La jeune Ashara Arryn accompagnait son grand père, Lord Yohn Royce au Mur, et avait été invitée avec lui à Winterfell par Lord Eddard Stark, forteresse où elle se rendit avec grand plaisir. En effet, c’était non seulement un lieu chargé d’histoire, siège des Rois du Nord et monument des Premiers Hommes, avec son Bois Sacré et ses tours imposantes, mais aussi sa ville d’hiver et sa crypte. Mais en plus, elle y trouverait Robb, l’héritier du Nord, jeune homme d’à peine deux ans de moins, qu’elle n’avait jusqu’alors jamais rencontré mais dont elle avait hâte de faire la connaissance. En effet, elle avait entendu beaucoup de bien de son père et espérait que son fils ainé soit fait du même bois, ce qui, le cas échéant, en ferait le meilleur prétendant possible d’après ses calculs. Et s’il était beau, cela n’enlèverait rien, même si pour elle, ce détail était franchement secondaire étant donné que ce qu’elle voulait était un beau mariage avec un homme du même rang qu’elle, ce qui n’était pas si simple. Elle se demandait donc si un garçon, qui certes avait l’âge d’être un homme fait mais qui risquait, du haut de ses quatorze ans, de ne l’être pas totalement, dans sa tête tout du moins, pouvait s’intéresser à elle. En tout cas, elle ferait tout pour !

Elle était arrivée la veille coiffée d’un tresse enroulée autour de sa tête avec une robe en velours bordeaux, recouverte d’un manteau en velours un peu plus foncé damassé de fins entrelacs bordeaux et bordé de fourrure noire doté d’une grande capuche. Elle était très ajustée en haut et montait jusqu’en haut du cou avec des boutons dorés, ce qui, sans rien montrer, suggérait ses formes féminines, et en bas elle était très large et très longue ce qui l’obligeait à la tenir pour marcher. Elle fit encore monter la pression d’un cran au banquet avec une robe de taffetas brun cintrée dont seule une large bande remontait de son sein gauche vers son épaule droite accompagnée d’une cape en brocart brillant gris foncé, bleu-gris bordé de broderies dorées. Ces cheveux étaient réunis en un chignon tenu par une pique en argent ciselé surmontée d'un faucon en vol, des mèches s’en échappant et gracieusement encadrant son visage. Elle-même fut étonnée qu’il fasse si bon dans le château, peut-être grâce aux sources chaude ou peut-être parce que Robb se montrait un jeune homme au delà de toutes ses espérances.

« Ashara Stark, Ashara Stark, Ashara Stark. Dame Ashara Stark… Suzeraine du Nord et épouse de Lord Robb Stark… Oui cela sonne bien, cela sonne magnifiquement bien ! Et puis le gris me va bien. Et il ne fait pas si froid… non… pas si froid… » Se murmura-t-elle avant de sombrer enfin dans le sommeil et de s’oublier dans des rêves où elle chevauchait dans la neige et scandait ‘L’Hiver Vient’ jusqu’au matin. Mais un songe étrange termina sa nuit alors que l’aube timide et embrumée pointait à peine son nez. Elle parcourait le Bois aux Loups, chassant un sanglier depuis plusieurs heures, son cheval et elle étaient éreintés et elle avait perdu la piste, lorsqu’un cerf immense croisa leur route les arrêtant net. Il bondissait et fuyait à vive allure, mais que fuyait-il ? C’est alors qu’elle aperçut un énorme loup, de ceux des légendes et des histoires qu’on raconte aux enfants pour leur faire peur, elle fit faire demi-tour à son cheval pour fuir à son tour. Mais c’était trop tard, il leur bondit dessus et au moment où elle allait, dans son cauchemar, toucher le sol, elle s’éveilla en sursaut pour se rendre compte qu’elle était en réalité dans un lit confortable.

Le Bois au Loup, mythique, magique, mystérieux Bois au Loup. Sans savoir exactement pourquoi, Ashara se sentait attirée par cette sombre forêt chargée d’histoire et de légendes tout comme les remparts de la citadelle de Winterfell qu’elle foulait à présent. Le soleil se levait doucement dans son dos et la cour, encore déserte lorsqu’elle y était montée s’animait peu à peu. Elle piaffait en faisant les cent pas, se demandant comment y aller, ou plutôt comment y aller, seule, car une chasse était bien prévu pour le lendemain. Mais avec tout le monde qui serait présent, les Stark, Yohn Royce et une bonne partie de sa garde, les fantômes ne se montreraient pas, l’âme des arbres millénaires resterait enfouie sous des siècles d’humus. Non l’odeur était trop alléchante, les frondaisons trop énigmatiques, et la jeune fille trop curieuse. Et ce rêve, que signifiait ce rêve, peut-être rien, mais ce cerf géant, ce loup garou, ils la hantaient, elle ne pouvait les ignorer et se sentait obligée d’y aller, d’aller voir par ses propres yeux.

Elle descendit l’escalier de pierre grise et traversa la cour d’un pas assuré en saluant les hommes qui s’inclinaient sur son passage. Dans la grande salle où elle entra vêtue d’une robe de velours noir brodée d’un motif doré sur le devant et dont le large décolleté laissait nues ses épaules et une bonne part de sa peau diaphane, le petit déjeuner était servi. Elle s’installa avec les enfants Stark, Ysilla et Ilda, les adultes qui avaient veillés plus tard encore qu’eux, n’était certainement pas encore levés. Elle tomba la cape, la même qu’à son arrivée, qui la couvrait entièrement jusqu’ici, révélant ses longs cheveux ondulés qui bordaient son visage avant de finir en une simple queue basse, desserrée, nouée d’un ruban écarlate. Comment convaincre quelqu’un de l’accompagner ? Sansa préférait a couture et la chaleur d’un bon feu aux vents de liberté d’une balade à cheval, Ayra était trop petite, Rickon encore plus, restaient Bran et Robb…. Mais Bran était encore bien jeune, personne ne le laisserait partir seul avec elle, or elle voulait être seule et s’il n’avait été indigne de son rang de partir au grand galop à travers la plaine, elle se serait certainement fait ce plaisir. Comme lorsqu’elle était enfant, sur la plage de Roches Aux Runes, lorsqu’elle pouvait encore faire la folle sauvageonne, à peine consciente de ses devoirs et de son héritage, et encore moins de ce que cela impliquait de retenue. Elle regrettait parfois ce temps, mais l’heure n’était pas aux regrets, il lui fallait trouver un plan d’attaque pour que l’héritier de Winterfell accepte de l’emmener dans son Bois…

Elle le regarda du coin de l’œil pendant une bonne partie du repas, en mangeant un morceau de tarte aux framboise accompagné de lait au miel, de brioche au beurre et de pain. Il y avait aussi des œufs,du fromage et du jambon, et bien sur des fruits et de la bouille d'avoine. Une fois rassasiée, ce qui ne tarda pas à arriver car elle mangeait peu, et encore moins le matin, elle discuta un peu, mais avant que chacun ne vaque à ses occupations, elle se leva et demanda :

« Messire Robb, auriez vous l’obligeance de m’accompagner à la roukerie ? J’aimerais voir mon faucon mais j’ai peur de me perdre dans cette immense forteresse. »

Elle lui offrit son plus beau sourire en espérant qu’il accepte cette première étape qui avait pour but de l’isoler de la meute, d'ailleurs, cette histoire de Bois aux Loups n'avait-elle pas le même objectif finalement ? Ce rêve n'était-il pas qu'un prétexte ? Quoi qu'il en soit, elle ne souffrirait aucun témoin à sa supplique, d'ailleurs il fallait à tout prix éviter d’ébruiter que cette étrange initiative venait d'elle.

Yohn Royce était un homme simple malgré son rang, pour le contenter un bon banquet bien arrosé avec des chants et des danses et une partie de chasse pour prendre l’air suffisaient. Il avait probablement rencontré Ned du temps où ce dernier était pupille aux Eyrié. Car il avait souvenir de bien des batailles sous ses cheveux gris et bien que sa carrure ne laisse rien paraître de son âge. Proche de Lord Jon, d’autant plus depuis qu’il avait à sa charge sa petite fille Ashara Arryn, Intendante du Val et petite protégée de la Main du Roi, il se faisait une joie de retrouver Lord Stark après tant d’années. Dix-sept pour être précis, dix-sept années de paix depuis la rébellion de Robert auquel il avait participé aux côtés de Jon Arryn. Mais être le grand père de l’Intendante du Val impliquait une suite importante, bien plus que celle avec laquelle il avait l’habitude de se déplacer. De plus, quelques nobles du Val l’accompagnaient, tels que Lord Corbray. Heureusement Winterfell et son hostellerie était largement assez grande pour accueillir la dizaine de chevaliers de la Garde Ailée, plus les reîtres chargés de sa protection et bien sur ses suivantes et ses serviteurs.

Contrairement aux autres demoiselles, Ashara était arrivée montée sur son palefroi gris - elle détestait les carrosses – et était descendue avec grâce et souplesse en bonne cavalière qu’elle avait avant de se présenter à la famille Stark avec tout le respect qui leur était dû. Elle avait l’habitude des convenances de cours et s’en montrait digne, mais elle répondit avec plaisir à toutes les questions de Lord Eddard sur Jon, Lysa et le petit Robert. Elle n’appréciait que peu la Tully, mais n’en laissa rien paraître, par contre il semblait évident qu’elle vouait une admiration sans borne à la Main du Roi, son grand oncle. Cependant, elle ne voulait pas accaparer l’attention du Suzerain du Nord et le laissa bien vite entre les Mains du Sire de Roche Aux Runes. Pendant que sa grand-mère faisait connaissance avec Lady Catelyn, elle et sa tante, âgée d’un an de moins qu’elles faisaient connaissance avec leurs enfants. Robb, évidemment, devant qui Ashara tacha de ne pas rougir, Sansa, douce, innocente, peut-être un peu trop au gout de la brune, Arya, dont elle apprendrait bientôt qu’elle avait plus de points communs avec elle qu’avec son aînée, Bran, adorable petit garçon et Rickon encore un poupon dont elle aurait aimé qu’il soit son fils. Il y eut aussi Theon, elle n’aima pas son regard sur elle, mais se tut, et Jon, un bâtard. Elle dégluti et évita de montrer le moindre dégout, car elle avait rapidement compris qu’il était considéré par tous comme un membre à part entière de la famille, enfin tous sauf Lady Stark. Mais elle s’en tint aussi éloignée que possible durant le banquet du soir.

Les loups. Etrange, encore petits, ils n’étaient pas trop impressionnants heureusement, et Ashara, vu sa relation avec son faucon était bien placée pour comprendre. Elle n’aurait jamais gardé Artys à table, mais un oiseau était tout de même différent d’un loup et cela l’amusa follement d’apprendre qu’Arya avait appelé la sienne Nymeria.

La brune fut ravie de retrouver tout ce petit monde au matin, même si ses pensées étaient  trop occupées à penser au Bois au Loup et à son rêve étrange pour discuter et trop absorbée par son plan pour détourner les yeux lorsque Robb croisa son regard insistant.  Heureusement, si le Greyjoy était un gros dégelasse, il était assez discret pour qu’elle n’entende pas ce qu’il murmura alors à l’héritier Stark. Il n’avait pas totalement tort, mais le lit avant le mariage était absolument inenvisageable et à vrai dire, quand Ashara pensait mariage, amour, famille, elle était loin de penser à quoi que se soit de sexuel. La dernière fois qu’elle y avait pensé, c’était il y a six mois, enfin, elle n’avait pas vraiment eut le temps d’y penser à vrai dire, mais le résultat était justement ce voyage et l’entrée de Raymar dans la Garde Nuit. Triste perte pour la Maison Royce et honte absolue pour elle, même si personne à part Yohn n’était au courant de la catastrophe évitée de justesse.

