallique était régulier. Les corridors de Peyredragon étaient d'habitude sombres, froids, et humides. Mais là, des torches étaient placées à intervalles réguliers, baignant la forteresse dans la lumière, repoussant les ténèbres au loin. On devait surement voir la lumière de Peyredragon depuis le Donjon Rouge.

Arrivé devant la porte de la chambre qui avait été attribuée à la Dame Rouge, Elryk frappa trois coups brefs et entra. La lumière était omniprésente dans la pièce, presque aveuglante. Un grand feu ronflait dans la cheminée. Plusieurs braseros étaient disposés au travers de la chambre, tous crépitant de flammes. Portant une robe légère sous une cape d'un rouge carmin à capuche, Melissandre était penchée au dessus de l'un des braseros. Lorsqu'elle entendit les trois hommes rentrer, elle se retourna et s'inclina devant Stannis et ses chevaliers.




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The Lords




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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime27.04.14 17:06





Mélisandre


La Nuit est Sombre

Et pleine de Terreurs


R’hllor, mon Dieu, mon feu, mon tout, ma loi, mon Roi. Celui qui illumine la voie, qui réchauffe nos cœurs. Tu es la chaleur et l’amour, tu es la vie. La nuit était tombée sur la baie de la Nera. Les pierres noires de Peyrdragon la rendaient invisible de loin les nuits sans lune, à l’exception des fenêtres d’où s’échappaient les lumières orangées des torches que la prêtresse Rouge avait suggéré à Selyse de faire allumer. Mais la lune, ce soir-là brillait d’une faible lueur argentée sur les flots furieux et sur le basalte, pendant que d’or et de cuivre étaient les feux de la citadelle. Dans l’une de ces pièces, Mélisande, le regard absorbé par les le feu d’un des nombreux braseros qu’elle avait fait installé, jouait avec les flammes. Elle passait et repassait la main dedans, sans peur de leur morsure, en appréciait la douce chaleur et l’éclat à nul autre pareil. Leur danse hypnotique et gracieuse semblait l’envoûter autant qu’elle envoûtait les hommes, mélange d’admiration et de crainte. Une chose qu’on ne peut toucher mais dont en sait qu’elle existe, une chose qu’on ne peut attraper, mais dont on sent l’immense pouvoir, une chose qui ne peut appartenir à personne, obéir à personne. Je ferais ce que tu dictes, je ferais tout ce qu’il fait, car si j’échoue, la nuit recouvrira le monde à jamais. Au dehors, la tempête faisait rage et les vagues se fracassaient en gerbes d’écumes sur les rochers sombres de l’île, mais à l’intérieur régnait un calme étrange, presque dérangeant. Elle se tourna un instant vers la fenêtre battue par le vent et les embruns déchainés. La nuit est sombre et plein de terreurs.

Lord Stannis était enfin revenu de Port-Real. R’hllor dans sa grande sagesse et par toute sa puissance l’avait ramené parmi les siens. Aux côtés de sa femme, mais surtout dans la puissante forteresse construite sur le fumeux Montdragon lui aussi fiévreux du pouvoir du Dieux des flammes. R’hllor lui avait amené un Prince, et ce Prince, elle l’avait vu dans les flammes était le Prince qui est promis. Grâce à lui, l’hiver qui s’annonçait, un hiver sans fin qui verrait le retour du Dieu glacé de la mort et des ténèbres, cet hiver avait une chance, peut-être, de prendre fin, un jour. Il devait la suivre, et pour cela tous les moyens étaient bons. Tout d’abord gagner les faveurs de son épouse, car même s’il ne l’aimait que peu, elle l’avait faite rentrée ici. Ensuite gagner ses hommes, pas tous, mais les plus importants si possible et si Ser Davos faisait de la résistance il en était un qui avait compris le pouvoir de R’hllor et le grand danger qui le guettaient tous. Elrik qui avait épousé ses croyances avec ferveur et qui était désormais son meilleur allié et se dévouait corps et âme à son Dieu tout comme à son Seigneur. Lui aussi persuadé désormais que le Baratheon était bel et bien ce Prince qui fut promis. Mais maintenant venait le plus dur, le gagner à sa grande cause, lui l’homme froid et laconique, l’homme qui avait fait coupé quelques phalanges à un homme qui avait armé chevalier pour la même raison. Sa droiture avait quelque chose d’aussi dérangeant que le regard rubis de la prêtresse, intéressant, mais dérangeant. Et pourtant, cela faisait de lui ce Prince qui vaincrait le Dieu Mauvais. De cela elle était persuadée, seul quelqu’un qui avait cette force en lui, pouvait y arriver, et lui, il l’avait, la force qui fait les grands souverains, le sens du devoir et de la justice sans compromis. Mais il ne semblait pas pressé de la rencontrer, alors elle prenait son mal en patience, car on ne bouscule pas le Prince qui fut promis, on ne force pas un Roi.