A l’instant où Robb se leva, lui faisant face de bien plus près que jusqu’alors et plantant son regard bleu dans le sien, elle sut. Il était à peine plus grand qu’elle, mais grandirait encore. Elle sut combien il était digne d’elle. Même s’il était plus d’un Tully que d’un Stark, il avait, dans ses yeux toute la force des Premiers Hommes, celle qu’elle avait maintes et maintes fois observée chez son grand père, ses oncles et qu’elle décelait sans mal chez Ned. Elle sut qu’il  serait un Suzerain exceptionnel. Le Jeune Loup n’était ni un prétentieux comme le Prince Joffrey qu’Ashara exécrait, ni pour autant un garçonnet manquant de l’assurance nécessaire pour gouverner et qu’elle n’avait elle-même acquis qu’à la douleur du doute et de la solitude de l’exercice du pouvoir. Elle sut qu’elle  l’aimerait. Aussi fort que Lady Catelyn aimait son époux et ce malgré leurs différences religieuses et culturelles, malgré la distance et le déracinement forcé, malgré Jon Snow, malgré le froid et le mal du pays. Et pendant qu’elle pensait à tout cela, lisant dans ses prunelles son passé, son avenir, ses pensées et celles de ses ancêtres, elle resta silencieuse esquissant, sans s’en rendre compte, un léger sourire. Aussi fut elle un peu longue à répondre, se rendant compte avec une pointe de gêne dans la voix qu’elle le fixait depuis un peu trop longtemps et n’avait pas répondu à sa question.

__ J’ignorais qu’il fallait sortir pour rejoindre la roukerie, heureusement que vous êtes là pour me guider, sans quoi je serais déjà perdue et probablement congelée. »

La brune fit mine de se figer tel un glaçon et se mit à rire doucement adressant un clin d’œil à Arya qui était de loin sa préférée et qui lui rappelait ses jeunes années d’innocence. Elle fit  une petite révérence à Robb et prit sa cape et son bras pour se diriger vers la sortie, il lui demanda alors si elle préférait sortir ainsi ou aller chercher un vêtement supplémentaire.

__ Vous êtes trop aimable de vous inquiéter de ma santé Messire Robb. En dame obéissante, je m’armerais donc d’un vêtement supplémentaire, surtout si vous me faite l’honneur de m’accompagner. »

Ashara sourit, espiègle, car même si le jeune homme ne la connaissant pas assez pour le comprendre, elle venait de lui dévoiler en quelques phrases tout ce qu’elle était réellement. Une Dame certes, une Arryn, aussi haute que l’honneur, consciente de ses devoirs envers sa maison et son peuple, mais trop intelligente pour être simplement obéissante et trop fière pour ne s’armer que d’un manteau et de larmes. En réalité, cette cape avait largement suffit à l’aube pour la protéger du froid et du vent qui soufflait sur les remparts de la forteresse, elle ne doutait donc pas une seule seconde qu’elle n’aurait pas froid dans la roukerie ni même dans la cours. Mais cela servait son plan, car elle ne pouvait prétendre ne pas craindre le froid du Bois aux Loups et peut-être n’auraient ils pas l’occasion de repasser par sa chambre. Ils marchèrent donc tous deux vers la chambre de la jeune femme, empruntant bientôt les escaliers de pierre grise qui montaient aux étages.
Enfin, ça n’était pas le tout d’être belle, encore fallait il lui montrer qu’elle avait un peu de conversation, mais ça n’était pas si facile de trouver un sujet qui ne soit ni trop polémique, ni trop personnel, pour l’instant.

__ Le Lord votre père nous a accueillit comme des Rois, Lord Jon ne mentait point quand il disait que c’était un homme honorable et bon, je suis ravie d’être votre hôte. Et Dame votre mère semble être une maîtresse de maison hors pair, le repas d’hier était parfait, et ma chambre est très agréable. Quand à vos frères et sœurs, ils ont partagé leur petit déjeuner avec moi avec tellement de simplicité et de joie que je me sens désormais comme chez moi ici. Même si l’œuvre de Brandon le bâtisseur est trop illustre pour que l’immensité des lieux ne me submerge pas un peu. »

La jeune femme se souvint avec émotion que la veille lors de son arrivée, elle n’avait pu s’empêcher de regarder les hauts remparts et le donjon de dresser durant toute l’approche de la colonne et ensuite depuis la cour. C’était incroyable ! Evidemment cela n’avait rien à voir avec la finesse du marbre immaculé niellé de bleu des Eyrié, ni même avec la hauteur des tours du Donjon Rouge. Cela était bien différent aussi de Hautjardin, Vivesaigues ou Castral Roc. Mais c’était immense, imposant, et ce sans être grossier. La forteresse respirait la puissance des Stark et la force ancestral des Premiers Hommes. De plus, il y avait dans l’atmosphère plus que fraîche de l’été Nordien quelque chose de magique qu’elle n’avait jamais ressenti auparavant. Elle avait beau croire aux Sept, elle ne pouvait que se rendre à l’évidence, ici, les Anciens Dieux étaient encore vivants et puissants, et elle se souvenait avec amusement de ses entretiens avec Ades Overton à ce sujet.

Ashara aimait ses Montagnes et son Val, elle les aimait plus que tout, peut-être plus encore qu’elle-même, en tout cas, elle avait toujours été prête à se sacrifier pour sa fabuleuse région et pour ses habitants. Mais elle avait visité presque toutes les Sept Couronnes et elle n’avait retrouvé nulle part ailleurs qu’ici l’odeur, les couleurs et les bruits de son Val d’Arryn adoré. C’était différent, évidemment, mais elle ne se lassait pas de la beauté des paysages noyés dans la brume matinale qui formait comme un cocon douillet autour de la campagne en éveille. Les immensités sauvages, le brouillard inquiétant et mystérieux, tout cela lui donnait des envies de liberté et lui rappelait son enfance de sauvageonne hirsute àcru sur son poney. Quand elle fermait les yeux, sentant le vent frais sur son visage, elle pouvait s’imaginer galoper à pleine vitesse dans cette contrée, l’air glacial lui fouettant le visage et lui faisant pleurer les yeux. La mer lui manquerait peut-être, mais c’était un sacrifice qu’elle pouvait faire, comme tous les autres qu’elle devrait faire. Seulement, ici au moins, elle retrouverait un peu de Roche Aux Runes, ici, elle ne serait pas toujours obligée de faire attention à tout ce qu’elle faisait disait ou portait. Elle pourrait être elle-même, loin de Port-Real et de ses faux semblant, loin de l’orgueil démesuré des Lannister, loin de la vie trop sucrée du Bief. Le nord lui ressemblait bien plus finalement et contre toute attente que n’importe quel autre coin de Westeros. Mais rien n’était encore fait et elle n’avait en réalité que très peu de marge de manœuvre, elle en était parfaitement consciente. Si une alliance arrangeait d’avantage Jon Arryn que celle-ci, elle aurait beau avoir réussit à séduire Robb – ce qui n’était pas d’avantage fait que le reste d’ailleurs – l’idée même de ce mariage n’aurait plus court. Cela faisait aussi partie de son devoir de Lady Arryn, unique fille Arryn à marier, unique espoir d’alliance, de le savoir, d’y être préparée et de l’accepter, non comme une malédiction, mais comme une nécessité qui servirait les intérêts de sa Maison et de sa région.

Ashara, suite aux compliments de Robb ne put empêcher ses joues de rougir violemment. Je lui plais ? Pour vrai ? Je lui plais ? Il me trouve charmante, il dit… Mais enfin espèce d’idiote, se ne sont que des politesses ! Oui mais il n’était pas obligé de dire ça. Te fais pas de films conte de fée. Pas de conte, pas de conte, mais quand même… il a dit que j’étais charmante.
Malgré l’émotion, qu’en tant qu’habituée de la cour, elle avait l’habitude de contrôler, voir de cacher, elle répondit du tac au tac avec un léger sourire, détournant d’abord le regard avec de faire une petite révérence.

__ Vous me flatter Messire, mais peu de jouvencelles se voient honorées de l’escorte de l’héritier de Winterfell en personne, aussi le plaisir est partagé. »

L’ascension fut longue et plutôt fatigante, sa longue robe forçait la brune à prendre garde de ne pas se prendre les pieds dedans à chaque marche. Elle aurait pu aller plus vite, mais pour cela il aurait fallut qu’elle soulève d’avantage sa jupe et c’était hors de question qu’elle découvre ses chevilles. Bref, toute sa concentration était nécessaire, aussi elle ne dit pas un mot. Une fois arrivés devant la porte de sa chambre, elle engagea la conversation, elle se sentait bête de ne l’avoir point fait avant.

__ Et moi, je suis heureuse d’y avoir été conviée et d’avoir l’occasion, grâce à ce voyage de visiter le Nord et de faire la connaissance de la Maison Stark dont j’ai si souvent entendu parler. »

La jeune femme sourit. Avait-elle comprit que Robb cherchait à lui signifier qu’il était heureux de la rencontrer ? Certainement, mais parfois il n’était pas aisé de faire le tri entre amabilités convenues et sentiments sincères, aussi se méfiait-elle de ce qu’elle pouvait comprendre entre les lignes. Elle reprit.

__ Vous excuserez mon chauvinisme, mais les Eyrié sont, pour moi, la plus belle forteresse de Westeros. Cependant, je ne peux que m’incliner devant la grandeur et la puissance qui se dégage de Winterfell. Si je peux me permettre un parallèle, ici, l’hiver est présent, mais dompté, apprivoisé, gardant sa rude beauté et la force des sombres-loups. Aux Eyrié, nous sommes perchés plus haut que l’honneur, dans la grâce du ciel dominé par le faucon. Il m’est impossible de véritablement comparer ces œuvres, je ne peux les voir qu’à travers leur histoire et leurs légendes, mêlées à celles de nos deux Maisons. J’ai toujours pensé que chaque chose sur terre avait une âme, même les constructions humaines, et j’aime l’âme de Winterfell. Quand aux légendes, j’avoue qu’il m’est souvent difficile de ne pas y croire tant il me semble impossible pour des hommes seuls d’avoir édifié de telles forteresses, mais l’homme n’est-il pas capable de choses extraordinaires quand il le veut ? Je continue de le croire en tout cas. Et vous, croyez vous à toutes ces légendes ? »

La brune était coincée, elle ne voulait pas écourter cet échange, mais elle ne trouvait pas très convenable de le laisser entrer dans ses appartements. Et puis n’était-il pas chez lui ? En tout cas, il s’arrêta sur le pas de la porte, ce qu’elle apprécia, néanmoins, elle n’aurait nullement besoin qu’il ferme la porte puisque elle en avait pour à peine quelques minutes. Juste le temps d’enfiler une sur-robe d’un épais brocart vert argent et bronze, simplement attachée devant sous la poitrine et dont les manches étaient évasées. Elle allait enfiler sa cape lorsque le jeune homme entra en proposant de l’aider, elle lui fit alors face en ouvrant de grands yeux sans savoir quoi répondre ni quoi faire. Elle resta ainsi figée tout le temps qu’il lui passait la cape sur les épaules et l’attachait, peut-être même cessa-t-elle de respirer. En tout cas il lui parut qu’elle reprenait vie quand il recula un peu. Elle n’aurait su dire si elle avait apprécié le geste ou si cela l’avait effrayé. Elle trouvait cela gentil, mais seulement maintenant qu’elle savait qu’il n’avait aucune mauvaise intention. Elle en oublia même de prendre sa seconde cape en fourrure et sans dire un mot, elle sourit timidement avant de répondre, d’un air aussi détaché et assuré que possible.

__ Avec plaisir Messire Robb. »

En redescendant, ils reprirent leur conversation. Ashara s’était calmée, même si elle repensait encore à ce geste qui l’avait plus surprise que choquée au final, d’autant qu’elle comptait bien entamer un tel contact, mais pas à ce moment là, pas dans sa chambre et pas comme ça. Oui, elle avait été surprise. Elle se demandait si elle n’avait pas fait une erreur en ne fermant pas la porte, il était relativement osé pour une dame de s’habiller devant un homme, même si en l’occurrence s’habiller n’avait consisté qu’à enfiler une couche supplémentaire. Enfin, elle trouvait tout de même que c’était adorable et qu’il avait fait preuve d’une douceur infinie dont elle n’aurait osé s’attendre de la part d’un homme.

__ J’espère sincèrement qu’un jour, mon grand père et moi auront l’occasion de vous accueillir à notre tour. Roche aux Runes est moins impressionnante que Winterfell, mais il y fait bon vivre, et bien que je ne monte pas souvent aux Eyrié en l’absence de Lord Jon, si vous vous rendez au Val, je vous y guiderais avec joie. »

Ses entrailles se serrèrent quand elle pensa à son père, heureusement, elle chassa bien vite cette pensée triste pour se concentrer sur son hôte. Elle se tourna vers lui et lui sourit tout en discutant et en traversant la cours évitant soigneusement de croiser tous les regards qui se posaient sur eux. Les hommes de Winterfell, les chevaliers de la Garde Ailée, beaucoup de monde était présent et leur passage bras dessus bras dessous ne passait pas inaperçu. Ils arrivèrent enfin à la roukerie.
Elle entra et se dirigea droit vers la cage de son Faucon, heureuse de le voir enfin, même si là n’était que la première étape de son plan pour aller au Bois aux Loups. Entendant l’ordre donné à son loup, Lady Arryn se retourna brutalement. Elle aimait son faucon de tout son cœur, un présent de Lord Jon, et ne tenait pas à ce qu’il se fasse manger par Vent Gris, elle demanda innocemment :

__ Est-que…vous pensez qu’il y a un risque ? Je… Je comptais le lâcher dans la cours pour lui permettre de se dégourdir les ailes… Mais si votre sombre-loup l’attaque, il pourrait bien lui crever les yeux pour se défendre vous savez. »

Elle resta devant la cage, donnant à Artys quelques morceaux de tarte à travers les barreaux et fixa Robb avant d’observer le sombre loup qui les suivait depuis le début. Il était encore petit, mais si elle en croyait les légendes sur ses créatures, il deviendrait énorme. Il semblait évident que si elle devenait son épouse, elle devrait s’y faire et surtout éviter de se faire manger. Elle aimait les animaux et ce loup était vraiment beau et semblait s’entendre à merveille avec Robb, mais on pouvait déjà sentir le danger qui en émanerait une fois adulte, néanmoins, c’était peut-être une bonne chose que Robb bénéficie d’une telle protection.

__ Vent Gris… c’est comme ça qu’il se nomme, n’est-ce pas? » Elle se tourna vers lui pour obtenir confirmation, mais à moins qu’elle ait mal compris les dires d’Arya, c’était bien ça. « C’est un joli nom. Tout comme Nymeria, Été, Broussaille ou Lady. » Elle sourit et se dit que c’était peut-être l’occasion rêvée. « Arya m’a raconté que vous les aviez rapportés du Bois aux Loups il y a peu, que leur mère avait été tuée par le bois d’un grand cerf. Nous parlions de légendes tout à l’heure, mais vous en avez six ici même, et bien vivantes. »

Ashara écouta attentivement Robb. Elle était d’accord avec lui, les hommes étaient capables de bien des choses, mais il était fort probable que les légendes aient une part de vérité. Quand à savoir ce qui était arrivé aux géants et aux loups garous, peut-être qu’avec le temps, le mur, ils s’étaient éteints ou en tout cas considérablement affaiblis. Mais Vent Gris était la preuve vivante que la magie de ces créatures n’était pas morte, peut-être même était-il la preuve qu’elle renaissait. Fallait il craindre qu’avec eux reviennent d’autres êtres ? Peut-être. Mais pour l’instant, la brune était loin de pouvoir concevoir le sombre avenir que cela présageait pour le Nord, pour l’instant, elle trouvait surtout Robb tout à fait séduisant et plein d’esprit. Aussi répondit-elle d’un simple sourire en se tournant vers lui avant de reporter son attention sur l’impressionnant faucon noir et blanc aux yeux, au bec et aux pattes jaunes qui la regardait avec insistance depuis son entrée. Quand elle s’approcha, il émit un petit cri aigu et pencha la tête avant de s’attaquer aux barreaux de la cage, il avait envie de sortir prendre l’air.

Quand elle eut la confirmation que le sombre loup se tiendrait correctement, elle prit le gantelet en cuir épais qui était posé à côté de la cage et s’en couvrit le bras droit avant d’ouvrir la cage. Le Faucon sortit avec plaisir et se posa sur son bras, elle prit entre ses doigts le lacet de cuir attaché à l’une de ses pattes, ainsi il ne put s’envoler mais néanmoins se dégourdir les ailes. Elle alla vers l’une des fenêtres et le laissa s’envoler, ce qu’il fit avec un grand cri de joie nettement plus fort et strident que le premier.

__ J’ai trois chiens, et croyez moi, ils ne cherchent pas mon faucon, ils ne savent que trop bien qu’il sait se défendre et lui n’a pas assez confiance en eux pour jouer avec eux, et pourtant ils arrivent à chasser en équipe. Se sont tous des tueurs, des tueurs obéissants, mais des tueurs quand même. J’ai beau les adorer et avoir de l’autorité sur eux dans la mesure où j’ai participé à leur dressage en ce sens, bien que je ne sois pas une experte, je ne laisserais pas un jeune enfant jouer avec eux sans surveillance. Voyez vous, quand un chien goûte au sang, il ne peut plus simplement jouer, pas en tout cas avec un animal aussi différent d’eux et aussi proche de ce qu’ils ont l’habitude de chasser, or les griffes et le bec de mon oiseau est si acéré que je dois moi-même m’en protéger. Le jeu est pour eux une manière d’apprendre à chasser et s’ils peuvent encore jouer entre eux, je ne m’amuserais pas à les laisser dans la roukerie ou dans un poulailler, ça finirait en carnage. »

Ashara leva les yeux vers Robb en riant doucement à l’évocation du nom choisi par Arya pour sa louve. Evidemment elle trouvait ce nom merveilleux pour sa part, mais les septas avaient toujours tendances à vouloir faire des filles des saintes ni touches faiblardes et pleurnichardes. Chose qu’elle exécrait, même si elle savait faire la part des choses, désormais entre son devoir de Lady et ses envies de liberté.

__ Moi je sais pourquoi, parce que les Septa ont la fâcheuse tendance à vouloir que les filles qu’elles éduquent deviennent de parfaite jouvencelles et non de parfaits guerriers. C’est surtout ça que je ne comprends pas ! » Répondit-elle du tac au tac avant d’hausser les épaules avec un air bête puis de rire franchement cette fois. Elle se reprit et continua « Arya est une jeune fille remarquable, le simple fait qu’elle connaisse l’histoire de Nyméria le prouve. »

A part à Dorne, les jeunes filles connaissant cette histoire n’étaient pas si nombreuses en Westeros, et encore moins au Nord.Enfin en tout cas celles qui s’en souvenaient puisque toutes les jouvencelles de haute naissance survolaient l’histoire de la Principauté et en entendait donc vaguement parler. Et le fait qu’elle ait nommé sa louve ainsi en disait long à la fois sur sa personnalité, sur son intelligence et sa culture et sur son ouverture d’esprit agrémenté d’un brin d’espièglerie car c’était certainement aussi une manière pour elle de fouler au pied tous les enseignements de sa mère.

Il parla ensuite du voyage qui les avaient mis sur le chemin des louveteaux, elle mit quelque secondes à comprendre pourquoi Lord Stark en personne était allé exécuter un déserteur de la Garde de Nuit.

__ Ah oui, l’homme qui prononce la sentence doit l’exécuter… » Dit le brune pour elle-même. « Je suis bien heureuse de n’avoir jamais eut à exécuter personne depuis que je suis Intendante du Val, et puis aux Eyrié il y a la porte de la Lune. Enfin, j’ai mené des hommes à la mort tout de même. Pas directement, mais à chaque fois que je passe la Porte Sanglante pour emprunter le défilé qui mène à la Route Royale, je prends le risque d’une attaque des Clans et donc devoir mourir les hommes de ma garde et bien sûr un grand nombre de ses sauvages. »

Autant la mort des hommes des clans ne lui faisaient ni chaud ni froid. Autant, même si elle n’était pas réellement proche de tous ses chevaliers et reîtres, elle honorait toujours leur mémoire avec le plus grand respect quelque soit leur rang. Mais certains sont faits pour mourir en protégeant les autres et d’autres sont faits pour vivre et gouverner ? C’était l’ordre des choses et elle n’y pouvait rien, à part peut-être éviter de se mettre en danger inutilement, mais ça, ça n’était pas son fort. En même temps, une femme comme elle pouvait difficilement vivre recluse dans sa demeure.

__ Oui, elle était très surprise que j’ai le droit d’y aller et je crains qu’elle ne m’en veuille si je la laisse à Winterfell. Il faudrait arriver à convaincre le Lord votre père de la laisser venir, après tout il y aura beaucoup de monde, elle sera sous bonne garde et j’ose espérer qu’elle ne gâchera pas cette chance de pouvoir se montrer responsable. Et puis qui sait, elle pourrait apprendre comment concilier le titre de Lady et sa passion pour la chasse. Je ne prétends pas être un exemple en la matière, mais si je peux l’aider en lui prouvant que ça n’est pas incompatible, autant que ma visite lui soit utile. » Termina-t-elle avec un sourire en coin.

En parlant de faucon, il revint se poser sur le rebord de la fenêtre avec un cri suraigu et du sang sur le bec et les serres. Ashara tendit sa main sur laquelle il vint se poser pour le remettre dans sa cage, il aurait l’occasion de montrer de quoi il était capable le lendemain.

__ Il s’appelle Artys, c’est un présent de Lord Jon pour mes treize ans. » Artys était le nom du semi-légendaire Chevalier Ailé, fondateur de la maison Arryn et premier roi Andal de la Montagne et du Val. Les légendes disaient qu’il chassa les Premiers Hommes et que, monté sur un faucon gigantesque, vola jusqu'au sommet de la Lance du Géant pour y abattre le Roi Griffon.

Elle s’accroupi à quelques pas de Vent Gris et tendis la main pour l’inviter à venir la sentir et faire connaissance en douceur.

__ Et toi Vent Gris, tu viendras chasser avec nous demain ? Ne veux-tu pas te dégourdir les pattes ? »

Elle leva les yeux vers Robb.

__ Ce matin, j’observais le Bois aux Loups du haut du rempart nord et j’imaginais pouvoir m’y balader avec vous. » Elle baissa les yeux vers Vent Gris et reprit en essayant toujours de lier un premier contact, elle parlait d’une voix douce, presque un murmure. « Nous étions tranquilles, aucun bruit ne venait troubler les chants des oiseaux, vous me racontiez ce qu’il représente pour vous. Demain se sera différent, il y aura tous ce monde, trop de bruit, les chiens, les chevaux, les gardes. Mais aujourd’hui… » Elle releva la tête et plongea son regard azure dans celui du jeune homme. « J’aimerais tellement le voir avec vos yeux, sentir l’âme du Nord, des Anciens Dieux et des Premiers Hommes dans ses frondaisons. »

Ashara sourit jusqu’aux oreilles en apprenant qu’il restait un espoir pour Arya de les accompagner à la chasse. Quand à la broderie, elle était ravie de n’être point obligée de participer à cela, car non seulement elle détestait ça, mais en plus elle n’était pas très douée. Afficher son manque de pratique devant ses hôtes n’était pas pour lui plaire. Elle espérait que Robb arriverait à convaincre Ned, mais elle comptait bien tout faire pour que la jeune fille puisse venir.