Un courant d’air fit vacillé les flammes du brasero et, par reflexe, Mélisandre tendit la main devant en écartant les doigts ce qui fit jaillir une plus grande flamme dans un grondement sourd. Un frisson la parcourut et elle prit une cape de laine aussi rouge que sa robe, ses cheveux et ses yeux pour s’en couvrir les épaules avant d’en rabattre la capuche sur sa tête. C’est alors que, détournée du feu, elle entendit des pas approcher. Evidemment le bruit métallique d’un Elrik en marche qu’elle reconnut tout de suite couvrait les autres, mais elle perçut malgré tout au moins un autre arrivant et elle était persuadée qu’il y en avait un autre.

Elle attendit donc, calme et sereine, un léger sourire sur les lèvres, face à la porte, devant le brasier qui éclairait sa chevelure d’une lueur plus chaude encore que d’habitude. Les mains jointes sur son bas ventre dans sa robe écarlate et recouverte d’une cape de la même teinte qui ne gâchait rien de sa taille fine de ses hanches féminines et de ses seins ronds, pas plus que la capuche ne dissimulait son visage en cœur.

Mélisandre s’inclina bas devant Stannis et posa les yeux sur Ser Elrik d’abord, inclinant légèrement la tête et fit de même pour el Chevalier Oignon avec, toujours, ce léger sourire.

__ Mon Prince, Messers. » Ajouta-t-elle simplement en se faisant.

Elle plongea alors son regard à la fois fascinant et effrayant pour le commun des mortels sur Stannis.

__ Les flammes ne m’ont pas menti sur vous Messire. »

La prêtresse s’écarta légèrement du brasero qui brûlait d’une nouvelle vigueur depuis quelques instants et en fit le tour avec sa démarche silencieuse et gracieuse pour se placer derrière.

__ Vous savez désormais qui je suis, mais savez-vous qui est R’hllor ? »

La belle et énigmatique jeune femme invita ses visiteurs à approcher du feu en tendant la main vers eux juste à côté des flammes qui chatouillaient son bras.



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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime22.05.14 15:28


Une très forte chaleur leur sauta à la gorge lorsque Mélissandre ouvrit la porte. A l’intérieur de la petite pièce où logeait la prêtresse rouge, un grand feu était allumé et dispensait ses éclats chatoyants depuis la gueule béante du braséro au sein duquel il couvait. Le Baratheon était un homme pragmatique et méfiant, il entra alors que la femme rouge s’inclinait pour l’accueillir mais ne sut se défaire de toute la raideur avec laquelle il s’appliqua à rester à l’écart de l’intrigante prêtresse.

Et qu’avaient-elles bien pu te dire ?, la questionna-t-il en silence alors qu’elle voulait leur faire croire que les flammes lui avaient parlé du Seigneur de Peyredragon. Il n’y croyait pas un instant. Il se refusait à ce Dieu Rouge comme à tous les autres. Aucun n’était réel. Il le savait. La mort tragique et soudaine de ses parents en était la preuve évidente. Il croisa les bras en la toisa de pied en cap. Son regard se porta ensuite sur Davos qui marmonnait quelque chose d’inaudible puis sur Elryk auquel qu’il questionna à voix basse tandis que la prêtresse contournait le grand brasero crachouillant.

– Que me veut-elle, le sais-tu ? Quels sont tes liens avec elle ?

Puis se reportant vers la servante du Dieu Rouge. – Il est impossible de parler aux flammes ! Qui pourrait croire à de telles sornettes ?

Il jaugea Mélissandre en silence. Son regard métallique et froid faisant œuvre d’analyse et de conjonctures. Qu’est-ce qui pouvait bien pousser une prêtresse de R’hllor aussi loin d’Essos ? Le feu… Les dragons ? Peyredragon… Il échafaudait en silence quelques hypothèses sommaires qui pouvaient éventuellement l’aider à comprendre.