__ Si vous pensez que je peux aider, n’hésitez pas à faire appel à moi. Je ne peux hélas pas trop insister en ma qualité d’hôte, votre toit vos lois, comme on dit, mais qui sait, ma présence pourrait les convaincre. »

La brune ne fit aucun commentaire sur les qualités et le caractère d’Arya ni sur les préférences de Robb. Elle ne savait pas s’il faisait allusion à sa sœur Sansa, ou à quelqu’un d’autre, ou encore à ces gouts en matière de femme. Dans le premier cas le moindre commentaire aurait été désobligeant pour la jeune fille ce qu’Ashara ne pouvait se permettre. Car même si son avis sur l’ainée était déjà bien tranché, elle ne saurait l’insulter en Dame qu’elle était, d’autant qu’au fond, à part une trop grande naïveté, elle n’avait rien à lui reprocher. Dans le second elle ne savait pas trop de qui il parlait. Mais il n’était pas encore temps de faire preuve de toute la franchise dont elle était capable pour lui donner son avis sur les demoiselles de Westeros. Pour le troisième, peut-être que cette phrase la libera un peu, mais elle n’était plus la sauvageonne qu’elle avait été dans son enfance, elle savait désormais se tenir et était consciente de son rang et de ses devoirs. Enfin… elle était tout de même une toute jeune jouvencelle de seize ans à peine, elle avait ses faiblesses.

Elle fut ravie que Robb ait retenu l’histoire du Val dans ses cours d’histoire, elle sourit et répondit :

__ Tout à fait, Messire. Je vois qu’à Winterfell, ni l’éducation, ni l’entrainement, ni la culture ne sont négligés. »

Le regard du loup et sa méfiance ne furent pas ignorés par Ashara qui procéda avec la plus grande délicatesse et un brin de prudence. Effectivement, les loups étaient autrement plus sauvages que les chiens, mais ils avaient tout de même des comportements similaires. Aussi attendit elle qu’il vienne à son contacte et accepte de s’approcher avant de le toucher et le caressa ensuite en lui montrant par son attitude qu’elle ne lui voulait aucun mal. Elle lui parla doucement.

__ Tu n’écoutes qu’un seule personne hein. Ton maitre. C’est bien, c’est très bien. Tu es très beau Vent Gris, et tu n’as rien à craindre de moi, pas plus que ton maitre. Nous, les Arryn, nous sommes des amis des Stark, tu sais. »

Elle reporta ensuite son attention vers Robb qui venait de répondre à sa demande. Il ne semblait pas absolument opposé à l’idée mais émettait des doutes sur l’accord de Ned et Yohn et sur ce point il n’avait pas tort. Mais Ashara avait l’habitude de se faire engueuler par son grand père pour ses escapades et elle était prête à prendre toute la responsabilité. Mais serait-ce suffisant aux yeux d’Eddard pour ne pas punir son fils ? La brune n’avait pas peur, peut-être pas tout à fait consciente des dangers du Bois aux Loups, elle avait toujours pensé que son rang la protégeait de tout, mais elle s’interrogeait surtout sur les conséquences d’une telle désobéissance pour Robb et pour ses relations avec la Maison Stark. Il ne s’agissait pas de tuer dans l’œuf tout espoir de mariage pour une folie qui saurait bien attendre le lendemain. Elle allait plier quand Robb proposa une alternative des plus alléchantes. De hâte, de joie, elle se releva et lui sauta au cou.

__ Oh merci, se serait parfait, oui parfait. »  Elle se recula alors d’un pas et arrangea la cape de Robb d’un air gêné. « Hum, excusez mon enthousiasme, c’est que… je me disais que j’étais condamnée à attendre la chasse, mais votre idée est excellente et me redonne vie. »  Elle le prit par le bras et l’emmena vers la porte en poursuivant sur un ton guilleret. « Allons leur demander, il faut aussi que je demande à ce qu’on fasse préparer mon cheval, et que je prévienne Lord Yohn. »

Certes ils ne seraient pas tout seuls, mais il serait plus en sécurité ainsi et surtout cela prouverait à Ned que ni son fils ni Ashara n’étaient des irresponsables, Yohn aurait confiance et les relations entre les Maisons Stark, Arryn et Royce ne seraient pas mises en péril. Et puis avec un peu de chance, les hommes de Winterfell sauraient se faire discrets pour laisser les deux jeunes gens discuter en paix. Elle était aux anges et cela se voyait sur le visage souriant qu’elle présenta à Robb.

__ Quelle chance j’ai de pouvoir me rendre dans le Bois aux Loups avec vous en tout quiétude pour une petite promenade ! Je prendrais mon arc, ainsi, en cas de danger, je ne serais pas un poids mort pour vous et vos hommes. »

Ils redescendirent dans la cour pour organiser leur promenade, enfin, la jeune femme laissa surtout Robb faire en souriant et en se tenant de nouveau dignement à son côté à partir de l’instant où ils ne furent plus uniquement en présence du loup. Le fait est que, si Ashara était d’une nature trop curieuse et joyeuse pour le cacher tout le temps, mais elle était aussi trop fière et trop respectueuse pour se comporter de manière inapproprié devant des personnes de rang inférieur ou supérieur.

__ Je n’ai que peu de mérites si ce n’est pas passion pour l’histoire. Lord Jon a envoyé Mestre Udo pour parfaire mon éducation et ses enseignements se sont ajoutés à ceux du Mestre de la Maison Royce. J’ai eut beaucoup de chance d’avoir un Mestre rien que pour moi. »

Vent Gris était méfiant, mais il fini tout de même par se laisser caresser un peu. Ashara n’insista pas trop longtemps, c’était bien assez pour un premier contact et puis l’idée de Robb la détourna quelque peu de l’animal. Être une femme avait des avantages, mais aussi l’énorme inconvénient de ne donner que très peu de liberté, et pour la jeune femme qui en avait toujours été friande, c’était parfois pensant. Cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas pu se balader simplement à cheval sans être accompagnée de dizaines de chevaliers et de tout un tas de nobliaux pour un voyage d’Intendante ou une chasse. Et encore, elle estimait ne pas avoir à se plaindre, car au fond, Yohn avait été très permissif avec elle pendant des années et son statut lui offrait l’occasion de voir et de faire beaucoup plus de choses que la plupart des jouvencelles de son âge. Cet enrichissement de tous les instants faisait d’elle une femme sûre d’elle, charmante et cultivée, mais qui devait aussi sans cesse se tenir de manière impeccable et cacher ses émotions. Alors quand l’occasion de laisser tomber le masque de l’Intendante se présentait, elle la saisissait. Or sans savoir trop pourquoi, elle se sentait si bien ici et appréciait tant la Maison Stark et son accueil, qu’elle faisait confiance d’office à Robb et se permettait donc de prendre quelques libertés avec le protocole. Peut-être était-ce ces terres sauvages, hostiles et dures, peut-être la froideur du dehors qui réchauffait l’intérieur des cœurs, peut-être simplement le charme du jeune loup ou la prévenance d’Eddard et de Catelyn. Peut-être aussi le naturel d’Arya, la fraîcheur de Sansa, elle n’aurait su dire ce qui, ici, lui redonnait tout l’enthousiasme de son enfance.

Quand Robb répondit, elle craignit un instant qu’il se moque d’elle, peut-être effectivement en faisait elle trop, peut-être était-ce une erreur que de lui montrer qui elle pouvait être lorsque personne ne regardait. Mais pouvait-il seulement comprendre ce qu’on ressent quand le grand oncle que vous admirez tant vous met le poids d’une région entière sur les épaules à peine vos premières saignées survenues ? Oh elle n’était pas seule, à l’époque Mestre Udo et Nestor faisaient le gros du travail, moins maintenant même s’ils restaient tous deux ses principaux conseillers, les seuls d’ailleurs en qui elle ait entièrement confiance. Mais avec son sens de l’honneur et du devoir, elle n’avait jamais laissé bien longtemps à d’autres la responsabilité de prendre les décisions qui lui revenaient, et depuis trois ans, elle s’efforçait de comprendre pour faire ce qui est juste. Comme elle se sentait différente et isolée parfois, car malgré les conseils visés, elle était toujours seule face à ces décisions. Dans son monde, la liberté, les rires, les plaisirs simples n’étaient qu’un lointain souvenir d’une enfance radieuse entre terre et mer à Roche aux Runes. Et voila que l’occasion lui était donner de renouer avec ça, de retrouver une once d’innocence et de joie, sans craindre des conséquences déplorables pour elle, son fief, un fief allié, son hôte. LIBRE !

Elle resta donc interdite alors qu’il semblait souligner sa hâte et son enthousiasme déplacés, heureusement sa réplique suivante vint contrebalancer la pointe d’humour par une aménité à laquelle elle ne pouvait que céder. Elle sourit timidement puis suivit Robb dans la cour où il demanda qu’on prépare les chevaux nécessaires à l’escapade avant de se rendre dans la grande salle où se trouvaient Ned et Yohn conversant joyeusement.

Lorsque les deux Lords virent arriver Robb et Ashara bras dessus bras dessous, si l’idée de les marier ne leur était pas encore venue, elle émergea certainement dans leur esprit. D’ailleurs ils échangèrent un sourire amusé avant que, Yohn ne se dresse de toute sa stature dans son fauteuil en posant sur sa petite fille un regard sévère. Il connaissait bien la jeune femme, elle n’avait pas besoin de lui pour tenter de séduire Robb, d’ailleurs cela semblait être en bonne voie, donc elle venait certainement pour leur demander quelque chose, restait à voir quoi. Même si elle avait beaucoup changé et s’était assagit depuis plusieurs années, il l’avait connue fougueuse et sauvage et craignait que cette nature ne ressorte en de mauvaises occasion. Lui était tout à fait détendu et détaché du protocole, il n’y avait jamais été très attaché, mais il ne souhaitait pas qu’elle offense leurs hôtes d’une quelconque manière et surtout qu’elle laisse voir à son futur beau père à quel point elle pouvait se montrer fofolle.

La brune souriait en évitant soigneusement le regard de son grand père et tuteur officiel ne sachant que trop bien ce qu’il pensait et ce en quoi ses prunelles la mettrait en garde, mais refusant qu’il ne comprenne en regardant les siennes à quel point elle voulait ce mariage. Yohn insista alors que Ned s’était déjà tourné vers lui pour obtenir son accord. Elle finit par soutenir son regard et hocher très discrètement la tête en signe d’approbation. Alors le vieux chevalier sourit et regarda son hôte à son tour.

__ Qu’en pensez vous Lord Stark, pouvons-nous laisser ces enfants aller dans le Bois au Loup avec un seul chevalier et deux gardes ? »
__ Ser Rodrick accompagné de deux hommes est, avec mon fils tout à fait capable d’assurer la sécurité de Lady Ashara si c’est cela qui vous tourmente. »
__ Ah non, moi je me posais plutôt la question de la sécurité du Jeune Loup et de vos hommes seuls avec elle. » Répondit-il en éclatant de rire.

Evidemment cela ne reposait sur rien. Ashara, à moins qu’on s’attaque à sa famille ou à son fief n’était pas une femme dangereuse, et clairement, elle n’avait aucune mauvaise intention à l’égard de Robb. D’ailleurs elle était rouge comme une tomate et avait baissé la tête en lâchant le bras du jeune homme. Ned sourit mais ne rit pas, ne comprenant pas vraiment la plaisanterie et voyant la gêne de la jeune femme tout en se demandant s’il y avait une raison à cette réplique où si c’était juste pour rire. Yohn finit tout de même par se rendre compte qu’il avait créé un malaise et se reprit avant de dire :

__ Excusez moi, c’est que… Evidemment j’ignore les dangers du Bois aux Loups, mais j’ai du mal à imaginer qu’elle risque quoi que se soit dans une région dont on dit qu'une pucelle pourrait emprunter la route Royale sans crainte tant qu'un Stark réside à Winterfell. J’ai pu moi-même constater que les routes du Nord étaient très sûres, d’ailleurs mes chevaliers s’ennuient, eux qui ont l’habitude de devoir repousser les clans des Montagnes du Val. Trois… enfin, je veux dire, quatre hommes me paraissent suffisants effectivement, et puisque Lord Eddard me le confirme alors je ne vous aucune raison de leur refuser cette escapade, vous êtes jeunes, amusez vous, mais ne faites pas de bêtises ! »

Ashara fit oui de la tête et se retint de sourire, car au fond, elle avait bien plus peur de Yohn que de Ned et surtout elle pensait qu’il pouvait refuser pour qu’elle ne soit pas trop longtemps avec Robb, ce quia aurait été légitime après ce qui c’était passé avec Raymar si ce n’est qu’elle avait compris la leçon.
__ Ah je vois oui… et bien je le confirme, même si ses incursions de Sauvageons mettent parfois en doute cette affirmation, ces derniers n’ont pas de chevaux et possèdent de mauvaises armes et son rarement très nombreux à réussir à passer le Mur, aussi, je pense que nous pouvons leur autoriser une promenade, mais soyez rentrés avant le diner ! »

Là Ashara sourit franchement et jeta un coup d’œil ravi à Robb avant de rougir en croisant son regard et de le détourner en hâte, les mains sagement jointes devant elle.

__ Ah oui tout de même, moi qui pensait naïvement qu’il ne se passait jamais rien au Nord, je vois que je me trompe. Si Lord Stark l’autorise, elle peut prendre son arc au cas où ils feraient une mauvaise rencontre. Car toute pucelle soit-elle, Ashara n’est pas tout à fait sans défense. » Ned sourit en entendant les mots de Yohn
__ Je comprends mieux pourquoi ma cadette me tanne depuis votre arrivée pour aller chasser avec nous. J’imagine que vous n’êtes pas étrangère à ces nouveaux arguments… » Ashara leva la tête vers le Stark et ouvrit la bouche pour répondre, cherchant ses mots.
__ C’est… je… oui… enfin… je suis confuse de lui avoir donné des raisons de vous contredire. Je prends part aux chasses depuis si longtemps partout où je voyage que j’ai trouvé ça naturel de lui en parler au dîner hier et… Et… Heu… Je n’ai pas pensé qu’il n’en était pas de même pour elle. Elle était… si… passionnée. Je… » Ashara adressa un regard suppliant à Robb, pour qu’il la sorte de là. Elle ne s’en sortait absolument pas dans ses explications, elle savait mentir, mais refusait de faire ça à quelqu’un qu’elle admirait comme Eddard et c’était vrai qu’elle avait poussé Arya à demander à ses parents de venir en lui donnant des arguments. Pour autant elle l’avait fait sans arrière pensée, juste pour que, tout comme elle, Arya qui devrait tôt ou tard accepter son statut de Lady puisse trouver une folie avouable et compatible avec cela.

Ashara fut on ne peut plus soulagée lorsque Robb prit la parole pour l dédouaner de toute responsabilité dans le comportement d’Arya. Elle n’était pas certaine qu’il faille oublier si vite sa responsabilité dans les demandes plus qu’insistantes faites depuis le dîner de la veille, mais à priori, même Lord Eddard ne lui en voulait pas. Après tout son discours avait pu la pousser à reprendre l’offensive auprès de ses parents, mais c’était avant ton son caractère qui voulait cela, et nul parent ne peut lutter contre la personnalité de son enfant. Ned connaissait sa cadette et il était évident qu’il en appréciait même ce que d’aucun prendraient pour un défaut. Sur cette pensée, elle sourit donc à Robb qui la regardait à nouveau et dont le compliment ne la laissa pas indifférente, puis reporta son attention sur les deux Lords attablés. Le Stark confirma et elle fit une révérence en guise de remerciement pendant que Yohn s’étouffait avec du vin.

__ Je vous remercie Messire. » Répondit la brune profitant de ce court répit. « Je ne doute point que Robb et vos hommes sauront me protéger, mais vous n’êtes pas sans savoir qu’un archer est toujours un atout en cas d’attaque. Et puis, si je n’ai pas l’occasion de décocher une flèche aujourd’hui, j’attendrais demain. »

Un millier de plaisanteries et de remarques sur le passé houleux de sa petite fille et ses folies d’enfant lui virent en tête, mais il ne voulait pas faire la même erreur que juste avant en la mettant mal à l’aise ainsi que ses hôtes. Il était homme à rire de tout, mais il n’était pas prêt à réduire les chances de la brune de trouver la meilleur alliance possible pour la Maison Arryn et la sienne avec quelques souvenirs d’une époque révolue. Qui n’a jamais fait d’erreurs, n’est-ce pas justement le privilège des enfants ? Ashara n’en était plus une désormais, et il pouvait bien lui pardonner d’avoir été difficile maintenant qu’elle était aussi belle qu'intelligente et digne de son nom.

__ Elle est bien différente de ma petite Ysilla, et même d’Yvaine, sa mère, d’ailleurs, m’est avis qu’elle a d’avantage pris des Arryn que des Royces. Mais bien qu’il faille reconnaître que je suis loin d’être le seul à créditer d’un tel succès, je me souviens avec nostalgie de ses jeunes années et je me dis qu’il sera difficile de la laisser partir pour épouser une autre Maison. Enfin, c’est surtout Lord Jon qui décidera, mais nous voulons tous le meilleur pour nos enfants, particulièrement pour nos filles. »

Ashara avait pris autant des Royce que des Arryn au fond, mais elle avait le rang d’une Arryn et le caractère de Yohn, alors certes, cela pouvait parfois faire des étincelles. De plus, en l’absence d’un père et vu le jeune âge auquel sa mère l’avait quittée elle avait puisé dans ses rencontres et ses mentors les exemples à suivre, sans parfois savoir où se situer par rapport à son sexe. Alors qu’Ysilla voulait se marier avec un homme qui ressemblait à son père, Ashara voulait être à la fois aussi fort que lui, aussi intelligent que Jon aussi belle qu’Yvaine, aussi héroïque et parfait que le fantôme de son géniteur. Cela pouvait parfois faire beaucoup pour une jeune fille.

__ Vous en avez deux à marier aussi, vous savez de quoi je parle, et si je ne m’abuse aussi différentes l’une de l’autre que dans mon cas, sans compter trois fils. Je gagne ! » Scanda-t-il fièrement. « J’ai eut trois fils et trois filles, dont une que j’ai mariée à Elbert Arryn ! Mais Roche Aux Runes est plus petit, j’avais moins de chance de perdre mes louveteaux. » Ajouta-t-il en dodelinant de la tête avant de rire doucement. « Je vous félicite donc à mon tour ! La meute est fière et belle et je dois avouer que je confierais une de mes filles à votre aîné sans aucune inquiétude sur sa sécurité et son bonheur. » Termina-t-il en fixant Robb avec un sourire. Après tout, si Jon refusait une telle alliance pour Ashara, il avait tout intérêt à placer ses billes pour Ysilla dès maintenant.

La conversation se prolongea entre les deux hommes, mais après une petite révérence d’au-revoir, Ashara prit congé au bras de Robb, elle savait qu’elle aurait du mal à ne pas prendre part à la négociation, or ça n’tait pas son rôle et si Yohn pouvait tâter le terrain il n’en était pas moins que seul Jon pourrait prendre la décision finale la concernant. Elle en avait oublié son arc et tout le reste tant elle était contente de pouvoir s’offrit quelques heures de semi-liberté avec le jeune loup. Elle fut surprise et un peu inquiète lorsqu’il lui demanda pourquoi Yohn avait dit craindre pour la sécurité de Robb plus que d’elle, mais en voyant le sourire sur son visage, elle se rasséréna.

__ C’est mon très cher Seigneur Grand-Père en personne qui m’a appris à chasser. Peut-être est-ce la fierté d’avoir réussit à faire d’une simple femme une archère tout à fait correcte qui le pousse à mettre en avant le fait que je ne suis pas totalement sans défense. » Yohn savait aussi qu’Ashara avait longtemps appris à manier l’épée et qu’elle n’hésiterait jamais à se servir d’une arme pour tuer le cas échéant. Cependant, la jeune femme savait que le manque de pratique pourrait bien lui être fatal et hélas une Dame de son rang ne pouvait décemment pas passer des heures sur la lice. « Ou peut-être qu’il sait que je veux vous toucher au cœur. » Termina-t-elle, avec un sourire espiègle, après une courte pause, à voix basse pour que personne d’autre que lui ne puisse entendre.

Une fois arrivés dans l’écurie, Ashara jeta un coup d’œil à son cheval et au palefrenier qui s’en occupait. Son palefroi étant docile, elle n’avait à le mettre en garde contre rien et il semblait faire son travail avec soin. Elle le laissa donc faire tout en continuant sa conversation avec Robb qui à présent parlait de bienséance. Comment savoir si elle pouvait être elle-même, elle l’était déjà, un peu, en fait de plus en plus puisqu’il ne semblait pas prendre ombrage de ses quelques prises de liberté face au protocole. Mais de là à totalement l’oublier avec quelqu’un d’aussi important ? Oh et puis après tout s’ils étaient destinés à devenir mari et femme, pourquoi ne pas commencer à faire connaissance dès maintenant. Cela dit, la discrétion de leurs échanges était toute relative avec tous les domestiques qu’il y avait dans l’écurie et encore pendant la balade avec les gardes. Tous n’étaient pas doués pour la discrétion, bien au contraire, et si elle avait véritablement envie de faire confiance au jeune loup et hésitait de moins en moins à se dévoiler, il n’en était pas de même pour eux. Un rumeur naissait vite et pouvait faire beaucoup de dégâts pour l’avenir d’une jouvencelle de haut rang, sans compter que les Arryn étaient bien connus pour ne pas supporter le déshonneur. La brune fit la moue pendant quelques secondes et jeta un nouveau coup d’œil au palefrenier avant de reprendre son sourire et son air impassible pour répondre comme si de rien n’était.

__ Quelles règles de bienséance messire ? Ne parlons nous pas déjà en toute liberté ? Nous n’avons pas besoin de plus de discrétion, ni d’être seuls. » Fit-elle tout en faisant oui d’un bref hochement de tête.

L’incompréhension était totale, elle était à mille lieues de s’imaginer qu’il ne s’agissait que d’abandonner les titres. Et quand bien même, était elle prête à faire cette concession ? Il n’y avait que très peu de personnes à l’appeler simplement Ashara et moins encore à la tutoyer, parmi lesquels Ysilla, Jon, Yohn, ses oncles et c’était à peu près tout. Bref uniquement des gens de qui elle était très proche et qui n’oubliaient eux même les titres quand dans al plus stricte intimité. Mais bientôt ils seraient à cheval et hors des murs imposants de Winterfell, ils pourraient alors parler tranquillement, mais sans oublier les gardes. Restait à espérer que Robb n'aurait pas à regretter d'avoir fait oublier son arc à la jeune femme...

Alors que Yohn venait de lâcher qu’il marierait bien l’une des ses petites filles à Robb, ce dernier regarda Ashara qui rougit alors violemment et détourna les yeux. Foutu papy, toujours à tout gâcher en mettant les pieds dans le plat, et qui plus est à essayer de caser Ysilla tout en révélant le plan si bien échafaudé de la brune. Le jeune homme allait se douter de quelque chose, et cela faussait la donne. Enfin, il n’était pas vraiment temps de bouder et malgré le manque de finesse du Sire des Roche Aux Runes, son plan avançait, bientôt ils seraient tous les deux dans le Bois aux Loups, ils pourraient discuter et faire connaissance, sans les barrières des convenances, enfin presque. Alors au diable l’avarice, puisque le Bronzé avait tout dit, il était temps qu’elle soit sincère à son tour, sincère et charmante, charmeuse, bref irrésistible. D’autant plus facile qu’il lui plaisait. Ou d’autant plus difficile, peut-être… Ne devait-elle pas garder une certaine distance tout de même ? Le séduire, mais rester digne de son rang et digne de lui ? Quel casse tête ?