Et alors qu’elle le questionnait à son tour concernant le Dieu Rouge, il jugea plus opportun de réserver sa réponse pour mieux lui rétorquer :

– Les dieux n’existent pas ! J’en ai eu maintes preuves ! Et s’ils devaient exister et se cacher de moi, je les hais et les maudits pour faire souffrir le monde et permettre atrocités et injustice ! Si vous parlez en son nom, à ce R’hllor, demandez lui ou répondez moi : pourquoi m’a-t-il pris mes parents ?

Le regard dur et la mine sévère attendaient, implacables, la réponse qu’elle essaierait de lui donner.
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Mélisandre


Mélisandre observait l’homme enfin face à elle avec autant d’attention qu’il ne le faisait avec elle, dans un calme absolu, elle tentait de percer à jour sa personnalité et son attitude en disait long sur ce qu’il pouvait penser. Tout d’abord, les bras croisés, signe de défiance et d’une volonté de garder ses distance et sa stature face à elle, artifice bien inutile, elle ne lui voulait aucun mal et ne cherchait pas à le tromper, et cette position ne servait pas son rang. Enfin qu’importe, si elle devait lui prouver ses pouvoirs et sa capacité à arriver à ses fins quelques qu’elles soient, elle le ferait, restait à savoir si ses objectifs étaient compatibles avec ceux du Dieu du Feu, car après tout, si elle servait Stannis c’était avant tout pour le servir lui. Et elle le servait lui pour sauver le monde, car la nuit arrivait, elle en tremblait, il était son espoir, le sauveur de l’humanité. Le fait qu’il ne se montre pas nécessairement prêt à tout croire lui semblait maintenant une évidence, comment la réincarnation d’Azor Ahaï pourrait être un naïf seigneur s’extasiant devant les flammes. Un tout autre homme que le laissait présager son épouse fébrile. Elle était contente de constater qu’il avait la stature pour faire ce qui devait être fait, maintenant qu’elle l’avait en face d’elle, elle pouvait en être certaine. A la question pour le moins inquisitrice de Lord Stannis, Mélisandre répondit par un sourire à la fois doux et assuré.

__ Certaines capacités des prêtres-rouge ne sont qu’illusion et tours de passe-passe… » Elle ouvrit sa main au-dessus du feu et les flammes jaillirent bleues et nettement plus grandes qu’avant, revêtant une chaleur étrangement froide. « Mais parfois, dans sa grande bonté, il octroie à certains de voir dans les flammes quelques bribes d’un avenir incertain. La nuit et sombre et pleine de terreurs Messire, vous-même ne sauriez nier cela… »

Mélisandre sourit à Stannis et s’approcha doucement de lui de sa démarche féline et gracieuse attendant sa réponse, ou une autre question, n’importe quoi. C’était à lui de faire avancer le débat, à lui de faire l’effort de comprendre, s’il le voulait bien, sans quoi tout dialogue serait inutile, il était trop fermé pour l’instant, buté dans son déni.

__ L’absence de preuve n’est pas la preuve de l’absence… Les Dieux n’existent pas, vos Sept, ils ne sont que le fruit de l’imagination débordante des hommes qui ont peur, une assurance de ne pas vivre ni mourir vainement, une transcendance de nos craintes les plus profondes et instinctives. Il n’y a que deux véritables Dieux, celui de la lumière, de la chaleur, de la vie et celui de la nuit, du froid, de la mort. Ces deux Dieux, ou plutôt dirais-je des entités énergétiques non personnifiées s’affrontent depuis la naissance de la terre avant même que l’homme ne soit homme, avant que les animaux ne peuplent les bois. Lorsque le soleil a commencé à réchauffer la boue glacée de ses rayons, c’est R‘hllor qui commençait son œuvre, il a gagné et notre existence, celle des animaux, des océans, du blé qui pousse dans les champs est la preuve de son existence, si nous voulons bien le voir. La nuit, le froid, l’hiver, lorsque tout meurt, les attaques de loups, les famines, tout cela est l’œuvre de son ennemi, et si nous sommes la vie, alors son ennemi est aussi le nôtre, car il est la mort. Si nous voulons continuer à peupler la terre, à aimer, à engendrer des fils et des filles, il nous faut combattre, nous aussi, si nous en avons la force, contre ce Dieu terrifiant qui nous glace le sang. » Arrivée assez proche de lui elle lui murmura à l’oreille : « Ce n’est pas R ‘hllor qui vous a pris vos parent, c’est lui, la Mort, celui que vous nommez l’étranger, combattez le et vous verrez que les pouvoirs de mon Dieu ne sont pas le fruit de l’imagination de qui que ce soit et qu’il ne se cache pas à qui veut bien le voir vraiment. »



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MessageSujet: Re: [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... [Baie de la Nera] Les brasiers du Dieu Rouge... Icon_minitime24.07.14 10:12


Les flammes s’élevèrent et grossirent, bleutées par quelque mystérieux tour de passe-passe. Stannis le savait. Il en était persuadé mais frissonna néanmoins à la vue de cette illusion vacillante… La prêtresse avait fait cela d’un geste désinvolte comme pour affirmer que tout ceci n’était que peu de choses pour elle. La nuit est sombre et pleine de terreurs, récita-t-il mentalement après elle. La femme rouge parlait d’avenir incertain. Savait-elle vraiment à qui elle disait cela ? Il était un de ces hommes indéfectiblement accrochés à des illusions de justice et de droiture qui échappaient au monde dans lequel ils existaient. Un de ceux qui avaient perdu la foi en ce monde et en l’existence qui était la leur. Il rêvait de paix et d’exemplarité mais passait chaque jour de sa vie à constater avec amertume qu’il n’était rien de tout cela qu’il pût côtoyer au quotidien.

Mélissandre entreprit de tenter de le convaincre et les mots qu’elle employait étaient percutants. Ses idées fortes. Sa foi profonde. C’était une évidence. Il l’avait initialement prise pour un de ces charlatans qui sillonnent les routes pour leurrer les pauvres gens et se repaître de leur crédulité… Mais elle semblait différente à présent qu’elle parlait de son Dieu. Ses convictions étaient réelles et longuement réfléchies. Il eut finalement soudain semblé que tous deux ne fussent pas si différents. Ils avaient foi en certaines choses, croyaient en des postures, en des idées. Et tous deux semblaient prêts à tout sacrifier pour cela.

Elle était habitée par les mots qui coulaient de ses lèvres vermeilles. C’était une évidence. Il se surprit à l’écouter avec intérêt avant de se ressaisir instinctivement dans un élan soudain et machinal de préservation. Son regard s’assombrit à nouveau et il se raidit lentement comme conscient de céder soudain aux charmes d’un propos pleinement investi à défaut d’être tout à fait convaincant.
Mais la femme écarlate venait de combler en quelques secondes lascives les quelques pas de recul qu’il avait esquissé pour mettre entre elle et lui une distance raisonnable de préservation instinctive. Et les mots qu’elle lui murmura à l’oreille résonnèrent en lui comme une révélation soudaine et une affirmation de quelque chose d’invisible et indistinct mais qu’il avait toujours su vouloir combattre. Le combattre ? L’idée avait toujours vécu en lui, habitant les recoins secrets de sa pensée, tapissant les reliefs de ses songes et de ses longues réflexions solitaires.

Il savait qu’il avait toujours souhaité cela. Il savait qu’il était sur terre pour une raison précise. C’était la raison de son existence parmi tous les pêcheurs qui l’entouraient. Il était ici pour faire ce contrepoids. Contrebalancer la bêtise paresseuse et débauchée de Robert. Combattre le mal et l’injustice. Lutter pour le droit et triompher pour la vérité. C’était pour cela qu’il était parmi eux

– Mais que dois-je faire ? Comment procéder pour atteindre la mort ? Comment vaincre quelque chose qui n’existe qu’après nous ? Il voulait être porteur de la lumière salvatrice dont elle parlait. – Prouvez-moi que vous pouvez me guider sur ce chemin !, ordonna-t-il comme à son habitude. – Mais prenez garde à ne pas trahir la confiance que je pourrais peut-être placer en vous… Ou vos feux se gorgeront de vos chairs ! La menace était réelle et à la mesure de l’espoir qu’elle avait fait renaître en lui. Son ambition dévorante et ses rêves de justice pourraient peut-être passer par cette prêtresse et ce Dieu mystérieux en lequel elle semblait tant avoir foi…