La réponse du jeune loup la fit sortir de sa réflexion tout féminine. Argh, si ses joues pouvaient cesser de devenir écarlate à tout bout de champ. Elle se garda néanmoins d’exulter, ravie que le charme ait opéré, mais prudente, d’autant que même s’il voulait il restait à convaincre son père et Lord Jon, au moins. En tout cas, ces mots l’avaient touchée, aussi sûr qu’une flèche…
Elle plongea son regard azur dans les yeux du l’héritier de Winterfell.

__ Vous êtes, vous aussi un excellent archer Messire, si j’en crois les battements de mon cœur et la couleur de mes joues. » Elle sourit. « Même s’il est un peu tôt pour le dire, j’espère que notre relation ne sera pas simplement amicale. Mais si les Dieux, les anciens et les nouveaux en décident autrement, alors je ne doute pas que votre gentillesse à mon égard restera sans écho. La valeur et la sincérité d’un mari vaut bien celle d’un ami. »

Ashara ne répondit ensuite rien à ce qu’il ajouta à propose de la bienséance, mais sourit à son clin d’œil. A ce moment là les gardes arrivèrent. Elle les salua d’un signe de tête et les gratifia d’un sourire.

__ Ce sont mes gardes qui vont être jaloux ! Merci Messers d’accepter de remplacer la Garde Ailée le temps d’une balade. »

La jeune femme se mit en selle avec souplesse, à califourchon puisque sa robe le permettait sans pour autant découvrir ses chevilles et se plaça à côté de Robb. Elle souriait en regardant le paysage et, parfois, Robb du coin de l’œil tout en évitant soigne soigneusement qui la voit le regarder et inversement, ou le contraire, elle ne savait plus trop. D’ailleurs au moment où il prit la parole elle le regardait depuis un bon moment avec un air niais.

__ Oh ! Par les Sept, mais vous avez raison… tu, tu as raison… Robb. Je, c’est… Y a-t-il vraiment un risque ? »

Comme il était déroutant et un peu effrayant de n’être entourée que de quatre hommes et d’être désarmée. Par réflexe, elle se baissa et toucha, à travers sa robe, sa botte droite. Sentant sa dague, elle fut un peu rassurée et se dit qu’il ne serait pas nécessaire de retourner prendre son arc. Elle aurait l’occasion de montrer à Robb ce dont elle était capable avec le lendemain et à moins qu’une troupe très nombreuse de sauvageons les prennent en embuscade, ils étaient montés, ce qui était déjà un avantage certain.

__ A moins que vous ne désiriez le contraire, je m’en passerais pour aujourd’hui, demain nous chasserons ensemble et vous aurez l’occasion de voir que Lord Yohn disait vrai, mais en attendant, je vous fais confiance ainsi qu’aux hommes de Sire votre père pour me protéger si le cas se présentait. Et puis… » Elle sourit, une idée venait de germer dans son esprit, une folie encore, mais tellement amusante ! « Ce serait l’occasion de savoir… lequel de nos chevaux est… le plus rapide ! »

En prononçant ces derniers mots, elle serra les jambes et desserra les doigts pour laisser bondir Honneur en avant dans un grand éclat de rire. Ils étaient encore loin du Bois et en terrain découvert, le risque était limité et l’équidé pouvait donner toute sa mesure, trop heureux de galoper à toute allure. La brune était aux anges, sa capuche était tombée et ses chevaux virevoltaient au vent tout comme les crins blancs de sa monture ainsi que sa robe et sa cape. Elle se tenait légèrement penchée en avant, sur ses étriller, et riait comme si c’était un jeu d’enfant de tenir en selle alors que son cheval filait comme le vent, frappant le sol de ses membres en soulevant des gerbes d’herbe et de terre. Sentir cette puissance entre ses jambes, c’était pour elle comme revenir plus de cinq ans en arrière, quand elle était une enfant et qu’elle galopait à cru sur la plage avec son poney, les bras en croix et le nez au vent. Ce sentiment de liberté absolue, elle ne l’avait plus ressenti depuis. Depuis la vie n’était que devoirs et convenances. Les oublier, c’était retrouver son innocence.

Mais quoi qu’il en soit, Honneur était un excellent cheval, rapide, doté d’un pied sûr et d’une endurance très correcte, mais il n’était pas le plus rapide de tous les chevaux, seulement le plus beau, aux yeux d’Ashara tout du moins. Il était donc tout à fait rattrapable, d’ailleurs, elle ne comptait pas semer ni les gardes ni Robb, juste un peu faire la course et surtout arrêter le temps. Elle ralentit un peu pour se mettre à sa hauteur.

__ Quand j’étais enfant, j’avais un poney qui s’appelait Embrun et tous deux nous battions la campagne et nous galopins sur la plage, les pieds dans l’eau. Il m’est même arrivé de me baigner avec lui. C’est un secret que je vous dis là, n’allez pas le répéter. J’ai bien grandi depuis, je me suis assagie. Mais à l’époque, je rentrais trempée, tout crottée, pleine de sel de sable et de boue et à moitié gelée à Roche Aux Runes. Grand-père s’arrachait les cheveux et hurlait ‘Mais cette enfant va attraper une pneumonie !’ » L’imita-t-elle de son ton bourru. « Alors les servantes se précipitaient pour m’enrouler dans un linge et me frictionner pendant qu’on me préparait un bain brûlant. Ensuite, il me faisait la leçon et me disait de prendre exemple sur la tante, mais cela ne changeait rien, j’aimais trop galoper, me baigner, n’en faire qu’à ma tête, être libre. Et j’ai bien fait d’en profiter, car si je suis très fière de la tâche qui m’a été confiée par Lord Jon Arryn et que je ne changerais de rien, même si je le pouvais, cela me pèse parfois. Et alors, quand les doutes m’assaillent et que je me sens seule, je repense à ses moments… »

Avec cette folle galopade, ils furent vite arrivés au Bois aux Loups qui, d’une vague marée vert sombre commençait à se dessiner peu à peu en un endroit mystérieux. Un palais de la Nature, celui des Anciens Dieux très probablement, les grands troncs noueux d’arbres centenaires comme colonnes soutenant la voûte des feuillages ondulant dans la brise. Elle s’arrêta comme elle avait démarré. Net. Le souffle presque coupée par la beauté et la magie des lieux.

Ashara se retourna vivement vers lui quand il parla de son poignard enfin du fait qu’il lui semblait qu’elle en possédât un. C’était le cas mais… comment avait-il pu voir, le geste avait été si rapide, presque imperceptible. Personne ne savait qu’elle était armée en permanence, enfin presque personne. Rares voir inexistantes étaient les fois où elle avait eut l’occasion de s’en servir, étant donné qu’elle étai généralement très bien protégée et que pour l’instant personne n’avait jamais tenté d’attenter directement à sa vie. Elle le dévisagea quelques instants entre suspicion et peur, espérant de tout cœur qu’il n’aille pas crier son secret sur les toits.

__ Vous m’avez percé à jour. Mais j’espère que vous saurez garder le secret d’une Dame qui n’a qu’une dague pour contrer haches et épées. »

Tout le reste, les informations sur les sauvageons et leurs attaques de plus en plus fréquentes était plus ou moins passé à la trappe, même si Ash avait retenu le principal à savoir qu’elle pourrait se passer de son arc et que leurs chevaux étaient un atout indéniable. D’où la petite course improvisée tant que les dangers de la forêt étaient encore loin.

__ Par les Sept, si votre Septa savait ça, elle ne me verrait plus du même œil, imagine seulement qu’un jour elle élève nos enfants et dise au plus espiègle d’entre tous ‘Tu es bien comme ta mère !’ Je ne m’en remettrais pas, et mon honneur non plus ! » Répondit-elle du tac au tac en riant. « Je dois garder ce secret, et tu le dois aussi. Mais j’essaierais de faire comprendre à Arya qu’on peut être une Dame tout en gardant son caractère ainsi que quelques espaces de liberté pour continuer à vivre comme dans nos rêves d’enfant malgré nos devoirs, cependant, je n’ai aucun espoir pour votre Septa, elle est perdue pour notre cause, je le crains. »

La brune sourit avec bienveillance.

__ Elle me rappelle moi il y a quelques années, ta sœur, Arya. Une gamine sacrément courageuse et intelligente. C’est déjà ma chouchoute je crois bien. »

La jeune femme marqua une pause et repris sur un autre sujet abordé par Robb, un sujet qui lui tenait à cœur et dont les occasions de parler étaient rares, elle répondit donc avec tristesse.

__ Oui, parfois on voudrait oublier ce poids et redevenir un enfant, mais nous devons honorer nos maisons. Je t’envie tu sais, car tu n’es pas tout seul, tu as un père qui est un suzerain apprécié de tous, une mère digne de son rang et de son nom et tout une tripoté de frères et sœurs qui t’aiment. Mon grand oncle est un homme extraordinaire, un grand Suzerain et une Main dotée d’un réel sens politique, mon grand père est un homme bon et j’ai une tante et des oncles que je considère comme des frères et sœurs. Mais je ne suis pas une Royce, je suis une Arryn et Jon est loin de moi à Port-Real, hélas. Ma mère est morte et mon père aussi, on m’a souvent parlé de lui, mais j’aimerais m’en souvenir. Parfois, malgré tout le monde qui m’entoure et m’aime, je me sens orpheline, ni vraiment Arryn ni totalement Royce. Lorsque j’aurais ma propre famille, je saurais exactement à quelle Maison j’appartiens. »

Ashara se tut un moment et retint ces larmes, mais sourit légèrement aux propos de Robb sur les galopades dans la forêt. Il était évident qu’ici c’était trop dangereux, et si Ashara pouvait parfois sembler téméraire, elle détestait mettre les autres en danger sur un caprice. Or, si elle faisait n’importe quoi, non seulement les hommes qui les accompagnaient pourraient angoisser, voir même se faire enguirlander, ou pire s’il lui arrivait malheur. Ils pourraient se faire tuer pour la protéger, et cela, elle le respectait plus que tout au monde. Elle hocha la tête en guise de réponse affirmative.

__ Elle est magnifique en effet. Je n’ai jamais rien vu de semblable et pourtant, il y a des fortes somptueuses dans le Val. Savez-vous pourquoi ils sont de plus en plus nombreux à se retrouver de ce côté-ci du Mur ? Les Frères Jurés de la Garde de Nuit ne sont ils pas sensés empêcher cela ? »

Ils entrèrent au pas sous les frondaisons frissonnantes dans le vent frais et Ashara regardait avec des grands yeux ébahis les troncs énormes. Sa poitrine se gonflait, humant avec plaisir l’odeur de l’humus et des champignons. Sur l’épais tapis de feuilles mortes, les chevaux semblaient marcher sur des nuages même si parfois une brindille craquait sous leurs pas. Le silence même ressemblait à une symphonie chuchotant la mélodie de la nature et du nord, des anciens dieux et des Rois Loups aux oreilles de la brune. Elle s’arrêta et ferma les yeux pour mieux écouter. Car c’était, en dehors de son plan pour charmer Robb, aussi cela qu’elle voulait, écouter le Bois aux Loups dans ce qu’il avait de plus intime, tenter d’en saisir l’essence pour mieux comprendre celle des premiers hommes et des nordiens de qui, si leurs parents et les anciens et nouveaux dieux le voulaient bien elle serait un jour la suzeraine. Elle devait les comprendre pour mieux les gouverner, elle devait aimer cette région autant qu’elle aimait le Val, et elle sentait depuis qu’elle était arrivée mais plus encore en cet instant, que c’était possible. Il y avait ici quelque chose de sauvage et d’indomptable et ce même sang coulait dans ses veines et battait ses tempes comme si, lui aussi retrouvait ici ce qu’il avait perdu dans le Sud. Ce sang, c’était celui des Royce, celui des premiers hommes, celui de la chasseuse qu’elle avait été avant de devenir une Dame, celui de la petite sauvageonne qui plongeait tout habillée dans les vagues et courrait dans la boue. Elle souriait doucement, les yeux toujours fermés respirant tout doucement pour ne rien rater de cette chanson que les oiseaux et le vent jouaient pour elle.