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Mélisandre


Mélisandre avait l’habitude de voir dans le cœur des hommes, de comprendre leurs intentions, de quel bois ils étaient faits et jusqu’à leurs pensées les plus enfouies en quelques mots et quelques regards échangés. Une vie dangereuse l’avait menée à cette science. Elle lisait en certains quand dans un livre ouvert, d’autres étaient plus complexes à déchiffrer, mais elle finissait toujours par toucher au but, du moment qu’elle décidait que cela en valait la peine. Stannis était un homme à part, et cela elle le voyait désormais, elle avait heureusement appris beaucoup de choses en conversant avec son épouse et ses gens, mais il lui manquait encore bien des éléments qu’elle ne parvenait pas à voir dans son regard. Elle espérait néanmoins le convaincre, c’était un homme droit, un homme de bien, elle n’avait aucun doute sur son destin grandiose et il finirait par en accepter l’idée, tôt ou tard. Mais mieux valait tôt que tard.

Stannis finit par répondre, tout près d’elle, elle sentait son souffle sur son visage. Les mots de la prêtresse rouge l’avaient touché, il était prêt à se battre, prêt à la croire, malgré quelques réticences encore, dû à son manque de foi, son incrédulité, son manque de confiance en la race humaine aussi probablement. Ces mots étaient inspirés par R’hllor, il ne pouvait en être autrement, ils étaient la lumière qu’elle pouvait et devrait lui apporter. Il avait écouté attentivement et avait compris les enjeux, épousé le dessein qui lui était proposé. Courageux, à n’en pas douter, il était parfaitement normal qu’il demande des preuves en échange, elle les lui donnerait en temps voulu. Elle lui sourit et déposa délicatement une main, aussi brûlante que l’ensemble de son corps, sur sa joue.

__ Merci Messire. Merci d’accepter de vous battre, de nous sauver tous. »

Elle s’inclina devant lui, prit doucement sa main dans les siennes et déposa un baiser dessus, l’effleurant à peine avant de se redresser et de plonger son regard rouge dans le sien, levant légèrement le menton alors que ses lèvres s’entrouvraient presque comme pour un baiser, mais uniquement pour parler :

__ R’hllor m’éclairera la voie en temps voulu et je vous dirais tout ce qu’il me montre, il vous faudra probablement faire des sacrifices, mais c’est le prix à payer pour ceux qui combattent le mal jusque dans les ténèbres les plus profondes pour faire triompher le bien. La mort est partout Lord Stannis, partout autour de nous, autour de vous, chaque jour, chaque minute, la combattre, c’est éviter que des gens meurent injustement, en cela vous la combattez déjà. Mais pour aller jusqu’au bout, vous devez retrouver la foi, retrouver le gout de la chaleur du soleil, vous devez croire en la vie. Venez Messire, approchez-vous du feu, laissez-vous pénétrer par ses flammes. »

Le tenant par la Main elle le conduisit vers le brasero et se mit à côté de lui, observant attentivement les flammes qui dansaient, cherchant à savoir par où commencer.

__ Mon Seigneur, je ne dirige pas les armées, je ne fais que voir où les conduire, je ne fais qu’entrapercevoir le chemin qui mène à la réussite, les bribes d’un destin encore à tracer, et ce chemin est sinueux et semé d’embûches, parfois même étrange. Mais vous, vous savez mener bataille, vous savez commander, unissons nos dons et je vous promets la victoire. Préparez-vous à la guerre, c’est tout ce que je peux vous révéler pour l’instant, je n’en sais pas plus. »

***

298 – Lune 12 - Semaine 3

Un matin brumeux s’était levé sur Peyrdragon quand Mélisandre se leva, écartant gracieusement le drap qui couvrait son corps nu. Elle se dirigea vers le brasero qui fumait et le ralluma avec un peu de bois et une poudre jaunâtre qui fit crépiter les flammes et dégagea une odeur irrespirable pendant quelques instants. Elle regarda longuement le feu qui grossissaient et réchauffaient peu à peu l’atmosphère humide. Dans le même temps, Stannis reçu un message de Robb Stark qui lui demandait de l’aide en vue de combattre les Marcheurs Blancs dont il venait d’apprendre le retour, voir l’existence…

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