__ Je les sens Robb… les Anciens Dieux… je les entends… »

Murmura-t-elle au bout d’un long moment sans rouvrir les yeux, ni avancer, ni même bouger un cil, toujours dans sa prière silencieuse à des Dieux auxquels elle n’avait jamais appris à parler. . Elle se souvenait des lettres échangées avec Ades Overton sur leurs religions respectives, comme il avait raison, et comme, grâce à cette visite tout devenait était une évidence maintenant. Ils étaient là, partout, en toute chose, ils étaient puissants ici et ils les entouraient comme une puissance magique, douce et dangereuse à la fois. Ils étaient dans l’écorce des arbres, dans les feuilles et dans le vent, dans les bogues ouverts, dans le ruisseau et dans le ciel, dans le rossignol qui chantait au-dessus d’eux, dans les bruits furtifs qui agitaient les fourrés…

Quand Robb dit que leurs enfants pourraient être fiers d’être comme elle, Ashara se mit à rougir et détourna le regard. Elle espérait qu’il soit sincère, elle le croyait véritablement d’ailleurs, le jeune loup paressait être quelqu’un de profondément juste et franc, tout comme son père, et c’était le plus doux compliment qu’on lui ait jamais fait. Elle était sur un petit nuage de constater qu’elle ne s’était pas trompée en décidant de jeter son dévolu sur lui, et même qu’il dépassait ses espérances. Malgré le fait qu’il soit encore si jeune, à côté de lui, les hommes du sud, plus intéressés par leurs beaux atours et leur petite personne, passaient pour une bande de femmelettes frivoles. Elle aimait la gentillesse mêlée de sagesse dont il savait faire preuve.

Quatorze ans vous dites ? Beau et fort comme un homme pourtant ! se dit-elle en le dévisagent sans s’en rendre compte dans le silence frémissant de la forêt. Fiouu, c’est moi où il fait chaud ? Pensa-t-elle en regardant un instant le paysage et en laissant tomber sa cape de ses épaules sur la croupe de son cheval. Elle reporta on attention sur lui et repris le cours de sa pensée…

Et si je vieillis trop vite, et si je deviens moche et rabougrie avant lui et qu’il cesse de m’aimer ? Oh, je suis sûre qu’il fera son devoir, qu’il me restera fidèle, mais comment le rendrais-je heureux ? Il a un frère bâtard tout de même, son père a fauté… Bon, c’était la guerre. Mais tout de même ! Ned Stark… un bâtard… franchement, si je l’entendais de la bouche d’un autre, j’en rigolerais et je n’y croirais pas un instant. Enfin, il existe néanmoins. Mais il est né lorsque Catelyn était jeune, donc rien à voir avec l’âge, probablement un moment d’égarement après une bataille sanglante, oui… probablement.
Je… bon, j’ignore comment ça marche, mais je ferais tout pour qu’il continue de m’aimer et de me désirer, encore et encore, jusqu’à notre mort, il sera si fou de moi qu’il ne pourra en toucher une autre. Il faudra que je me renseigne, car il doit certainement être aussi inexpérimenté que moi. Enfin… pas sûr, il est si séduisant. J’imagine que les jeunes filles du Nord doivent toutes être à ses pieds… je ferais dévisager la première qui osera poser ses yeux sur lui… mais c’est un homme bien… y a-t-il déjà gouté ? Je ne pourrais pas lui en vouloir, d’autant plus que…
Je suis horrible, je ne le mérite pas ! J’ai déjà embrassé un autre homme ! Pardonnez-moi, Nouveaux et anciens Dieux je vous en supplie pardonnez mon pécher, mon très grand pécher, je ne recommencerais pas, jamais, avec aucun autre que lui. Je le jure. Il est si beau, si parfait, comment pourrais-je en aimer un autre ? S’il vous plait, faites que nos parents nous marient ! Je vous en supplie ! Je ferais de lui le plus heureux des hommes, je serais une bonne épouse et une bonne mère pour ses enfants.

L’arrivée des deux gardes brisa ce moment magique où Ashara passait par toutes les couleurs possibles pour un visage du rouge au blanc en fonction de ses pensées. Elle leur jeta un regard et en croisant celui de Rodrik qui ne cautionnait pas un instant sa folie, elle se retourna brusquement et fixa ses mains qui tenaient les rênes, un peu honteuse. Mais elle souriait, parce que ça avait été si amusant, et si agréable d’être seule avec lui quelques instants. Elle soupira lentement et rougit à nouveau avant de murmurer.

__ Ça sonne très bien oui… Je ne lui fait pas dire, j’ai testé hier avant de m’endormir. Et j’ai grand hâte de faire partie de votre famille. Je ne devrais pas m’emballer ainsi, rien n’est fait et rien de garanti que nos parents seront d’accord, mais je prierais chaque jours pour cela, parce que c’est ce que je souhaite le plus au monde. »

Elle releva la tête et adressa un petit sourire timide à Robb. Alors qu’ils entraient enfin dans le bois suivis des gardes et précédés des lièvres qui les fuyaient, discutant de la forêt puis des sauvageons et de la garde de Nuit, elle pensa à son frère qui allait rejoindre le Mur. Elle était heureuse que sa famille contribue à la défense contre les sauvageons, même si c’était pour de mauvaise raison. Waymar était un bon combattant, il ferait une bonne recrue, même si une personne n’allait pas changer la donne concernant le manque d’effectifs.

__ Pourtant, les hors la loi ne manquent pas dans les Sept Couronnes. Enfin, j’imagine que ce ne sont pas les meilleures recrues, et les pères doivent hésiter à donner leurs fils à un ordre aussi lointain, dangereux et peu glorieux au vue de son effectif. Sans compter qu’ils perdent tout droit de prendre femme et terres, ou même de revenir chez eux pour prendre la suite si les autres héritiers venaient à mourir. Je peux comprendre que ça ne soit pas une priorité pour eux, surtout les gens du sud qui sont bien loin des problèmes que cela engendre. Heureusement, vous veillez. Et les Frères Jurés de la garde, aussi peu nombreux soient ils semblent faire du bon travail. Et puis, vous l’avez dit vous-même, les sauvageons sont dangereux car ils n’entendent pas les règles de la société, mais ils n’ont ni chevaux ni armures ni bonnes armes, ils ne représentent qu’une menace relative finalement. Non ? »

Sentit toute la puissance des Dieux dont elle avait parlé avec Ades. Des divinités connectées avec la nature qui les entourait, elles étaient dans la terre, dans les arbres, dans les animaux, à l’intérieur de leurs chevaux et d’eux même.

__ Ton Bois est tout à fait à la hauteur Robb, tout comme toi... c’est magnifique et magique, les mots me manquent en réalité. Vieille Nan ? Est-ce la femme que j’ai vue avec les petits hier soir ? Elle doit connaitre bien des histoires vu son âge, quand à démêler le vrai du faux, j’imagine que ça n’est en rien le but de ses contes. Comment savoir ce qui existe au-delà du Mur, c’est si vaste et si mystérieux. Enfin, j’imagine que s’il y avait vraiment des géants ou des mammouths, la Garde de Nuit vous aurait averti. »

Après un moment à humer l’air les yeux mis clos, elle les rouvrit pour de bon et observa les alentours en se remettant au pas. Il y avait certes des énigmes dans cette foret, mais aussi des choses tout à fait palpables ou en tout cas audibles et dont les traces étaient visibles. Elle eut un sourire et dit :

__ La chasse sera excellente demain, nous allons bien nous amuser. Regardez. »

Elle montra du doigt des traces de sanglier qui se dessinaient parfaitement dans le terrain boueux à quelques mètres de là. Au vu de la taille des empruntes et de leur enfoncement dans le sol, il devait être d’une taille impressionnante.

__ Je n’ai jamais vu de bête aussi grosse. Est-ce ainsi dans le Nord ? Votre gibier est-il toujours si grand ? Cela ne doit pas être facile d’en venir à bout, et dangereux en plus de ça. Je comprends mieux pourquoi le Lord votre père refuse de voir sa petite fille y participer. Et vous, aimez-vous chasser ? »

Demanda-t-elle en tournant la tête vers Robb avec un sourire.

Ne nous emballons pas, non, mais c’était difficile de ne pas s’emballer, tout était tellement parfait. Sa raison lui disait de rester maître d’elle-même, mais son cœur lui faisait bien ce qu’il voulait, à savoir, justement, s’emballer. Ashara, à l’instant, aurait voulu crier au monde entier qu’elle était amoureuse. Elle aurait voulu faire demi-tour et galoper à toute allure jusqu’à Winterfell pour annoncer à son grand père et à Lord Stark qu’elle voulait Robb pour époux et que s’ils lui refusaient cela elle se ferait septa. Cela dit, ce moment dans les Bois avec lui était si magique, qu’elle n’avait pas envie de l’interrompre. Elle espérait qu’il y en aurait des milliers d’autres par la suite, des moments où, mariés, ils pourraient même s’embrasser et se tenir par la main. Cette pensée la fit rougir pendant qu’elle regardait le Stark avec un petit sourire.

__ Ah Jon veut rejoindre la Garde ? » Bon débarras, et pour une bonne cause en plus, se serait parfait. Bon, ça ne semble pas réjouir Robb, cela dit… C’est son demi-frère… mais c’est un bâtard tout de même ! Elle rougit violemment lorsqu’il parla du choix de son oncle qui en fait ne venait absolument pas de lui. « Oui… heu… heureusement… C’est très bien… En plus c’est un excellent chevalier. » Changer de sujet viiiiiiiite !! « Pour Jon, c’est peut-être la meilleure solution. Il servira une cause juste et noble malgré sa naissance et il aura ainsi un statut différent de celui qu’il pourrait avoir en restant à vos côtés. Je comprends que cela vous chagrine, je comprends aussi que vous vous en vouliez de souhaiter qu’il change d’avis. Nous sommes humains, nous aimons notre famille et nous aimerions ne jamais en être séparés, mais c’est ainsi, et c’est peut-être mieux pour lui. »

Elle pencha la tête sur le côté et sourit, avançant une main vers la joue du jeune homme avant de se raviser et de jeter un coup d’œil aux deux hommes qui les suivaient à quelques mètres de là pour leur laisser gentiment le loisir de discuter. Malgré tout ils les observaient tout en surveillant les environs et ils ne faisaient aucun doute qu’ils étaient parfaitement conscients de ce qui se tramait entre les deux adolescents.

__ Pour le moment… » Répéta-t-elle alors bêtement en regardant l’horizon, droite comme un I sur son cheval, essayant de reprendre sa stature digne après avoir failli à son rang en avouant ces sentiments à Robb et en se montrant aussi entreprenante.

Robb parla ensuite des géants et des mammouth, il laissa entendre qu’il en subsistait peut-être très loin au Nord, bien après le Mur, qu’ils n’avaient plus été vus depuis si longtemps qu’ils étaient devenus des légendes, mais que, comme toute légende il devait y avoir une part de vérité et que rien ne prouvait qu’ils n’en existait plus du tout car les frères jurés n’allait pas jusqu’au fin fond du septentrion. Elle laissa planer dans son esprit la possibilité que ces légendes soient vraies, elle aimait bien l’idée, bien qu’elle soit un peu effrayante, elle restait trop lointaine pour être dangereuse.

__ Moi j’adore, ça, même si j’ai moins l’occasion de m’adonner à cette passion depuis que je suis intendante du Val. Cela dit, la chasse reste le loisir le plus noble qui soit à mes yeux, d’autant plus que mon grand-père m’a un jour dis que c’était une nécessité que de juguler ainsi les populations de gibiers pour que les bois gardent une bonne harmonie. Je trouve que le cerf est un bel animal et j’aime le chasser pour sa noblesse et sa rapidité, le sanglier moins, mais c’est bon et Lord Yohn apprécie particulièrement sa traque. Les lièvres, eux sont très difficiles à tirer, alors c’est un défi qui me plait. Si non je chasse aussi le faisan, la grive et le pigeon, mais le plus souvent j’ai l’aide précieuse de mes trois chiens et de mon faucon. »

Elle sourit et reprit.

__ Je chasse souvent avec mon grand-père, mais aussi parfois seule ou avec mes hôtes, enfin seule, avec les chevaliers dirons-nous. Mais c’est Lord Yohn qui m’a appris à chasser, à partir du moment où il a su que je savais manier un arc, il m’a dit que je devais apprendre la valeur de la vie et celle de la mort. Alors il m’a emmenée avec lui dans les bois et m’a fait tirer sur un faon avant de me demander de l’achever avec son couteau. »

Cette première leçon avait été difficile, mais elle ne la regrettait pas, elle avait blessé le faon, elle devait abréger ses souffrances et quand elle avait ensuite demandé à Yohn pourquoi il lui avait interdit de tuer la mère, il lui avait dit que si elle avait tué la mère elle aurait condamné le faon en même temps et qu’ils n’étaient pas assez nombreux à table ce soir-là pour manger les deux bêtes donc que c’était une mauvaise chose que de tuer des animaux pour les laisser pourrir dans la forêt.

__ Et toi, racontes moi une anecdote, j’aimerais apprendre à te connaitre d’avantage le temps que je suis ici. »

Ashara aussi pensait aux enfants qu’elle aurait de lui et imaginait que les garçons seraient aussi beaux et forts que lui e que les filles seraient plus comme elle, mais que, s’ils le voulaient, ils iraient tous chasser en famille. Elle les voyait déjà galoper devant eux sur leurs poneys avec leurs arcs et elle se voyait rire avec son tendre époux de leurs bêtises et de la fuite des animaux due au fait qu’ils faisaient beaucoup trop de bruit. L’émotion de savoir que ses enfants seraient des Nordiens, qu’ils croiraient aux anciens Dieux, qu’ils seraient des Stark, la gagnait peu à peu. L’idée que son aîné hériterait de Winterfell et gouvernerait le Nord, que ces descendants régneraient sur cette contrée si sauvage et si étrange, mais aussi si belle. Le fait aussi de vivre aux côtés d’un homme si bon et doux que Robb et de faire partie d’une famille à la réputation si noble l’enchantait. Elle pensait aussi partager le deuil de Ned, alla aussi avait perdu son père ce jour-là au Donjon Rouge, sans rien pouvoir faire. Lorsqu’elle plongea son regard dans les yeux du Stark, elle avait les larmes aux yeux et un sourire sur les lèvres.

Dans le Val, ça n’était pas l’homme qui prononçait la sentence qui l’exécutait, et Ashara ignorait cette tradition Nordienne, elle aurait adoré la connaitre, mais certainement aurait-elle l’occasion de le voir à l’œuvre un jour. Rien ne pressait. Au lieu de ça, Robb lui raconta une bêtise qu’il avait commise avec Jon et la brune sourit à l’idée de la Septa courant après les deux gamins à travers l’immense forteresse et à celle de Robb terrorisé devant sa mère. Catelyn était une femme exceptionnelle, et l’éducation de son aînée en était le témoignage le plus flagrant. Mais il semblait évident que si elle pouvait certainement se montrer douce et maternelle, elle pouvait aussi se montrer autoritaire et un peu effrayante pour un gamin qui vient de faire une grosse bêtise.

Ashara connaissait ça par cœur, elle qui avait fait les 400 coups à Roche Aux Runes sous les yeux sévères de Lord Yohn avait eu à de multiples reprises droit à de sacrés réprimandes et même à quelques fessées. Néanmoins, le Bronzé ne s’était jamais montré violent inutilement et, trop conscient de sa force il la mesurait tellement pour les quelques fessées qu’il ne lui avait jamais véritablement fait mal. Par contre, elle avait eu peur, plein de fois. Mais il valait parfois mieux avoir peur que de voir la déception dans le regard de l’homme qu’on admire et dont on veut le plus être aimé. Cette déception elle l’avait vue une seule fois…

En effet, malgré le fait qu’il la réprimande pour essayer de l’éduquer, ces frasques l’amusaient au fond et surtout il avait lui aussi été un enfant turbulent. La seule chose qui différait était que désormais père et grand-père il s’inquiétait énormément pour elle et se sentait d’autant plus responsable qu’elle avait perdu père et mère et qu’elle était une Arryn sous sa responsabilité. Mais la seule et unique fois où elle l’avait véritablement déçu était cette nuit-là quand il l’avait découverte avec Waymar.
Lui aussi avait été un adolescent plein de fougue et d’hormones, mais il pensait qu’Ashara était trop digne et consciente de son devoir pour ne pas céder à la tentation, or il avait eu tort et il avait donc tout fait pour lui faire passer l’envie une bonne fois pour toute. Mais le pire de l’histoire, c’était qu’elle avait menti, hurlé et limite accusé son oncle de viol pour sauver ses fesses et éviter les réprimandes. Ça, il avait encore du mal à lui pardonner. Il avait tout de suite compris, on ne lui faisait pas à lui. Mais il n’avait même pas pris la peine de tenter de lui faire avouer la vérité. Au lieu de ça, il punissait sévèrement son fils pour la punir elle aussi à travers lui. Heureusement qu’il en avait deux autres.

Ce soir-là et tous les jours qui avaient suivi elle avait vu que Yohn ne la regardait plus de la même manière, qu’il n’avait plus la même fierté quand il posait ces yeux sur elle. Et ça, ça faisait mille fois plus mal qu’une bonne fessée. Ça lui avait brisé le cœur, et elle espérait sincèrement et priait régulièrement pour ça, qu’il la pardonnerait un jour. Quant à la punition, elle avait beau ignorer Waymar qui la haïssait désormais pour ça, elle n’en était pas moins très chagrinée et elle culpabilisait tous les jours que les Sept font. Elle culpabilisait pour lui, et aussi pour le chagrin d’Ysilla, surtout pour ça en fait, car elle voyait ses yeux rougis chaque matin et elle essayait de la consoler, mais rien n’y faisait. Parfois elle voulait lui dire que c’était sa faute et qu’elle était désolée, et que si elle pouvait revenir en arrière elle ne le referait. Mais elle ne pouvait pas, elle avait juré à Yohn de garder le secret et pire, Ysilla la tuerait.

__ Ce… je… non, je ne pleure pas… » Répondit elle en tentant tant bien que mal de ravaler ses larmes, le doux sourire qui accompagnait ses larmes était pourtant toujours sur sa bouche. « Je me suis quelque peu laissée emporter par l’émotion. Excusez-moi Messire. Mais rassurez-vous, ce sont des larmes de joie. »

Elle était un peu honteuse d’avoir laissé transparaître ses faiblesses elle qui d’ordinaire était si douée pour les cacher. Elle rougit et continua de sourire sans plus pouvoir s’arrêter. Elle avait tombé le masque depuis un bout de temps, elle était avec Robb, il serait peut-être son futur époux et si non un ami, un véritable ami, elle n’avait aucune raison de faire semblant avec lui. Mais tout de même un peu de tenue restait de mise, d’autant qu’ils n’étaient pas tout à fait seuls. Elle murmura.

__ J’imaginais nos enfants. J’imaginais notre vie lorsque nous serions mariés. Je sais que vous êtes jeunes encore et que peut-être vous n’êtes pas aussi pressé que moi, mais j’ai hâte que vous me couvriez les épaules du manteau au Loup. Je voudrais tant que nous soyons déjà fiancés. »

Elle releva brièvement la tête vers lui et eut un petit sourire pendant qu’elle prenait ses rênes dans une main et plaçait sa main libre du côté de Robb ouverte, paume vers le haut pour lui faire signe d’y poser la sienne.

Une fois de plus, Ashara était aux anges, sa douce et délicate main dans celle, déjà légèrement calleuse de Robb du fait du maniement des armes, était la preuve qu’il était un homme, la preuve qu’il était prêt. C’était aussi une preuve flagrante que ses sentiments étaient partagés, et ça, rien ne pouvait lui faire plus plaisir. Cette alliance serait bonne pour tout le monde, pour le Val, pour le Nord, pour l’amitié entre Lord Jon et Ned, et aussi pour elle et le jeune loup. C’était le mariage parfait, le mariage dont elle avait rêvé toute sa vie, un mariage à la fois plein d’amour et d’avantages, un mariage digne d’elle, mais aussi digne de Val et du Nord. Un grand et doux sourire éclaira son visage alors qu’elle regardait le jeune loup.

Elle pensait au mariage depuis qu’elle avait réalisé que c’était là son seul destin et qu’elle devait faire en sorte que ça ne soit pas un fiasco. Elle œuvrait depuis des années pour trouver l’homme qui méritait que le sang des Rois de la Montagne et du Val coule dans les veines de ses enfants. Elle avait bien faillit faire tout foirer à cause de cet imbécile de Waymar, dépucelée par son propre oncle, qu’aurait elle valut alors, plus rien, elle aurait déshonoré son nom et son grand-oncle ainsi que son grand père. Que faire alors ? Se jeter depuis la porte de la Lune lui semblait la seule solution, même les sœurs du silence ne pouvaient lui offrir une vie décente après cela, et qu’auraient ils pensés si la seule Arryn à marier avait renoncé à son devoir ? Mais heureusement, Yohn était arrivé à temps et malgré la déception qu’elle voyait à présent dans son regard, elle en regrettait pas qu’il les ait surpris et empêché de commettre l’irréparable.

Elle fut tout aussi ravie d’entendre que Robb n’ait jamais pensé à personne d’autre qu’elle en ces termes, mais elle n’eut pas le temps de répondre que le jeune homme porta sa main à ses lèvres. Elle se raidit un instant et manqua de la retirer par reflexe, mais elle en parvint pas à s’y résoudre, plongée qu’elle était dans les yeux bleus du Stark. Elle le regarda un bon moment la bouche ouverte, à la fois surprise, heureuse, sous le charme, ayant totalement oublié les trois hommes qui observaient la scène. Au bout de plusieurs secondes, elle prit une grande inspiration se rendant compte qu’elle avait oublié de respirer et reprenant ainsi son souffle. Une fois remise de ses émotions, ce qui prit encore quelques secondes, elle répondit enfin dans un murmure.

__ Alors je ferais tout pour que vous ne regrettiez jamais ce mariage et qu’aucune autre que moi ne hante vos pensées. »

Elle avait toujours les larmes aux yeux quand elle sentit le vent venir faire frissonner les feuilles. Elle se souvenait des lettres d’Ades et sut alors pourquoi Robb disait que les Dieux bénissaient leur union. Elle sourit à l’idée, mais Ser Rodrick la ramena brusquement à la réalité. Elle retira rapidement sa main de celle du jeune homme et se plongea dans la contemplation du pommeau de sa selle avec moue gênée, rouge comme une tomate. Elle n’osa même pas répondre au chevalier et se contenta de couiner en secouant la tête de bas en haut puis de gauche à droite, puis encore de bas en haut lorsque Robb lui proposa de rentrer.

Elle fit faire demi-tour à sa monture sans un mot de plus et évita soigneusement le regard de tous les hommes présents, tous, y compris Robb. Ce qu’elle ressentait à ce moment était un étrange mélange de honte absolue et de bonheur intense. Il restait à convaincre Lord Eddard, mais avec le cœur du jeune loup, cela serait certainement plus facile. Mais il n’en restait pas moins qu’en se laissant toucher de la sorte, elle manquait à tous ses devoirs de jouvencelle. Elle craignait que cela ne soit rapporté au Sire de Winterfell et qu’il refuse ce mariage à cause de sa faute. Quel père accepterait que son fils aîné épouse une catin qui se laissait embrasser la main dans les bois de la sorte ?!

__ Je suis désolée. » fit-elle alors, sans lever les yeux de ses mains qui tenaient les rênes et s’accrochaient à la crinière de son palefroi gris pour ne pas trembler et transmettre sa peur à son cheval.